L'association parisienne OABA, qui vient en assistance aux animaux d'abattoirs, annonce avoir pris en charge 650 brebis et 45 bovins, saisis dans un abattoir de Contes, dans les Alpes-Maritimes. La structure, un lieu d’abattage temporaire agréé depuis des années à l'approche de l'Aïd-el-Kébir, n'a pas eu de renouvellement de son agrément, dans un contexte de rupture de dialogue entre le préfet et les organisations musulmanes.
Près de 700 animaux – 650 brebis et 45 bovins – ont été saisis dans un abattoir à Contes (Alpes-Maritimes), dans l'arrière-pays niçois, annonce, ce mercredi 29 mai, l'Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA), association reconnue d'utilité publique et mandatée par la justice pour les recueillir.
Cette saisie dite "record" a eu lieu le lundi 27 mai vers 9 heures, précise l'association, qui déclare que ces animaux étaient "destinés à être égorgés en pleine conscience". L'OABA précise à France 3 Côte d'Azur que les bêtes ont été accompagnées dans deux "structures partenaires" situées en Bourgogne-Franche-Comté. Trois semi-remorques ont été nécessaires pour leur transport.
La structure concernée, à Contes, est un lieu d’abattage temporaire, autorisé depuis plusieurs années par la préfecture des Alpes-Maritimes à l'occasion des célébrations de la fête musulmane de l'Aïd-el-Kébir. Dans les familles musulmanes, cette fête, la plus importante célébration musulmane, est centrée autour de l'abattage rituel d'un mouton. Cette année, elle débutera le dimanche 16 juin.
⚠ Ces #animaux allaient tous se faire égorger clandestinement ! 🤯
— OABA (@OABA_Off) May 29, 2024
🔴 Lundi, nous avons frappé un grand coup. Sur ordre du Procureur de #Nice, l’#OABA a pris en charge près de 700 brebis, vaches, veaux sur un site d’abattage clandestin, épargnant ainsi ces animaux d'un… pic.twitter.com/JoFk1au7vZ
Imbroglio entre préfecture et organisations musulmanes
Un seul abattoir existe dans les Alpes-Maritimes, situé à Puget-Théniers. Ce dernier est réservé aux bouchers professionnels. Il ne suffit donc pas à répondre à toute la demande du département en vue de l'Aïd-el-Kébir. À l'approche de la fête religieuse, des structures d'abattage sont donc autorisées temporairement chaque année par la préfecture. Celle de Contes en fait partie.
Mais cette année marque une rupture historique dans les relations entre la préfecture et les organisations musulmanes du département. Lundi 27 mai, la Fédération azuréenne des mosquées et instituts islamiques (FAMII) a boycotté la réunion en préfecture qui devait renouveler les agréments des lieux d'abattages temporaires pour l'année en cours.
"Les actes des autorités préfectorales actuelles ont créé un climat de défiance à l’égard de notre communauté qui se sent incomprise", a écrit la FAMII au préfet des Alpes-Maritimes, Hugues Moutouh.
En février dernier, l'annonce par les autorités, de la fermeture prochaine du collège musulman privé Avicenne, à Nice, en raison d'un "problème de financement opaque" dénoncé par la ministre de l'Éducation nationale avait tendu les relations. La fermeture temporaire de la librairie Iqra par le préfet et les nombreux contrôles dans les mosquées ont également agacé les organisations musulmanes.
Faute de présence de la fédération religieuse à la réunion, le préfet n'a pas renouvelé cette année les agréments des abattoirs temporaires. L'OABA désigne ainsi la structure de Contes comme "un site d’abattage clandestin" dans un communiqué publié ce 29 mai.
Décision du procureur
L'OABA affirme à France 3 que la saisie des bêtes à Contes a été décidée sur ordre du procureur de la République de Nice. Frédéric Freund, le directeur général de l'OABA a précisé "qu'en attendant les poursuites judiciaires, le parquet de Nice a décidé de saisir l'ensemble des animaux".
Contacté, le procureur de la République n'a pour l'heure pas confirmé à France 3 ces informations.
Quatre agents de la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) étaient présents lors de la saisie, de même qu'un membre de la brigade nationale d’enquêtes vétérinaires et phytosanitaires et plusieurs gendarmes, toujours selon l'association. Les animaux étaient répartis sur deux sites. 250 brebis et 45 bovins étant présents sur le premier, 350 autres brebis sur le second, informe l'association.
Un communiqué de l'OABA laisse entendre que les brebis saisies le 27 mai dans l'élevage avaient vocation à être tuées à l'occasion de l'Aïd-el-Kébir. "Quinze jours avant l'Aïd-el-Kébir, c'est un bon signal envoyé à ceux qui voudraient faire de l'abattage clandestin", estime Frédéric Freund, le directeur général.
Il reviendra à un tribunal de statuer sur les poursuites pour les responsables de l'abattoir et sur l'avenir des animaux. Ces derniers pourraient à terme être confisqués, vendus ou restaurés à leur propriétaire, selon la décision de justice.
L'abattage clandestin est passible de six mois d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.