C’était le jour le plus attendu de ce procès pour un grand nombre de familles de victimes, dont plusieurs sont originaires de la région. Bahia Bakari, la seule rescapée du crash de la Yemenia Airways a témoigné ce matin peu après 10 heures au tribunal judiciaire de Paris.
"C'est le témoigne le plus important de ma vie", lâche Bahia Baraki aux micros des journalistes à la fin de l'audience.
Ce matin, peu après 10 heures, la miraculée de 25 ans s'est avancée à la barre et a raconté de manière calme et détaillé la nuit qui a bouleversé sa vie et celle de 152 personnes, il y a treize ans.
Bahia Bakari a douze ans lorsqu'elle part le 29 juin 2009 de l'aéroport de Roissy avec sa mère pour des vacances aux Comores. Après une étape à Marseille, elles ont changé d'avion à Sanaa, au Yémen.
A l'approche de Moroni, la capitale des Comores, "les conseils de sécurité ont été annoncés, les voyants pour attacher la ceinture se sont allumés", explique la jeune femme.
Un "trou noir" puis des heures dans l'eau, "agrippée à un débris d'avion"
"J'ai un trou noir entre le moment où j'étais assise dans l'avion et le moment où je me retrouve dans l'eau", raconte Bahia Baraki.
La seule rescapée a survécu en restant agrippée une dizaine d'heures à un débris de l'avion, avant d'être secourue par des marins le lendemain.
Rapatriée en France, elle reste une vingtaine de jours hospitalisée pour soigner des fractures ainsi que des brûlures aux pieds et un pneumothorax.
"Ce qui a été très compliqué pour moi, c'est de gérer le deuil de ma mère, j'étais très proche d'elle". A la barre, sa voix se brise pour la première fois, elle est submergée par les larmes.
"C'est vrai que je suis habituée à raconter mon histoire mais c'est très compliqué parce que ça fait remonter des souvenirs", des "flashbacks".
Un témoignage crucial pour les familles de victimes
La jeune femme est la seule témoin réel de ce terrible crash au large des Comores. "Bahia représente notre combat et tout le malheur que l’on a subi, aussi nos espoirs elle condense toute seule cette affaire." raconte Saïd Assoumi, représentant des familles de victimes à Marseille.
La Yemenia Airways, la compagnie qui opérait le vol est jugée pour homicides et blessures involontaires. "Il y a beaucoup d’émotions, c’est le moment le plus important de notre procès" ajoute Saïd Assoumi.
Près de 200 proches de victimes assistent au procès depuis son ouverture le lundi 9 mai à Paris.
Yemenia, grande absente du procès
Depuis l'ouverture du procès, le banc des prévenus est vide: aucun représentant de la compagnie n'est présent à cause de la guerre qui fait rage au Yémen, selon la défense.
Interrogée sur cette absence par un avocat des familles, Bahia Bakari la regrette: "j'aurais aimé qu'ils nous écoutent" et "avoir des excuses".
Pour Said Assoumi représentant des familles de victimes l'absence des prévenus "est une offense et une insulte aux morts".
"C’était une catastrophe prévisible et annoncée", selon maître Claude Lienhard, l'un des avocats des familles des victimes.
La Yemenia Airways, qui opérait le vol IY626, est soupçonnée de "manquements et négligences ". Les expertises ont conclu que l'accident était dû à une série d'erreurs de pilotage.
Il lui est reproché d'avoir maintenu les vols de nuit pour Moroni malgré la panne de feux signalant les obstacles à proximité de l'aéroport et d'avoir insuffisamment formé ses pilotes.
Le procès doit s'achever le 2 juin prochain.