Le président Jérôme Durain et le rapporteur Etienne Blanc sont revenus sur le "recadrage" des magistrats marseillais par le garde des Sceaux, après leurs déclarations en audition de la commission d'enquête sur le narcotrafic.
Le "recadrage" ne passe toujours pas. Présentant les conclusions de la commission d'enquête sur le narcotrafic mardi 14 mai, le président Jérôme Durain et le rapporteur Etienne Blanc en ont profité pour réitérer leur position sur les invectives d'Eric Dupond-Moretti à l'encontre des magistrats marseillais fin mars.
"Choqués" par les propos du garde des Sceaux
"La commission regrette les suites données à la libération des paroles des magistrats à Marseille notamment", ont-ils déclaré. Pointant "les moyens restreints" des parlementaires, et la possibilité d'investiguer via les commissions d'enquête, ils ont affirmé avoir été "interpellés" et "choqués" par les "convocations" de magistrats pour avoir "parlé" dans ce cadre protégé. "Nous l’avons exprimé publiquement au gouvernement, de manière explicite, nous ne tolérons pas la pression sur notre travail par le garde des Sceaux."
Communiqué du Conseil supérieur de la magistrature : déclarations de magistrats du tribunal judiciaire de Marseille devant une commission d'enquête sénatoriale pic.twitter.com/oihb5uBxvs
— Conseil magistrature (@CSMagistrature) April 10, 2024
En déplacement à Marseille pour une opération place nette XXL en mars, le ministre de la Justice avait opéré un recadrage en préambule de son échange d'1h20 avec les magistrats marseillais. Sa colère était "visible" selon certains témoins. "Par vos propos vous avez fait le jeu de l'extrême droite", leur avait lancé Éric Dupond-Moretti, ou encore "Que vais-je dire aux Français ? Qu'on a augmenté vos moyens de 60%, pour rien ?". Une intervention qui avait fait réagir le Conseil supérieur de la magistrature, estimant dans un communiqué du 10 avril que ce recadrage était "de nature à porter atteinte" à la séparation des pouvoirs.
Marseille "gangrenée" par le trafic de drogues
Entendus le 5 mars par la commission d'enquête sur le narcotrafic, Nicolas Bessone, procureur de la République, Olivier Leurent, président du tribunal judiciaire, Isabelle Couderc, vice‑présidente chargée de la coordination à la "JIRS Criminalité organisée" de Marseille et Isabelle Fort, procureure adjointe de la République responsable du service "JIRS Criminalité organisée" au parquet, avait sonné l'alarme sur le narcotrafic à Marseille.
"Marseille est gangrenée comme aucune autre ville par le trafic de drogues", avait asséné Isablle Couderc, estimant que la ville était en train de "perdre la bataille". L'ensemble des magistrats avait souligné le manque de moyens de la justice notamment à Marseille face à des réseaux dont les dirigeants sont dans une "grande aisance financière", et qui poursuivent leurs opérations illicites en prison.