Avec l'ouverture du salon de l'automobile à Paris, les véhicules dit "propres" ont le vent en poupe. Voitures hybrides, électriques, à hydrogène, etc... Toutes les marques rivalisent avec leurs nouveaux modèles. Mais ces véhicules qui polluent moins en roulant sont-ils aussi propres à la fabrication et au recyclage?
Avec la pénurie de carburant, de plus en plus d'automobilistes se posent la question de l'investissement dans un véhicule électrique. Avant de sauter le pas, des questions se posent...
Hormis le coût d'achat d'une voiture électrique qui n'est pas à la portée de tous les foyers, même avec les aides de l'Etat; la longévité des batteries, le type de véhicule, l'usage que l'on peut en faire, l'autonomie, la façon de recharger sont autant de paramètres à prendre en compte .
Le 24 juin, le Parlement Européen a adopté la nouvelle "Loi européenne sur le climat", qui porte l'objectif actuel de réduction des émissions de CO2 à l'horizon 2030 de 40 % à 55 % et rend obligatoire la neutralité carbone d'ici à 2050.
C'est pour atteindre cet objectif que les constructeurs automobiles investissent dans la fabrication de véhicules électriques et que l'Etat de façon incitative apporte des aides à l'achat et à la reconversion.
Mais le changement d'habitudes ne se fait pas aussi rapidement qu'espéré.
Une lente conversion
Le parc automobile en France est estimé à 40 millions de véhicules dont 620 000 véhicules électriques, soit à peine 1,5% du parc roulant.
Un rapport de l'ADEME (agence de la transition écologique) publié en octobre 2022, fait le point sur l'électrification massive des véhicules.
"Il s’est vendu près de 174 000 véhicules légers 100% électriques en 2021 contre 28 300 en 2016, soit une multiplication des ventes par plus de 6 en 5 ans, représentant aujourd’hui une part de marché de près de 12%", indique ce rapport.
En PACA, par exemple la tendance est respectée. Les voitures essence et gazole sont encore très largement majoritaires comme le montre ce graphique :
Ce rapport de l'ADEME pointe un bémol de taille : "La batterie est un composant dont le poids, le prix et l’impact carbone de production augmentent avec la capacité de stockage : c’est ce qui explique notamment les écarts de masse et de prix de vente entre véhicules électriques et thermiques. C’est également ce qui conduit à un impact carbone supérieur de la fabrication d’un véhicule électrique, comparé à un équivalent thermique" .
En résumé, le véhicule électrique endosse une dette de CO2, liée à sa fabrication, deux fois supérieure à ses homologues thermiques du fait de la production de sa batterie et de sa motorisation.
Autre aspect à prendre en compte, comment est produite l'électricité qui sert à recharger les véhicules électriques.
D'où vient l'électricité des bornes de recharges?
En France, la production d'électricité vient en grande partie des centrales nucléaires. A noter que l'énergie nucléaire, même si elle est considérée comme une énergie propre car elle n'émet pas de gaz polluants, n'est pas une énergie renouvelable et produit des déchets dangereux et polluants.
Dans certaines communes françaises cependant la transition écologique passe par des bornes électriques alimentées par des panneaux solaires.
C'est d'ailleurs une des préconisations de l'ADEME, " Pour soulager le réseau électrique dans les zones urbaines et péri-urbaines, le déploiement de bornes associées à une production photovoltaïque (ombrière par exemple) est une solution à privilégier pour réduire l'impact réseau, le coût de recharge à terme, limiter l'artificialisation des sols liée au développement des énergies renouvelables et donner du sens à leur développement".
La façon dont est produite l'énergie électrique, aussi bien pour la fabrication que pour l'utilisation du véhicule, est donc un élément clé lors qu'il s'agit de déterminer les vertus de ce type de voiture.
Les matières premières en question
La production électrique n'est pas le seul point faible des véhicules dit "propres". De façon éthique et environnementale, on peut se poser la question de l’exploitation des matériaux nécessaires à la production de ces batteries "lithium ion" comme le cobalt ou le nickel.
Selon les constructeurs, les batteries Li-ion sont recyclables jusqu’à 90%. Mais "actuellement moins de 5% des batteries Li-ion en fin de vie le sont", détaille Carbone 4, le cabinet de conseil français dédié à l’énergie.
Pour le moment, les véhicules électriques sont assez jeunes sur le marché et les filières industrielles de recyclage semblent peu nombreuses. La demande va probablement être croissante au fur et à mesure des besoins de recyclage.
Selon l'ADEME, "les capacités de recyclage dans l'industrie française devraient doubler d'ici à 2027".
Solution alternative si petit gabarit
Le rapport est formel, la voiture électrique est bénéfique sur le climat et l'environnement que si elle est de petite taille.
"Actuellement, l’offre industrielle de véhicules électriques répond aux besoins du quotidien mais ne répond pas de manière satisfaisante aux besoins de grands déplacements. Pour répondre aux besoins de forte autonomie, la technologie des hybrides rechargeables peut être pertinente de manière transitoire, sous réserve que tous les trajets inférieurs à l'autonomie électrique du véhicule soient effectivement réalisés en mode "électrique pur".
Pour l’ADEME, l’enjeu est donc de favoriser l’émergence d’une offre de véhicules électriques plus petits, plus sobres et plus abordables, adaptés aux déplacements du quotidien.
"Sur l'ensemble de sa durée de vie, une voiture électrique roulant en France, a un impact carbone 2 à 3 fois inférieur à celui d'un modèle similaire thermique, à condition que sa batterie soit de capacité raisonnable (< 60kWh1). Avec une batterie de taille supérieure, l’intérêt environnemental n’est pas garanti étant donné la variabilité des consommations liées à la masse du véhicule et à ses conditions d’utilisation".
L'avis de l'ADEME est positif car "le déploiement du véhicule électrique est globalement cohérent avec l’objectif de limitation des impacts sanitaires liés à l’usage de l’automobile et la mise en place des ZFE : le véhicule électrique n’émet, par définition, aucun polluant d’échappement (dont les oxydes d’azote NOx qui sont encore problématiques dans plusieurs métropoles Françaises). Le véhicule électrique
présente également l’avantage d’être silencieux à basse vitesse réduisant ainsi une des principales nuisances urbaines".
Mais le poids de la voiture électrique joue en sa défaveur selon L'ADEME.
"Le véhicule électrique a pour lui l’avantage du freinage régénératif (qui peut réduire sensiblement l’usure des plaquettes de freins), mais il est généralement plus lourd que son équivalent thermique, ce qui augmente l’abrasion des pneus, qui serait responsable, tout véhicule confondu, de 28% des microparticules déversées dans l’océan chaque année (IUCN 2017):l’électrification des automobiles n’en supprime donc pas toutes les nuisances" .
D'autres alternatives pour les courts trajets urbains
L'utilisation de la voiture électrique semble tout indiqué pour de courts trajets et plutôt urbains, alors la question se pose de l'utilité.
N'est-il pas possible dans ce cas là de préférer les transports en commun? La marche à pieds ou encore le vélo?
C'est ce que souligne un rapport de l'Agence européenne pour l’environnement " le coût de fonctionnement d’un véhicule électrique est largement inférieur à celui d’un véhicule thermique" et en raison du prix d'achat élevé "leurs possesseurs peuvent être tentés de davantage les utiliser pour amortir cet investissement" et aussi en raison des « incitations des collectivités locales à la voiture électrique" comme la gratuité des parkings, l'abonnement résident moins cher, etc...