Retour sur la terrible épidémie de peste survenue en région Provence Alpes Côte d'Azur en 1720

Selon les manuscrits, la région Provence Alpes Côte d'Azur a connu les pires épidémies. Après la terrible peste noire vers 1300, c’est un bateau qui va marquer l'histoire et donner une nouvelle dimension à la contamination dans notre région. C'était en 1720.

"Sans hier, aujourd'hui n'est rien" écrivait Pierre-Jakez Hélias. En matière d'épidémies en  région Provence Alpes et Côte d'Azur non plus ! Retour sur les grands pages de l'histoire sanitaire de la région.
 

A commencer par l'arrivée de la peste...

► Mai 1720

Michel Goury, archéologue et historien "le navire n'avait pas à bord que sa riche cargaison..."

Le navire de type flute "Le Grand-Saint-Antoine" accoste près de Marseille pour ramener une cargaison d'étoffes destinées au marché de Beaucaire.
Malheureusement, l'équipage va ramener aussi la peste.

"Le capitaine savait qu'il avait la peste à son bord" précise l'historien. "Mais il savait qu'il fallait sauver le stock"... Les documents sanitaires ont ainsi été falsifiés.

 Le bacille va se propager très vite dans la ville, puis dans toute la Provence. Ceux qui le peuvent fuient la cité et vont se réfugier dans les campagnes.

"Ils vont se réfugier dans les campagnes, les riches dans leurs bastides, les autres dans des quartiers isolés...

certains allant se terrer dans des grottes, à proximité des calanques, voire dans des barques" - Gabriel Chakra journaliste et historien marseillais.

Dans le Vaucluse, on s'inquiète terriblement de la propagation et de l'exode, que des centaines d'hommes et de femmes vont construire un "mur de la peste" en pierres sèches sur plus de 20 km pour séparer le nord, la zone saine, du sud, la zone infectée.
Dans le prolongement de l’ancien château médiéval, entièrement reconstruit à la fin du XVIème siècle suite au massacre des Vaudois on trouve le "mur de la peste "à Cabrières d'Avignon :Pendant ce temps, Toulon et le département du Var sont durement touchés.

120 000 morts en PACA

Les cadavres jonchent les rues du port comme à Marseille.

"La peste est de loin la maladie qui tue le plus, le plus rapidement et en plus grande quantité..." Michel Signoli Archéo-anthropologue à l'Université Aix-Marseille.

Des historiens évaluent à 120 000 le nombre de morts dans toute notre région.
Les polémiques existent déjà sur les traitements. Certains préconisent de prendre de la poudre de crapaud ou bien de s'enduire le corps d'huile, d'autres inventent les premiers masques en imbibant chiffon de vinaigre en le plaçant devant la bouche.
Les médecins eux ont un costume surréaliste : un manteau, des gants mais surtout un masque en forme de tête d'oiseau avec dans le bec, des herbes du thym, du clou de girofle, du camphre, pour filtrer l'air potentiellement infecté.Dans toutes les épidémies il y a souvent des héros.

Pour Gabriel Chakra; "à Marseille, c'est Monseigneur de Belsunce, évêque de l’époque, qui marquera les esprits par son engagement, son courage."

Une statue de Monseigneur de Belsunce est érigée sur le Parvis de la Major à Marseille :
Il va s'occuper sans cesse des malades, les réconforter, les soigner, sans attraper lui-même la maladie. Il va générer l'admiration de toute une génération.

Vagues successives de choléra dans les années 1800

 
 ► Dans les années 1830 et surtout en 1884 et 85 la région est à nouveau frappée par une terrible maladie.
Cette fois, c'est la bactérie du choléra.
Et c'est à  nouveau par la mer, par la Méditerranée que la plus forte épidémie arrive à bord d'un bateau à Toulon. Les mêmes scènes que pour la peste se reproduisent. La maladie est surtout transmise par les déjections, les caniveaux. La première Niçoise a être infectée est une dame qui se baigne en bas du Mont-Boron. La bactérie stagnait dans l'eau de la plage.

La peur s'empare de toute la Provence et la Côte d'Azur.

On commence à mettre en place des systèmes de confinement appelés "des lazarets", en référence à Saint Lazare protecteur de la lèpre - Yvan Gastaut, historien à Nice.

La population y est mise en quarantaine quand elle est suspectée. On en trouve un certain nombre en Provence et aussi  à Menton ou à Nice au Port.

La Tour des Catalans à Marseille, un ancien lazaret :
 ► En 1884 le maire de Nice s'appelle Alfred Borriglione. Il décide de préserver la ville à l'ouest en repoussant les gens qui tentent de rentrer en franchissant les rives du Var. En 1835 déjà lors d'une précédente épidémie le pont du Var à Saint Laurent du Var avait aussi été fermé.

A l'est, même isolement et confinement géographique avec la frontière italienne. La surveillance est renforcée au niveau du passage des cols dans les vallées.

Pour la prévention et les traitements, les pharmaciens et les médecins décident de désinfecter les pièces ou les lieux publics comme la gare de Nice de Toulon de Marseille avec ce qu'on appelle des fumigations.

Brûlage d'herbes, du foin ou thym et on purifie les lieux aussi avec du liquide phénol... Certains habitants écrivent que :


De Marseille à Menton en passant par Draguignan et Cannes l'odeur du phénol empeste toute la région..."


Le bilan des "années choléra" sera terrible lui aussi et s’évaluera en milliers de morts.

Coup de projecteur sur la grippe espagnole

Contagion, létalité... La grippe espagnole a beaucoup de points communs avec le Covid-19.La région PACA toujours marquée par les pandémies et encore plus, dès le début du 20e siècle.
En premier lieu avec la première guerre mondiale et dès 1916 un médecin marseillais que personne n'écoute.

Le Docteur Carnot repère chez certains soldats, les premiers signes d'une "grippe bizarre" qui s'attaque particulièrement aux poumons. Personne n'y prend vraiment garde, car le conflit avec les Allemands fait rage.
Il faudra attendre les années 1917 et 1918 pour voir la pandémie exploser dans le monde.
Les soldats américains ont débarqué en France et amènent avec eux une grippe terrible. Elle prendra le nom de "grippe espagnole" quand le roi d'Espagne de l'époque sera lui aussi touché par la maladie.
 En 1918, le roi d’Espagne Alfonso XIII tombe malade, grippé comme beaucoup d’Espagnols. La presse n’est pas censurée en Espagne alors qu’elle l’est chez les belligérants.
C’est donc par les journalistes espagnols que le monde comprend alors qu’une épidémie est née, que la postérité retiendra sous le nom de "grippe espagnole".

Les soldats meurent parfois en revenant du front. A Nice et Marseille, les hôtels où vivent des familles entassées après avoir fui le front du conflit sont les foyers infectieux les plus importants.

Dans les archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence on retrouve la désolation du préfet et des notables, qui expliquent que des soldats meurent de la grippe et que l'orphelinat de Digne-les-Bains est totalement infecté : 140 enfants, 140 malades. 4 sont déjà morts.

La grippe avec une souche H1-N1 fera des millions de morts (30 à 50 millions selon les estimations) c'est la plus grande pandémie de tous les temps dans le monde.

Plus de 200 000 personnes périront en France selon certaines estimations.


Le Marseillais Edmond Rostand perdra la vie à cause du virus en décembre 1918.

Le virus disparait en 1919 avant de laisser la place dans les années 50-60 à la grippe asiatique qui tuera elle aussi.
 
 
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