Malgré le discours officiel des services de l'Etat, qui se veulent rassurants sur l'approvisionnement en eau potable, dans les mairies, on s'active pour faire face à une sécheresse inédite. En se préparant au pire.
Ce lundi 30 mai au soir, Daniel Alberti a du prendre une décision rare et délicate : couper l'eau du village. Le Maire de la Brigue n'avait plus le choix : le bassin qui alimente les foyers de ses 700 administrés était vide aux deux tiers. Entre 23h et 6h du matin, plus une goutte d'eau, ni au robinet, ni pour faire tourner sa machine à laver et son lave-vaisselle.
C'était un week-end prolongé avec le pont de l'ascension, il y avait du monde au village et tant mieux. Mais avec peu de neige, et pas de pluie, notre source était trop faible
Daniel Alberti, maire de La Brigue
Une mesure exceptionnelle qui a suffi à remettre le bassin à flot.
Ca a bien marché. Le seul problème, c'est que quand vous fermez les tuyaux, vous créez des poches d'air
Daniel Alberti, maire de La Brigue
Mardi, les services techniques ont bataillé pour purger l'air, certains secteurs du village sont restés sans eau jusque dans l'après-midi.
Daniel Alberti ne veut pas inquiéter outre mesure : c'était une mesure ponctuelle. Mais tout de même, il réfléchit à sécuriser son approvisionnement en eau. Pour le moment, le village dépend d'une source située en amont, source dont l'eau est stockée dans un bassin.
Mais jusque dans les années 50, sans eau courante, les fontaines du village étaient approvisionnées par une source située plus bas. "On veut installer un tube provisoire et une pompe pour remonter l'eau de cette source vers le bassin". Le village a quelques semaines pour se préparer, car selon son maire, la tension sera à son maximum à la fin de l'été.
A 120 km de là, dans la vallée de l'Estéron, c'est aussi le branle-bas de combat.
Les 16 communes du SIEVI, syndicat intercommunal de l'Estéron et du Var inférieur, se concertent pour venir en aide aux communes les plus fragiles, celles, notamment, qui dépendent d'une source unique.
"Ce sont des sites mono-ressources, explique Marc Belvisi, le maire de Pierrefeu et président du SIEVI, "si cette source se tarit, le village n'a plus d'eau".
Alors le syndicat a demandé à son délégataire, Véolia, d'entreprendre des travaux en urgence : l'installation de vannes motorisées à Tourrettes-sur-Loup pour relier deux sources, et à Tourette-du-Château, près de Gilette, pour récupérer des ressources en eau de Revest-les-Roches.
Montant des travaux : 50 000 euros.
Forcer l'eau à prendre de nouveaux chemins pour éviter la pénurie. Le SIVI envisage aussi de s'équiper d'un camion citerne pour emmener l'eau là où elle manque.
L'été approche : avec la surpopulation que connait notre région, on a des consommations d'eau qui vont monter en flèche au pire moment
Marc Belvisi, maire de Pierrefeu
En attendant, les élus font de la prévention, rappellent les restrictions d'eau qui touchent désormais 90% des Alpes-Maritimes, et font la lutte au gaspis, grâce à de nouveaux compteurs : dans la vallée de l'Estéron, ils serviront à mesurer le débit des fontaines, pour réduire les fuites.
Environ 15% de l'eau du réseau s'évapore dans la nature.
A La Brigue, l'opération sera plus délicate, mais inévitable : l'installation de compteurs d'eau individuels. Pour le moment, l'eau y coule gratuitement.
Bientôt il faudra payer, et donc compter.