Pas de labo pendant trois jours… au moins ! L’ensemble du secteur de la biologie médicale est en grève à compter de ce lundi 14 novembre. Pour cause, un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui prévoit 250 millions d'économies par an.
C'est un fait rare. De Marseille à Nice, en passant par Avignon ou Gap, comme dans le reste de l'hexagone 95% des rideaux des laboratoires sont tirés aujourd’hui? Et ce pour trois jours.
Sous prétexte que le chiffre d’affaire des laboratoires d’analyses a fait un bond de 85% pendant la crise du Covid, entre 2019 et 2020, le gouvernement prévoit, dans un projet de financement de la Sécurité sociale, 250 millions d’euros d’économie par an. L’Assurance maladie souhaite également baisser les tarifs de 8% de façon pérenne.
Une contribution exceptionnelle
"On met en avant l’activité qu’on a ni souhaité, ni commandé pendant le Covid. On nous a demandé d’être réactifs et ça a généré une dépense qu’on nous reproche aujourd’hui", explique le Dr Boris Loquet, président URPS des biologistes de la région Paca.
Ce que souhaitent les laboratoires à travers ce mouvement de grève, c’est la suppression de l’article 27 du projet de loi de financement de sécurité sociale, qui prévoit ces 250 millions d’économies par an.
Le mouvement est porté par les grands groupes de laboratoires privés (Biogroup, Cerba, Eurofins, Inovie, Synlab).
On est d’accord qu’il faut maîtriser les dépenses et on joue le jeu. Mais là, ça met en péril l’activité de la biologie.
Boris Loquet, président URPS des biologistes de Paca.
"Nous sommes dans une enveloppe de contrainte depuis 2013, où 5,2 milliards d’euros ont été économisés pour la Sécurité Sociale grâce à une régulation tarifaire avec une valeur globale des actes qui a baissé de 30 %. Le coût de la biologie diminue depuis 2013, on n’a pas encore besoin de la diminuer, sous prétexte d’une économie", poursuit-il.
"On est d’accord qu’il faut maîtriser les dépenses et on joue le jeu. Mais là, ça met en péril l’activité de la biologie." Les laboratoires ne sont pas contre "faire un effort sur l’activité Covid, en rendant 250 millions sur l’activité de Covid en 2023 sous forme d'une contribution exceptionnelle par exemple, mais on ne veut pas que ce soit de manière pérenne sachant que l'activité Covid elle-même n'est pas pérenne et diminue », confirme le Dr Boris Loquet, qui se dit prêt à refaire un accord encadré avec l’Assurance maladie.
Sacrifier l'activité courante
En plus de ces 250 millions d’euros par an, la baisse des tarifs de 8% ne passe pas non plus du côté des biologistes. "L’activité courante diminue déjà. Si on rajoute à cela, la baisse des tarifs et l’augmentation de l’inflation, on pourra plus soutenir une activité comme on la soutient."
Un "coup de rabot" qui aura un impact avec notamment des fermetures de laboratoires de proximité, une baisse de l’emploi, une baisse des investissements dans l’innovation, un accès aux soins limités ainsi qu’une baisse de la qualité des soins.
"La biologie représente même pas 2% des dépenses de santé, et il faudrait que l’on soit les plus gros contributeurs de l’objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) en portant à elle seule 20% des économies demandées. C’est déconnecté de la réalité", s'insurge le président de l'URPS biologistes.
Soutien du Sénat
Malgré un soutien du Sénat "qui a été à l'écoute", le mouvement social peut être reconduit ou prolongé "en fonction de l'attitude du gouvernement", annonce Boris Loquet. Pour l'heure, aucune rencontre n'est prévue entre les deux protagonistes.
"Nous restons joignables car nous sommes des professionnels de santé, et nous sommes capables de prendre en charge les urgences vitales", assure le Dr Loquet.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale s’articule autour de 5 mesures phares : Renforcer le virage préventif, améliorer l’accès à la santé, mieux financer les modes d’accueil du jeune enfant, construire la société du bien vieillir chez soi et lutter contre la fraude sociale.