Le Var a été marqué par les incendies volontaires, qui ont parfois détruit des milliers d'hectares de forêts. Si la plupart des feux sont d'origine accidentelles,1 sur cinq est la cause d'un pyromane. Des personnes qui peuvent avoir des problèmes psychiatrique. Une avocate de Draguignan, raconte.
Dimanche 22 août, alors que le plus grand incendie de l'année dévaste encore l'arrière-pays tropézien, un homme allume volontairement un feu au bord d'une route départementale du Var.
Des témoins réussissent à atteindre les flammes à l'aide de tapis de voiture et de bouteilles d'eau avant que le feu ne se propage. Trois ans auparavant, l'été 2017, un ouvrier agricole provoquait plusieurs incendies à Lorgues touours dans le Var. En 2005, c'était un chargé de communication des pompiers qui était condamné pour plusieurs départs de feux volontaires.
Le Var est régulièrement la cible d'actes malveillants, qui brûlent des milliers d'hectares de forêts, ravagent la faune et détruisent des vies.
?[#Opérations]
— Pompiers 13 (@Pompiers_13) August 17, 2021
Plus de 70 #Pompiers13, avec le @SDIS83 et les renforts extra-départementaux, luttent actuellement contre le #FeuDeForêt qui n'épargne pas le #Var.
Une action difficile alimentée par un vent violent.
L'ensemble de la #ForceDesSecours est mobilisé sur le front. pic.twitter.com/L6ngvEGnL2
L'enquête sur l'incendie qui a ravagé 7 000 hectares de forêt, la semaine du 16 août dernier, n'a pour l'instant pas rendu ses conclusions. La cause humaine est néanmoins privilégiée
Les cendres parleront-elles ?
S'agit-il d'un simple mégot jeté ou d'un acte malveillant ? Si neuf incendies sur dix sont provoqués par l'homme (selon les calculs de l'Irstea - Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture), il est facile de crier à la pyromanie dès qu'une personne provoque un incendie.
Pourtant, comme le rappelle le magazine Sciences et vie, ce trouble psychologique concerne 1 % de la population générale.
Tout incendiaire n'est pas pyromane
Rappelons d'abord la différence de terme entre pyromane et incendiraire, pour ne pas faire de confusion. Un pyromane, comme le rappelle la Banque de dépannage linguistique, est une personne souffrant d'impulsions obsédantes, qui le poussent à allumer des incendies.
C'est "une manie addictive, comme la kleptomanie, l’addiction au jeu", expliquait à Slate.fr Pierre Lamothe, expert-psychiatre auprès de la Cour de cassation. A l'inverse, un incendiaire est, certes, une personne qui allume volontairement des incendies, mais elle le fait par acte de malveillance, de vengeance, etc.
Il est d'ailleurs difficile de comprendre les motivations des pyromanes. Muriel Gestas, avocate au barreau de Draguignan, en a défendu plusieurs. Pour autant, elle est toujours abasourdie par les explications de ses clients.
Ils mettent le feu par plaisir de tout voir brûler, par le plaisir de la flamme. Ils me demandent : 'Vous vous rendez pas compte comme c'est beau ?'", souligne-t-elle. "Qu'on puisse aimer regarder son feu de cheminée, je comprends. Mais qu'on ne réfléchisse pas aux pompiers, aux animaux, aux gens qui risquent de mourir...
Il n'y a pas de motivation autre que la jouissance du feu pour un pyromane. "C'est comme un feu de joie géant, pour eux". L'avocat ajoute : "Les pyromanes sont d'ailleurs dénués d'empathie". Ils ne sont même pas sensibles aux dégâts causés. "On ne peut pas regretter quand il y a eu de la jouissance".
A la différence des incendiaires que Muriel Gestas a pu assister : "Pour certains, il n'y a pas de joie dans le fait de mettre le feu. Mais un esprit de vengeance, contre un voisin, la société... Il faut que tout soit réduit en cendres".
Elle prend aussi l'exemple d'un professionnel qu'elle a suivi, qui avait mis le feu pour réaliser une intervention et avoir des primes.
De quinze ans à la prison à perpétuité pour un incendie volontaire
Lorsque l'auteur d'un incendie volontaire est appréhendé par la justice, il fait l'objet d'une expertise médicale. Sans faire de distinction entre pyromane et incendiaire. "On essaie de comprendre les motivations, savoir s'ils étaient dans un état d'altération du discernement", explique Muriel Gestas.
L'avocate regrette pourtant "la pauvreté de la justice". "On les incarcère même s'ils ont atteint de troubles psychologiques, donc ils ne sont pas traités. Et la récidive revient dès qu'ils sortent de prison".
D'autant plus que la manière de traiter les pyromanes reste "encore expérimentale", rappelle Slate dans son article. Les dernières études sur le sujet ne montrent pas de traitement unique, et les facteurs qui déterminent la pyromanie sont encore inconnus. Toujours est-il que la justice sera plus "clémente" avec quelqu'un atteint de pyromanie, explique Muriel Gestats, car cela constitue "des circonstances atténuantes".
Pour rappel, depuis la loi de mars 2004, les incendies volontaires de bois et forêts sont passibles d'une peine allant de quinze ans de réclusion criminelle et 150.000 euros d'amende à la réclusion criminelle à perpétuité et 200 000 euros d'amende.