Les immeubles effondrés de la rue d'Aubagne étaient vieux de 200 ou 300 ans. Construits sur le modèle dit "des trois fenêtres marseillais", les murs étaient faits de pierres et de mortier, fragilisés par le temps, le mauvais entretien et les transformations multiples
L'origine des immeubles dits "des trois fenêtres marseillais" remonte au 18° siècle, mais ce modèle de construction s'est surtout développé au siècle suivant.
indique Pascal Rebufel, expert immobilier à Marseille.Il s'agit tout simplement d'une règle d'urbanisme imposée à partir de 1847 pour lutter contre la pénurie de terrains et répondre ainsi à la forte demande de logements
La particularité de ces immeubles de sept mètres de large est qu'ils n'ont pas de mur porteur. Composés d'appartements traversant, un par étage et d'un escalier fixé sur une colonne unique.
1. Le mortier qui doit tenir les murs est devenu friable
Les murs de ces immeubles "trois fenêtres" sont constitués de pierres de taille ou de tout venant, assemblés par du mortier.explique Fabien Cadenal, architecte marseillais mais ajoute :Ce mortier est "mort" depuis longtemps, il est proche d'un mélange terreux et n'a plus de cohésion
Pas de panique donc, à condition de ne pas y toucher.Pas de panique, les murs tiennent par leur propre poids et par l'agencement des pierres
La moindre transformation sur ces murs, vieux de 200 ou 300 ans, peut être dramatique, surtout si ces travaux ne sont pas réalisés par des professionnels compétents.
2. Trop de poids sur les poutres en bois
A chaque étage, les planchers sont en bois, supportés par des poutres qui s'encastrent dans les murs.précise Fabien Cadenel.Ce sont des poutres rondes de 7 mètres de long, fragilisées par le temps, l'humidité, les insectes
Sur ces poutres reposent des planches grossières (fustes) qui elles-mêmes sont recouvertes de tomettes ou parfois de deux couches de carrelages.
Là encore, l'architecte veut être rassurant, "le bois a une énorme résistance à la surcharge", à condition d'être régulièrement entretenu.Ce poids supplémentaire, accumulé d'étage en étage, représente parfois plusieurs dizaines de tonnes
3. Les travaux fragilisent les murs
Les murs ne tiennent que par l'agencement des pierres. Toutes modifications des murs fragilisent la structure. Avec le temps et l'accumulation des transformations des logements, les murs ne sont plus suffisamment solides.précise l'architecteLes murs sont fragilisés si on élargit les portes ou les fenêtres, ou encore lorsqu'on transforme un appartement en loft. Il y a aussi le cas des commerçants qui agrandissent leur vitrine au rez-de-chaussée
Le simple fait de percer un trou pour passer une gaine ou installer une climatisation peut fragiliser les murs
4. L'absence d'entretien régulier
Certains immeubles dits "des trois fenêtres marseillais" datent du 18° siècle, ils doivent être surveillés de près régulièrement. La charpente, et plus globalement la toiture, doit être contrôlé tous les 5 ou 10 ans.précise l'architecte et ajoute que ces immeubles mitoyens ont des murs collés entre eux. Si l'eau s'infiltre dans un mur, elle s'infiltre aussi dans l'autre.Si on laisse l'eau s'infiltrer dans un mur, il s'imbibe, devient lourd et fragile
5. Les erreurs de rénovation
Rénover un appartement ou encore la façade d'un immeuble "trois fenêtres" c'est important et même indispensable, mais à condition de le faire correctement. Il y a des erreurs à ne pas commettre.indique Fabien Cadenel et précise qu'il faut bien entretenir la toiture et chasser l'humidité.Si vous mettez une peinture étanche sur la façade et que vous refaite l'isolation à l'intérieur, l'humidité reste dans les murs et la structure va souffrir
Tous les immeubles dits "des trois fenêtres marseillais" ne sont pas voués à la démolition, bien au contraire, mais ils ont besoin d'un entretien régulier et surtout par des professionnels compétents, tout comme une voiture ancienne de collection.
Petite explication sur les immeubles de #Marseille dit "trois fenêtres" et comment/pourquoi ils s'écroulent parfois. #RueAubagne #teamarchi #Effondrement
— Fabien Cadenel (@fc_archi) 7 novembre 2018