Rentrée scolaire du 11 mai : "Celui qui pense respecter le protocole sanitaire n'a jamais eu d'enfant", parole d'Atsem

À Marseille, "tout est prêt" pour la rentrée scolaire, affirme Jean-Claude Gaudin. Ce n'est pas l'avis de la plupart des Atsem et des enseignants. Les agents territoriaux, "éternels oubliés", dénoncent des difficultés impossibles à résoudre.

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"Tout est prêt" à Marseille pour la rentrée scolaire après le 11 mai, a assuré lundi le maire LR, Jean-Claude Gaudin, affirmant que la cité phocéenne était la ville "la plus testée" de France face au coronavirus.

Le maire, dont la municipalité a été régulièrement critiquée pour le mauvais état des écoles de la ville, indique dans une vidéo sur Twitter avoir mobilisé "depuis plusieurs semaines", "l'ensemble" des services de la ville et le bataillon de marins-pompiers, "afin de garantir les meilleures conditions de sécurité sanitaires possibles pour les enfants, les personnels municipaux et les enseignants".

"La désinfection quotidienne de tous nos locaux scolaires et leur approvisionnement en produits d'hygiène, l'élargissement des plages d'accueil le matin et des temps de cantines, les marquages au sol de distanciation physique, le dépistage systématique des agents municipaux et leur dotation en masques, thermomètres et autres équipements de protection: tout est prêt", énumère-t-il à une semaine du début théorique des opérations de déconfinement en France.

Les Atsem, éternels oubliés

Lundi, le ministère de l'Education nationale a publié un protocole sanitaire et organisationnel de 54 pages, un guide destiné à la réouverture et au fonctionnement des écoles maternelles et primaires, à partir du 11 mai prochain.

"À aucun moment, dans ce protocole, le mot "Atsem" est cité, comme si on n'existait pas", s'insurge Samia Harizi, Atsem (agent territorial spécialisé des écoles maternelles) à Marseille, déléguée syndicale CGT et fondatrice d'Atsem de France.

"Lorsque le maire de Marseille a dit que toutes les écoles allaient être désinfectées, nous pensions que ce travail serait fait par des entreprises privées, mais non, c'est nous qui le faisons avec les Asic (Agents de surveillance inter-classe)", ajoute Samia Harizi, très en colère.

Sans compter que le matériel de protection individuel ferait défaut : "A part les masques, nous n'avons pas de charlotte, pas de sur-blouse, pas de gel. Pour les produits d'hygiène, on a pour consigne de finir les anciens produits et pour les nouveaux, on n'a eu aucune formation, on doit vérifier nous-mêmes sur les étiquettes, comment les utiliser et les mélanger".

Des difficultés sans fin

Selon la déléguée syndicale, entre les gardes d'enfants, les personnes à risque et autres arrêts maladies, moins d'un quart des Atsem seront sur le terrain, lundi prochain, pour un travail "multiplié par dix".

"Notre rôle est d'aider les enseignants dans les apprentissages, en classe et en dehors. C'est nous qui apprenons aux enfants à se laver les mains, à se moucher, à manger avec une fourchette. A partir de lundi, on va passer dix heures par jour avec un chiffon à la main et passer notre temps à tout nettoyer".

Samia Harizi énumère une liste sans fin des difficultés impossibles à résoudre, comme par exemple le moment du repas : "Si vous avez trente enfants et que vous ne pouvez en mettre que dix à la cantine en même temps, ça veut dire qu'il faut faire trois services, donc deux heures de cantine. Et pendant ce temps, que faites-vous des enfants dans la cour, sachant qu'ils ne peuvent pas jouer aux jeux collectifs, ni se rapprocher ?", explique-t-elle. 

"C'est absurde cette rentrée, pire, pour moi, c'est de la maltraitance", conclut l'Atsem.

L'impossible respect de la distanciation

"Selon moi, celui qui imagine que l'on va faire respecter la distanciation à des enfants de maternelle et de primaire, c'est qu'il n'a jamais eu d'enfant", assume Audrey Jean, administratrice du collectif indépendant des ATSEM de France.

"On galère pour maintenir les enfants assis pendant un quart d'heure devant une feuille de papier, ils ne resteront jamais assis toute une journée. C'est du confinement, mais à l'école...", poursuit-elle.

"On va surveiller chaque enfant qui touche un objet pour nettoyer derrière lui, c'est impossible. Et encore, si on n'est pas cantonné dans les toilettes pour les lavages de mains et le reste", explique-t-elle.

"Si on nous appelle les "tatas", c'est parce qu'on est un repère affectif pour les enfants. Ça va être traumatisant pour eux cette rentrée. Comment on va refuser un câlin à un enfant, sous prétexte de respect de la distanciation ?", conclut-elle.

Une rentrée si et seulement si...

Les enseignants se disent "pressés" de retrouver leurs élèves, mais pas à n'importe quel prix. "Nous travaillons à la reprise des cours", indique Virginie Akliouat, secrétaire académique du Snuipp. Elle énumère les dispositifs : un mètre entre chaque table, quatre m2 d'espace par enfant, une rentrée échelonnée le matin, entre 8h20 et 9h, un sens de circulation dans l'établissement, etc.

"Nous prévoyons une scolarisation à mi-temps, mais on ne sait pas combien d'enfants seront présents, ni combien d'enseignants, ni combien d'Atsem", explique-t-elle.

"En fonction des écoles, plusieurs situations sont envisagées, répartir les enfants en fonction du nombre de profs, couper la semaine en deux, certains enseignants feront les cours en présentiel, d'autres les cours en ligne", poursuit Virginie Akliouat, "mais le point de départ, c'est le respect du protocole sanitaire".

"Nous demandons à tous les enseignants, dans chaque établissement, de ne permettre la réouverture des classes que si le protocole sanitaire est respecté", insiste la déléguée syndicale, "et pour le moment, ce n'est pas le cas". Elle précise qu'il ne s'agit pas d'un droit de retrait, mais du respect des consignes édictées par le ministère de l'Education nationale.

Dans les Bouches-du-Rhône et d'autres départements de la région, certains maires se sont déjà prononcés contre la réouverture des écoles, lundi prochain.

À Marseille, Jean-Claude Gaudin a indiqué que 33.000 élèves sur les 78.000 avaient l'intention de reprendre les cours et que toutes les écoles seraient prêtes à les accueillir.
 
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