Depuis 2019, un groupe de scientifiques de Marseille étudie les mouvements des daurades dans le Golfe du Lion. Équipés de capteurs hydrophones, les poissons ont révélé bien des surprises aux chercheurs : certains d'entre eux effectuent leur parcours migratoire jusqu'en Espagne depuis les calanques.
Les daurades peuplent nos côtes méditerranéennes. Pour se nourrir comme pour se reproduire, le poisson est présent par millier dans les eaux du Parc naturel marin du Golfe du Lion (pourtour maritime français). Mais que sait-on réellement de ce poisson ? Quelles sont ses habitudes ? Ses déplacements ? Quel est son cycle de vie ?
Des chercheurs de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) et du parc naturel des Calanques (Bouches-du-Rhône) ont mené une étude sur ces petits poissons. C'est le projet CONNECT-MED. Depuis 2019, l’équipe a ainsi capturé 400 daurades venant de 6 zones géographiques différentes, afin de les munir de capteurs reliés à un réseau d’hydrophones placés en mer et dans les étangs littoraux.
Pour résumer, ils ont placé 400 daurades sous surveillance. Les scientifiques appellent ça la télémétrie acoustique. “On cherche à voir à quel moment et à quel endroit passe quel poisson”, résume Jérôme Bourjea, chercheur à l’Ifremer. Les scientifiques ont dévoilé leurs premières conclusions dans un court métrage en ligne intitulé "A l'écoute des daurades".
Les daurades vont se reproduire en Espagne
“On sait depuis très longtemps qu’il y a des échanges entre la mer et les lagunes”, explique Patrick Bonhomme, chargé de mission de pêche dans le parc national des Calanques.
Leurs observations ont permis de confirmer qu’avec le refroidissement hivernal, les daurades migrent des étangs vers le large des côtes marseillaises. Se déplaçant en banc, elles vont ainsi s’y reproduire au terme d'un été passé à se nourrir.
“On a par exemple constaté des échanges à l’automne ou les daurades de toute la région arrivent en direction de Marseille”, explique Patrick Bonhomme.
Il ignorait cependant que les mouvements du poisson s’effectuaient à si grande échelle. “On a des daurades marquées dans les Calanques qui ont été retrouvées en Espagne”, ajoute le scientifique. Un certain nombre de daurades ont été identifiées au large des côtes catalanes, un déplacement qu’elles effectuent pour se reproduire.
Un phénomène à étudier dans la durée
Les équipes françaises de l’Ifremer travaillent aujourd’hui en collaboration avec les équipes catalanes. Étudier cette espèce leur permet d’apprendre à la préserver.
“C’est important pour comprendre quelles sont les zones essentielles pour son développement tout au long de la vie, notamment les zones de nourricerie et de reproduction”, explique le spécialiste qui s’est depuis formé à la chirurgie sur les poissons afin d’être en capacité de poser lui-même les capteurs dans leur faire de mal.
“On aimerait savoir quelle est la fidélité des daurades, dans le temps et dans l’espace. Est-ce que ce sont toujours les mêmes daurades qui viennent ? Est-ce qu’elles repartent toujours dans les mêmes lagunes. Est-ce qu’il y a des populations différentes entre la mer et les lagunes ? Est-ce que toutes les daurades rentrent dans les lagunes ?, s’interroge Patrick Bonhomme.
Avec ses collaborateurs, ils étudient l’impact du réchauffement climatique sur cette espèce. “On sait que les daurades peuvent être sensibles à la température”, conclut le scientifique. Vingt-huit degrés dans les étangs, c’est trop chaud pour elles.
Article écrit avec Estelle Mathieu, journaliste à France 3 Provence-Alpes.