La Soliha Provence expulse les délogés qu'elle reloge, même s'ils n'ont toujours pas accès au logement et malgré les recommandations de la charte du relogement. Le média Blast sort une enquête sur l'épineuse question du logement à Marseille.
40.000 logements insalubres. Le drame de la rue d'Aubagne. 40.000 demandes d'HLM en cours. 14.000 sans-abris. 1.500 délogés. La question du logement à Marseille est un dossier gigantesque, posé tantôt sur les tables des politiques, tantôt sur celles des journalistes. C'est un média indépendant, "Blast", qui, cette fois, révèle des informations chocs sur la Soliha Provence, acteur du logement social à Marseille. Dans son article, le journaliste Xavier Monnier aborde aussi la question du conflit d'intérêts voire de la corruption qui gangrène la cité phocéenne, toujours autour de cette question majeure du logement. Alerté en mars par une dizaine de procédures judiciaires à l'encontre de délogés expulsés, son enquête s'appuie sur un temps de travail et de recherches antérieures considérable.
Bailleur social en justice contre ses sinistrés
L'affaire est complexe et l'enquête longue. Son auteur, Xavier Monnier, qui a publié notamment en 2016 le livre : "Les nouveaux parrains de Marseille", précise que c'est "notre rôle de journaliste de rapprocher les discours officiels de la réalité des faits".
Dans cet article, le discours officiel est celui d'une municipalité qui voudrait rompre avec les 25 années de Jean-Claude Gaudin à la tête de Marseille et qui a fait du logement une question centrale. Une municipalité qui a signé, avec l'Etat et différents collectifs et associations, une charte du relogement en novembre 2021.
La réalité est celle de la Soliha Provence, gagnante d'un appel d'offres pour reloger les personnes délogées à Marseille à la suite d'arrêtés de mise en sécurité. Selon l'enquête, cet acteur du logement social ne respecte pas cette charte en expulsant ces délogés dès la fin des arrêtés et sans attendre que ces personnes aient accès à un logement descend. Elle va parfois en justice pour ces expulsions et recommande aux sinistrés de porter plainte contre son propre donneur d'ordres : la Ville de Marseille.
Énorme conflit d'intérêts du directeur adjoint du plan école
Cette enquête met ensuite en lumière l'énorme conflit d'intérêts du directeur adjoint du plan écoles. Christophe Pierrel aurait influencé l'adjointe à l’urbanisme Mathilde Chaboche : véritable raison de sa démission. Surtout, et plus grave, l'article nous apprend qu'il a demandé à rejoindre une entreprise privée du BTP qui avait remporté ... l'appel d'offres du plan école.
"Il ne faudrait pas retomber dans les travers de l'ancienne municipalité", déplore Xavier Monnier, l'auteur de cette enquête édifiante, qui rappelle qu'entre 1.400 (chiffre officiel) et 3.500 (chiffre des associations) personnes sont délogées à Marseille. "Ça commence à faire partie de la carte postale de Marseille mais il faut lutter contre ça", condamne celui qui reconnaît une amélioration depuis le drame de la rue d'Aubagne. Et d'ajouter : "Il faut continuer, il ne faut pas lâcher et ça commence par faire appliquer cette charte du relogement qui est une bonne base de travail... qu'il faut respecter".