Les Alpes-Maritimes et le Var font partie des départements les plus boisés de France, comme le révèle l'IGN dans un rapport publié en octobre 2022 et mis en avant à l'occasion de la journée internationale des forêts, mardi 21 mars. Diversité des groupes d'arbre, volume de bois produit, taux de mortalité des arbres, exploitation... Voici les derniers chiffres à propos de ces deux départements et plus largement de la région.
Petite devinette : quel est le département de Provence-Alpes-Côte d'Azur le plus boisé de France ? La réponse n'est pas aussi évidente qu'elle n'y parait.
Derrière la Corse du Sud et ses 70 %, suivent les Alpes-Maritimes (65 %) et le Var (64 %). C'est plus que la moyenne de la région (52 %) et plus de deux fois plus que la moyenne du pays (31 %), selon les résultats récents de l'inventaire forestier réalisé par l'IGN (l'Institut national de l'information géographique et forestière) sur la période 2017-2021. "Des peuplements influencés par la Méditerranée et les Alpes", selon Nathalie Derrière, chef du département des résultats d'inventaire forestier à l'IGN.
Et la part forestière ne cesse d'augmenter dans les Alpes-Maritimes et le Var depuis 1985 : +47 % (!) dans le premier département, +15 % dans le second, où "le taux de boisement était déjà important", d'après Nathalie Derrière, qui avance une explication principale. "Cela correspond à l'abandon des terres, des alpages et des pâturages abandonnés. Avec une pression moindre des moutons, le paysage se referme et se recolonise par les forêts. La forêt a gagné du terrain sur les terres agricoles."
Le climat méditerranéen n'aide pas les arbres à croitre dans des conditions favorables. Et la croissance est ralentie par le manque d'eau
Nathalie Derrière, chef du département des résultats d'inventaire forestier à l'IGN.
Mais ces chiffres sont à tempérer si l'on regarde le volume de bois produit. Avec 126 millions de m³ de bois produit, la région PACA est seulement la 7e. Et a le plus faible volume à l'hectare : 89 m³ par hectare, loin des 174 m³ par hectare en moyenne en France.
"En PACA, c'est même un peu moins dense qu'en Corse. Les arbres sont petits en hauteur et en dimension de tiges et ne grandissent pas vite. Le climat méditerranéen n'aide pas les arbres à croitre dans des conditions favorables. Et la croissance est ralentie par le manque d'eau", explique l'experte de l'IGN. Sans compter "des sols pas forcément très profonds et riches qui ne permettent pas de se développer autant que dans le nord-est par exemple". Mais avec un taux de mortalité des arbres stable, quand les autres régions françaises voient ce taux augmenter voire exploser, "la région sort un peu du lot, c'est une bonne nouvelle", avance Nathalie Derrière.
Logiquement, le climat qui règne dans la région engendre des conséquences sur les différents groupes d'arbres présents. C'est la seule région à avoir une part aussi importante d'arbres feuillus que de résineux.
C'est la région la plus résineuse (49 % contre 26 % au niveau national). Les Alpes-Maritimes et le Var illustrent bien ce point. D'influence alpine, les Alpes-Maritimes abritent majoritairement des pins sylvestre, assez loin devant le chêne pubescent et le mélèze, cette espèce de conifère typique des montagnes qui perd ses aiguilles en hiver. Dans le Var, le chêne pubescent est majoritaire, devant le chêne vert et le pin d'Alep.
En PACA, le podium est dominé largement par le chêne pubescent, bien plus important que le pin sylvestre et le pin d'Alep.
De grandes difficultés d'exploitation
Un paradoxe émerge, selon Nathalie Derrière : les peuplements sont peu diversifiés puisque 58 % ne contiennent une essence d'arbre, mais en se déplaçant à des dizaines de kilomètres, il est possible de tomber sur des essences d'arbres très différentes. "Dans le Var par exemple, 100 km après avoir vu un hectare de chênes verts, il est possible de voir du mélèze, ce qui n'a rien à voir. Ça semble très uniforme, on a l'impression que tous les arbres sont identiques, mais en se déplaçant un peu, on change d'échelle et on peut arriver sur un autre peuplement, pur."
Ce rapport de l'IGN met en tout en cas en avant la difficulté d'exploitation au sein de la région. "Il y a pas mal de relief, de pente, rien que ça rend l'accès compliqué. Plus le terrain est pentu, plus c'est dangereux pour les forestiers et bûcherons. Avec le manque de routes, les tracteurs et camions ne peuvent pas forcément circuler", explique Nathalie Derrière, qui lie ce phénomène à des contraintes économiques et à la qualité du bois.
"Construire une piste a un coût. Si le bois n'a pas de valeur, ne répond pas aux critères pour la construction (c'est le cas du chêne vert, qui ne grossit pas assez pour pouvoir construire des poutres), ce n'est pas rentable économiquement de construire une route. Et comme la forêt ne croît pas très vite, qu'il y a deux fois moins de bois qu'une autre région où l'accès est plus facile, les forestiers et bûcherons vont ailleurs", conclut l'experte, qui vante tout de même la singularité du mélèze. "Certains ébénistes et menuisiers sont intéressés par un bois qui pousse plus doucement. Le mélèze est recherché notamment pour les toitures."