Devant la télévision, dans un vol long-courrier, de retour chez leurs parents : un an après l'annonce du premier confinement, les lecteurs de France 3 se souviennent d'une soirée qui a bouleversé le cours de leur année 2020.
Il est 20h le lundi 16 mars, et 35,3 millions de téléspectateurs attendent l'allocution d'Emmanuel Macron devant leur écran. Deux jours plus tôt, les bars, les restaurants et tous les lieux accueillant du public ont précipitamment fermé leurs portes à minuit, et il se murmure depuis plusieurs jours que la France va basculer dans un confinement strict pour stopper la flambée de l'épidémie de Covid-19.
A ce moment-là, 48 personnes sont décédées en France, et la vague de patients commence à déferler sur les hôpitaux. De l'autre côté de la frontière, l'Italie est déjà confinée depuis deux semaines, et l'Espagne vient d'annoncer la mise à l'isolement quasi-total du pays.
Sandra, qui est hôtesse de caisse à Maillane, dans les Alpilles, pressent que les semaines à venir vont être difficiles.
Ruée dans les supermarchés
"En travaillant dans la grande distribution, je me suis dit qu'on allait sûrement passer des journées terribles. Et je ne me suis pas trompée : le lundi 16 mars 2020 a été le pire jour de travail de ma vie", se rappelle-t-elle.
Car déjà, les Français se ruent par dizaines dans les supermarchés, afin de faire des provisions de produits de première nécessité.
Le lundi 16 mars 2020 a été le pire jour de travail de ma vie
Inquiets à l'idée de passer plusieurs semaines seuls dans leur studio, de nombreux étudiants sont déjà rentrés chez leurs parents. C'est le cas d'Océane, qui a quitté Paris pour retourner à Nantes le 16 au matin.
"L'annonce n'était pas encore tombée, mais tout le monde sentait que ça allait arriver. Mon école avait fermé le 14 mars, et le 15, j'ai senti que l'atmosphère devenait fébrile. Tout le monde était dehors à Paris, comme si les gens savaient que quelque chose allait changer", raconte-t-elle.
Tout le monde était dehors à Paris, comme si les gens savaient que quelque chose allait changer.
"Nous sommes en guerre"
A 20h, finalement, Emmanuel Macron prend la parole. Après plusieurs semaines d'incertitude et de confusion à propos de la stratégie à adopter, le chef de l'Etat annonce d'un ton martial l'instauration d'un couvre-feu sur l'ensemble du territoire pendant 15 jours au moins, avec une formule qui marquera les esprits : "Nous sommes en guerre".
La majorité des Français apprend la nouvelle en direct, à la télévision. "Je m’y attendais, à vrai dire, reconnaît Sabrina, 33 ans, mais ça semblait tout droit sorti d’un film de science-fiction". Malgré la sidération, elle tente d'expliquer à sa fille de 12 ans à quoi vont ressembler les jours à venir.
Ça semblait tout droit sorti d’un film de science-fiction
Il faut dire que les mesures annoncées sont totalement inédites : interdiction des déplacements non-essentiels, recours massif au télétravail, fermeture des écoles et chômage partiel au sein des entreprises qui vont subir la crise de plein fouet.
Sophie, directrice d'hôpital dans le Val-de-Marne, s'inquiète tout de suite pour ses équipes qui s'apprêtent à vivre des semaines difficiles : "Comment allons-nous faire avec le personnel de l'hôpital si les écoles sont fermées ?". Elle mobilise une cellule de crise, et s'alarme face au manque de protections disponibles pour ceux qui se trouvent déjà en première ligne face à l'épidémie.
Entre sidération et précipitation
Certains se préparent à rester enfermés chez d'eux, d'autres font leurs valises dans la précipitation pour partir loin de la ville. "J'ai décidé de quitter mon appartement pour me confiner à la campagne, et j'ai dû préparer mes valises dans les minutes qui ont suivi l'annonce. Ça m'a fait peur, car je ne savais pas pour combien de temps ça allait durer", se souvient Guillaume, étudiant à Albi dans le Tarn.
J'ai dû préparer mes valises dans les minutes qui ont suivi l'annonce
Chantal, qui vit à Saint-Chaffrey dans les Hautes-Alpes, est dans un vol long-courrier qui la ramène en France. A ce moment-là, de nombreux pays sont en train de fermer leur espace aérien.
La retraitée de 66 ans se rappelle des couloirs vides à l'aéroport Roissy Charles-de-Gaulle, qu'elle a traversé avant d'être placée en quarantaine par mesure de précaution. Le lendemain, à partir de midi, la France entière s’arrête pour la première fois.
Les jours qui suivent cette allocution sont "surréalistes", décrit Florian, lycéen de 15 ans à Angers. "L'annonce de la fermeture des écoles m'a bouleversé. Je me souviens aussi des rues vides que l'on voyait à la télévision, de Paris silencieuse, et des applaudissements le soir à 20h : c'était quelque chose de fort émotionnellement".
L'annonce de la fermeture des écoles m'a bouleversé.
La suite, tout le monde la connaît : le confinement est finalement prolongé jusqu'au 11 mai, et la France est mise sous cloche pendant près de deux mois. Une parenthèse jusque-là inédite dans l'histoire du pays, qui sera vécue de manière radicalement différente par les 67 millions de Français.
"Enfin, le monde devait s'arrêter et je pouvais reprendre mon souffle. J'allais enfin pouvoir prendre le temps de faire des choses pour moi" se souvient Julie, secrétaire d'éducation à Marseille. Avant de nuancer, un an après le début de l'épidémie : "A ce moment-là, je n'avais pas encore réalisé que ça n'allait pas être si facile que ça...".
Soignants, commerçants, employés de supermarché, artistes, élus ou encore parents : nous les avions rencontrés il y a un an. Aujourd’hui ils nous racontent leur année Covid.
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