Gratuité des transports à Marseille : "À ce jour, rien n'est acté," affirme la Métropole, freinée par la question du financement

"Vous connaissez ma formule, la gratuité des transports a un coût" : le 7 décembre dernier, en conseil métropolitain, Martine Vassal promettait de remettre le sujet sur la table. Mais à ce jour, rien n'est tranché, annoncent ses services. La question du financement reste cruciale.

"Vous connaissez ma formule : la gratuité a un coût". Le 7 décembre 2023, en conseil métropolitain, la présidente créait la surprise, se disant prête à réexaminer la question de la gratuité dans les transports en commun. En 2019, Martine Vassal avait pourtant enterré l'idée, estimée trop coûteuse pour la collectivité. "On va remettre l'étude au goût du jour", répond-elle avec fermeté devant l'assemblée. "J'ai demandé à mes services de relancer, en début d'année, une nouvelle consultation, avec à la fois des habitants et des associations".

Martine Vassal précise avoir besoin d'éléments "frais, nets et précis". "Montpellier le fait, Lyon ne veut absolument pas le faire", déclare la présidente, "il y a des pour et des contre partout," laissant supposer qu'elle est prête à tendre une oreille aux arguments qui s'opposent autour de cette question. En 2022, au micro de Radio Maritima, la présidente déclarait cependant "comme j'aimerais faire la gratuité des transports ! Mais il faut trouver 300 millions d'euros par an".

Quel prix pour la gratuité ?

Invariablement, la communication de la Métropole Aix-Marseille-Provence s'articule autour du financement de la gratuité. La question s'est posée de la même manière à Montpellier au moment de la mise en œuvre de cette mesure, appliquée depuis décembre 2023 dans la métropole de l'Hérault. 

Pour Marion Pigamo, enseignante à Sciences Po-Aix et conseil en communication, le coût est certes le premier sujet qui préoccupe les usagers, a fortiori dans un contexte d'inflation, mais la gratuité ne peut s'envisager à travers ce prisme exclusif. "Ce n'est pas uniquement une mesure comptable, mais la promesse d'un nouveau contrat social" qui s'établit autour d'un projet de territoire : développement du réseau et accès à l'offre de transports.

La gratuité des transports n'est pas un "cadeau" que l’on ferait aux usagers, mais la vision d'un territoire et de son développement au travers de la mobilité.

Marion Pigamo, enseignante à Sciences Po Aix

à France 3 Provence-Alpes

"Mais si c'est gratuit, qui va payer ? " : la question soulève souvent de la défiance de la part des usagers. "La vraie question est : quel rapport installe-t-on entre les usagers, le citoyen et le service public ?", répond Marion Pigamo, qui rappelle que l’on se trouve dans "une situation d'urgence climatique avec des enjeux de décarbonation et de transition écologique extrêmement forts".

La gratuité peut alors être entrevue comme une incitation à emprunter davantage les transports collectifs, à condition que le réseau soit suffisamment développé pour répondre aux besoins de mobilité de chacun, y compris dans la campagne ou la ruralité.

Un investissement rentable ? 

À Niort, où la gratuité est en vigueur depuis cinq ans, la mairie parle d'une hausse de 30% du nombre des usagers sur le réseau et d'un record de fréquentation battu en 2023 avec plus de six millions de trajets. "La gratuité est un investissement de la collectivité", commente Mario Pigamo, "et cet investissement symbolise l'importance de l'enjeu qu'elle représente". 

Le sujet fait réagir l'Union des étudiants d'Aix-Marseille qui signe début janvier une lettre ouverte à Martine Vassal et fait le tour des parlementaires des Bouches-du-Rhône pour obtenir leur soutien. La gratuité est, disent-ils, une mesure sociale à prendre d'urgence face la paupérisation des étudiants en France. "Il faut penser investissement", confirme Lyes Belhadj, le président de ce collectif étudiant qui présente la gratuité des transports comme un cercle vertueux.

Que fait-on de nos impôts locaux ? On peut aussi utiliser l'argent des Français pour leur faciliter la vie et améliorer leurs conditions matérielles d'existence.

Lyes Belhadj, président de l'Union des étudiants d'Aix-Marseille

à France 3 Provence-Alpes

"Si des jeunes peuvent étudier, le territoire devient attractif, ils vont rester pour travailler" expose-t-il, "vous soulagez aussi des travailleurs précaires, qui ne peuvent pas consommer parce que leur argent part dans les transports, les entreprises récoltent les fruits de leur consommation et reversent plus d'impôt à la métropole qui finance la gratuité !"

43 villes françaises proposent la gratuité des transports

Le sujet mérite un peu de pédagogie, insiste Lyes Belhadj, "si on veut bien rationaliser et se poser pour réfléchir... on ne fait pas de la politique sur TikTok ou sur Twitter, la politique, ça demande du temps". 

Comme outil pédagogique, l'Observatoire des villes du transport gratuit propose un état des lieux et recense avec précision les 43 territoires français où les transports en commun sont gratuits. Au cœur de la Métropole d'Aix-Marseille, Aubagne fait figure de pionnière depuis 2009, mais pas de locomotive.

"Accès libre pour tous, sans carte ni validation" : la mesure, fort appréciée des usagers, s'applique sur un territoire de 12 communes, mais n'a toujours pas réussi à inspirer la Métropole, qui vient pourtant de lancer une extension du tramway baptisé Val'tram. Fin 2025, il faudra moins d'une demi-heure pour parcourir gratuitement les 14,4 km qui séparent la gare d'Aubagne du terminus de La Bouilladisse.

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