Procès des effondrements de la rue d'Aubagne : "on veut que tout le monde sache", "ça dépasse Marseille"

Six ans après la mort de huit personnes dans l’effondrement de deux immeubles rue d’Aubagne, à Marseille, s’est ouvert ce jeudi 7 novembre le procès tant attendu de l’habitat indigne. Une audience qui doit durer six semaines, et dont l’écho dépasse largement les murs du tribunal judiciaire de Marseille.

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Le silence des uns, le cri des autres. Ce jeudi 7 novembre était une date très attendue, à Marseille. Six ans (et deux jours) après les effondrements des immeubles au 63, et 65 rue d’Aubagne ayant entraîné la mort de huit personnes, le procès s’est ouvert ce matin à la Caserne du Muy. Un procès hors normes, symbole des désastres de l’habitat indigne. Une audience de six semaines qui doit établir les responsabilités des uns, et des autres, qui ont mené au drame du 5 novembre 2018.

Un collier rouge pour ne pas parler à la presse

Les parties civiles, 87 constituées à ce jour, sont arrivées au goutte-à-goutte, discrètes, à partir de 9h30. La matinée était consacrée à l’enregistrement de ces parties civiles, dans une petite salle à l’arrière de la grande, dite "PHN", procès hors normes. Pour les accueillir et les guider, des personnes en chasubles bleues. Ce sont les membres de l’association d’aide aux victimes, Avad. Des juristes et psychologues qui seront présents pendant toute la durée du procès.

Cet enregistrement des parties civiles est également le moment de choisir, ou non, de porter un collier rouge. Un code transmis à la presse pour les interviews. Les personnes portant ce collier ne souhaitent pas s’exprimer devant les médias. Une centaine de journalistes sont accrédités pour ce procès historique. Une quarantaine de médias vont couvrir l'audience pendant un mois et demi.

"On veut que tout le monde sache"

Si de nombreuses parties civiles sont apparues avec le collier rouge autour du cou, d’autres ont fait le choix inverse. C’est le cas d’Imane Said Hassani, dont la mère Ouloume est morte dans les effondrements. C’est aussi le cas de Julie, jeune maman dont l’immeuble jouxtait le 65 et a été démoli par précaution par les pompiers le jour du drame. "C’est important. On ne se sent pas écoutés depuis six ans. On veut que tout le monde sache". Linda Larbi, cousine de Chérif Zemar, se sent également "prête" pour parler et répond sans hésiter aux nombreuses sollicitations des journalistes.

Un procès restitué aux Marseillais

Pas de collier rouge, mais un ruban vert, s’est répandu ce jeudi 7 novembre aux abords du tribunal judiciaire de Marseille. Porté par les membres du collectif du 5 novembre et par les personnes mobilisées en solidarité aux victimes de l’habitat indigne, ce ruban n’était pas le signe du silence, mais bien celui d’un cri du cœur.

"C’est à la fois pour dire aux familles qu'on les soutient et à la fois aussi pour témoigner aux juges, que leur rôle est extrêmement important", a expliqué Kevin Vacher, membre du collectif. Que les jugent puissent voir concrètement que les Marseillaises et les Marseillais sont à l'intérieur et à l'extérieur du tribunal en train d'attendre leurs décisions de justice".

 

Les juges ont un grand rôle dans l'histoire du mal logement à Marseille, mais ça dépasse Marseille, ça devient national.

Kevin Vacher, collectif du 5 novembre

France 3 Provence-Alpes

Le collectif a pris la parole aux alentours de 13h, soit une heure avant le début de l’audience, devant les grilles de la caserne du Muy. Kevin Vacher a détaillé les différents outils de restitution de ce procès à l’ensemble de la population marseillaise, mais également à tous ceux concernés en France. "C’est important pour nous que ce procès soit public". Le collectif a annoncé publier chaque semaine une chronique dans les colonnes de La Marseillaise.

Le collectif a également tenu à remercier le club de supporters de l'OM MTP (Marseille trop puissant). Kevin Vacher a en effet annoncé qu’ils allaient déployer "une grande banderole de soutien aux familles des victimes" lors de la rencontre de Ligue 1 entre Marseille et Auxerre, vendredi soir au stade Vélodrome. "On les remercie pour ce geste", a-t-il glissé. Une autre banderole a déjà été installée sur le cours Lieutaud, dans le centre-ville de Marseille. Une médiatisation XXL, dans les rues et dans le stade emblématique de la ville. Sur toutes les télévisions branchées sur le match au deuxième jour du procès.

Les maux des Marseillais criés au porte-voix

Puis soudainement, entre les voix et les caméras, un son. Celui d’un violon. La musique s’impose alors, puis s’arrête. Une voix sort de la foule. Le cri d’un homme au ruban vert dans un porte-voix de fortune. "Les larmes coulent toujours. Combien sommes-nous aujourd’hui encore dans nos immeubles en péril ?". Ces mots sont ceux de "Françoise, des quartiers de Noailles et de La Plaine". D’autres "crieureuses", comme ils se dénomment eux-mêmes, prennent la parole, éparpillés dans la foule de journalistes. Tour à tour, ils lisent tous des messages de Marseillais, transmis au collectif en solidarité avec les victimes.

On a tellement eu mal à notre ville. Ni oubli, ni pardon.

Emilie de la rue des 3 frères Barthelemy

France 3 Provence-Alpes

Les crieurs de rue, de Noailles, du 5 novembre, ont poursuivi pendant un petit quart d'heure. Des dizaines de messages ont été lus, déclamés, criés. Et ponctués par les improvisations de la violoniste Mélanie Arnal. Du bruit, celui du soutien, à quelques minutes du procès du fléau du mal logement.

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