Coronavirus : "Ici, la vie ne tient qu'à un fil, aidez-nous", l'appel aux dons d'infirmières à Marseille

Les infirmières du service réanimation de l'hôpital Nord de Marseille ont poussé un cri d'alerte sur Facebook. Face au coronavirus, elles manquent de matériels : masques, blouses, gants, leur SOS a entraîné une belle chaîne de solidarité. Mais il en faut encore plus.

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Marseille, service de réanimation de détresse respiratoire infectieux sévères (DRIS) de l'hôpital Nord. Une vague de nouveaux patients déferle chaque jour, jusqu'à 20 nouveaux arrivants, en état grave, chaque 24 heures.

Une crise que le personnel n'arrive pas à affronter avec les seuls moyens de l'hôpital. "La réanimation est le dernier endroit dont on voudrait pousser les portes croyez-moi ! Ici, la vie ne tient qu'à un fil, que nous soignants portons à bout de bras", écrit une infirmière sur sa page Facebook. 

Sur des images tournées à l'intérieur du service, on peut y voir un pneumologue qui s'apprête à rendre visite à un patient en réanimation.

Pour entrer dans la chambre, il doit enfiler une blouse imperméable, un masque filtrant, des lunettes, une charlotte sur la tête et des gants aux mains.

L'attirail peut sembler normal. Sauf que tout ce matériel n'a pas été fourni par l'hôpital. Le personnel soignant a dû se procurer lui-même ces équipements, via un appel aux dons sur Facebook.

Dimanche 22 mars, trois infirmières du service poussent un cri d'alerte sur les réseaux sociaux. "Nous sommes dans une situation de détresse, et craignons tous les jours de travailler sans masque, nous avons l'impression d'être de la chair à canon", écrivent-elles sur Facebook.

Elles affirment être en situation de restriction, avec seulement deux masques disponibles par personne et par jour.

Or, en présence de Covid-19, les masques doivent être changés toutes les trois à quatre heures. Pour les journées de douze heures que font les infirmières, il leur faudrait donc presque le double de masques.Sur certaines photos, le message est clair et volontairement provocateur. "On a énormément de patients atteints de Covid-19 et en état grave qui arrivent tous les jours", regrette Leila Mehnane, infirmière. 

"On a dû se réorganiser pour pouvoir doubler notre capacité de prise en charge. Mais dans le service de réanimation, c'est très compliqué car on a peu de place et peu de matériel à notre disposition".

Appel aux dons à toutes les professions

Alors, Leila, Julie et Alexandra ont décidé de lancer une bouteille à la mer. Sur facebook, ces infirmières en appellent aux "particuliers, entreprises BTP, automobiles, tatoueurs, esthéticiennes" tous ceux qui possèdent "des masques FFP2 ou masques chirurgicaux, des solutions hydroalcoolique, des gants, des visières, des blouses, des lunettes de protection sans en avoir besoin", à leur en faire don.

"La France est réputée comme ayant l'un des meilleurs services de santé du monde, pourtant, nous soignants, nous nous retrouvons à faire des appels aux dons sur les réseaux sociaux pour pouvoir être équipés et pour pouvoir soigner", déplore Leila Mehnane.

Largement relayé sur les réseaux sociaux, leur SOS a été entendu. Les dons affluent dans le service, et les cartons s'amoncellent dans les couloirs. Au feutre, on peut lire sur les boîtes "Dons masques", "dons gants" et autres "dons surchaussures", tout est soigneusement trié.

Un important soutien matériel et moral

En petite ou grande quantité, le matériel reçu provient d'autres services hospitaliers moins surchargés, mais aussi de particuliers ou d'entreprises industrielles.

"On a eu énormément de réponses. Les autres professions nous ont soutenus. Par exemple, des soudeurs nous ont donné des masques, et des professionnels du nucléaire nous ont donné des blouses et des cagoules. Ce sont des moyens que nous n'avons pas, en tant que soignants à l'hôpital", se réjouit Leila.

La forte mobilisation a donné au service un coup de pouce considérable sur le plan matériel. Pour les infirmières, il a aussi apporté un soutien moral inestimable.

"Ca fait du bien, parce qu'on va pouvoir mieux faire face à cette crise grâce à eux. En plus du renfort, on sent aussi de la reconnaissance."

Un effort encore insuffisant

L'élan de générosité initié par ces infirmières est précieux pour elles, mais reste insuffisant face à l'ampleur de la crise.

Le manque de moyens se fait encore sentir, et il peut avoir des conséquences sur les soins et la prise en charge, selon les infirmières du DRIS.

Pour illustrer cette situation, Leila ne manque pas d'exemples. Entre autres, elle raconte comment un patient en fin de vie aurait pu être privé de ses derniers adieux à sa famille, en raison de cette carence matérielle.

"On a dû trimer pour permettre à la famille de se recueillir auprès de leur père, parce qu'on n’avait pas de moyens de sécuriser leur visite en les équipant de masques, tout simplement".

La visite a finalement pu s'organiser grâce à la générosité d'autres services de l'hôpital, qui leur ont fait don de masques.

Une situation qui ne peut pas durer selon l'infirmière. "Malheureusement ce n'est pas assez encore. L'épidémie commence à peine. On reçoit de plus en plus de patients dans un état grave, les moyens de protection sont indispensables pour nous pour pouvoir soigner efficacement", répète-t-elle.

Comment aider les hôpitaux ?

Les infirmières de l'hôpital Nord ne sont pas les seules à tirer la sonnette d'alarme. Dans les hôpitaux, plus l'épidémie de coronavirus progresse, plus les appels à l'aide se multiplient et les établissements s'organisent.

Face à ces chaînes solidaires qui fleurissent, l'AP-HM a décidé de centraliser toutes les initiatives d'aide aux personnels soignants, afin de mieux répartir les dons, que ce soit du matériel, des repas ou encore de l'argent.

Une adresse e-mail a été ouverte pour réceptionner toutes les propositions: solidarite-covid19@ap-hm.fr Les hopitaux marseillais sont également en besoin de personnel médical ou paramédical. Sur les réseaux sociaux, ils passent même un appel urgent au recrutement. Les candidatures sont réceptionnées sur le site internet de l'AP-HM.

Pour postuler, il faut être titulaire d'un diplôme médical d'Etat et être disponible immédiatement. 

Enfin, la direction de l'AP-HM "remercie également chaleureusement la population marseillaise pour ses manifestations de solidarité tous les soirs à 20h et lui recommande de respecter scrupuleusement les consignes de confinement".

Sur les réseaux sociaux, Leila et ses collègues infirmières continuent de partager leurs photos, faites d'un quotidien de peine et de souffrance, mais avec derrière les masques, un petit sourire, comme un pied de nez à une épidémie ravageuse.  
 
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