Marseille : pourquoi la démission de Michèle Rubirola n’est pas vraiment une surprise

La maire de Marseille Michèle Rubirola a annoncé sa démission lors d'une conférence de presse mardi. Toutefois la rumeur court depuis plusieurs semaines. France 3 vous explique pourquoi

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Un séisme politique prévisible ? Michèle Rubirola a annoncé, mardi 15 décembre sa démission du poste de maire de Marseille. Si pour certains cette décision est un coup de tonnerre, plusieurs membres de l'opposition à Marseille assurent qu'ils ne s'agit que d'une demi-surprise. France 3 vous explique pourquoi.

• Parce que ses soucis de santé étaient connus

Cette démission est d'abord liée à des problèmes médicaux. Michèle Rubirola s'était d'ailleurs absentée pendant un mois, à la fin août, début septembre pour une intervention chirurgicale. Aucune information n'a filtré sur cette opération, protégée par le secret médical. Durant cette longue absence en pleine crise sanitaire, Benoît Payan avait assuré l'intérim au poste de maire.

"J’ai dû subir en septembre une intervention chirurgicale et j’ai été transparente à ce sujet. Cela limite l’énergie que je peux mobiliser, le temps consacré à mes missions, être maire à Marseille c’est donner 300% de son temps", a-t-elle déclaré devant la presse mardi.

"J'ai connu, dès l'été, les premières difficultés liées à ma santé. (...)", a-t-elle ajouté. Julien Bayou était lui aussi au courant de ces soucis. Le secrétaire national du parti Europe Écologie Les Verts avait expliqué un peu plus tôt à l'AFP que l'élue allait démissionner pour raisons "de santé".

Ce changement politique s'explique également par sa récente nomination, le 4 décembre, à la tête de l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM). La médecin de 64 ans veut avoir du temps à consacrer à sa fonction et au milieu médical, elle a la médecine chevillée au corps.

Face à l'importance de son mandat de maire, Michèle Rubirola n'aurait pas eu le temps de se consacrer pleinement à sa mission de président de l'AP-HM.

• Parce qu'elle avait déjà exprimé des doutes

Michèle Rubirola a été choisie pour être tête de liste du Printemps Marseillais en janvier. Son nom a permis de rassembler les écologistes, les insoumis, les socialistes et les communistes, puis de gagner la mairie de Marseille. Elle a été projetée sur le devant de la scène mais l'a-t-elle vraiment voulu ?

Le Printemps marseillais ne souhaitait pas un socialiste en tête de liste en raison du passé du parti à Marseille. Candidate du consensus, elle a permis à la gauche de mettre fin à 25 ans de pouvoir de droite. Mais le costume a parfois paru trop grand pour cette candidate venue de la société civile. Mal à l'aise face aux caméras, de son propre aveu, elle laissait souvent la place à son premier adjoint, Benoît Payan. 

Première femme maire de Marseille, celle qui le 4 juillet a mis fin à 25 ans de règne de la droite et de l'édile Les Républicains Jean-Claude Gaudin, a souvent semblé en décalage et hésitante face aux responsabilités qui pesaient sur ses épaules en pleine crise sanitaire et sociale dans l'une des villes les plus pauvres de France. A la mi-octobre, Le Monde avait publié une enquête revenant sur les débuts difficiles de la maire, qui, plus de trois mois après son élection, n’avait toujours pas investi de bureau au sein de la mairie.

A son retour de convalescence, l'élue aurait confié, selon le quotidien, à François Lamy, ancien ministre socialiste de la ville : "Tu es au courant que je ne reste que trois mois ?" Michèle Rubirola avait tenté de couper court à toute rumeur de démission à cette époque en affirmant dans une interview à Libération sa volonté de rester en poste. Mais l'élue avait tout de même précisé : "Carpe diem": "Je suis ici et j'y reste", mais "on ne sait pas ce qui va arriver comme la maladie".

Le poste de maire de Marseille donne également une lourde charge à celui qui porte l'écharpe tricolore dans la ville. Celle-ci a été laissée dans un état catastrophique par la précédente mandature. La chambre régionale des comptes avait livré un rapport sur la gestion de la ville de Marseille quatre mois avant l'élection. Charges de personnels, gestion des écoles, logements et finances de la ville, la gestion de la cité phocéenne était fortement mise en cause. 

"Nous avons découvert l’état dans lequel notre ville a été laissée. Nos capacités d’investissement sont atrophiées, nos ressources exsangues, notre patrimoine est dégradé", a indiqué Michèle Rubirola lors de la conférence de presse.

• Parce que Benoît Payan était omniprésent

Il était déjà un maire "bis" et le voilà promu par la maire démissionnaire. Michèle Rubirola a expliqué mardi qu'elle souhaitait que le socialiste Benoît Payan soit son successeur. Omniprésent dans les médias et sur la scène politique locale, il a assuré plusieurs fois l'intérim notamment lors de l'intervention chirurgicale de l'ex-maire et sa convalescence. L'initiateur du Printemps marseillais, qui avait choisi de se ranger derrière l'élue, a notamment mené la fronde contre le gouvernement, lorsque ce dernier a imposé la fermeture des bars et restaurants dans la cité phocéenne, sans concertation préalable avec les élus locaux.

Depuis son début de son mandat, Michèle Rubirola ne cesse de vanter leur complémentarité et les qualités de son adjoint issu des rangs du PS. "Benoît et moi, c’est un peu le yin et le yang. Il est très politique, moi je n’apprécie pas la tambouille électorale", avait indiqué l'ex-maire de Marseille en octobre dans une interview au Monde. Ce mardi, elle en a remis une couche en conférence de presse : "C'est de lui dont Marseille a besoin aujourd'hui."

Une attitude suspecte aux yeux de l'opposition marseillaise. "Les raisons [de santé] affichées me semblent légitimes, mais depuis longtemps maintenant à Marseille, avant même l'élection municipale, bruissait déjà la rumeur qui disait qu'un accord avait été scellé entre le premier adjoint, Benoît Payan, et la maire de Marseille pour qu'elle lui cède son poste au bout de quelques mois", a expliqué à franceinfo le député LREM de la 7e circonscription des Bouches-du-Rhone Saïd Ahamada. 

Une analyse partagée par Renaud Muselier. "Je l'ai vue hier [Michèle Rubirola], lors de l'intronisation de la préfète de police, tout semblait à peu près normal, a expliqué à franceinfo le président LR de la région Paca. Donc ils mijotent le coup depuis un moment." Selon lui, Michèle Rubirola "est la première victime du Printemps marseillais. Elle a été dévorée par cette majorité qu'elle n'arrive pas à piloter". Renaud Muselier a également dénoncé "un délabrement des pires manipulations politiques dans la deuxième ville de France".

Benoît Payan "ne savait pas que Michèle Rubirola démissionnerait quelques mois après avoir été élue maire de Marseille", a affirmé de son côté le premier secrétaire du parti socialiste Olivier Faure.

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