Après avoir pris une photo triomphante avec une espèce de requin protégée, un restaurant a suscité la colère de nombreux internautes. Une plainte a été déposée par une association, l'établissement a lui annoncé que le squale était analysé.
C'est une photo qui a fait polémique. Jeudi 10 août, les employés d'un restaurant du Var se prennent en photo en tenant un bébé requin mort dans leur cuisine. Plusieurs associations et personnalités s'insurgent contre ce cliché partagé sur Instagram, en affirmant que le poisson serait une espèce protégée.
Pourquoi la pêche de ce requin pose problème ?
Le squale pris en photo par l'équipe du restaurant est un requin taupe-bleu, ou requin mako. "C'est une pêche irrégulière, il y a eu de la surpêche sur l'espèce, explique Nicolas Ziani, chercheur au sein du groupe phocéen d'étude des requins. De plus, on la connaît mal en Méditerranée, mais la plupart des grands requins sont en danger critique d'extinction par la destruction de leur habitat".
La population de l'espèce a chuté de 99% en mer Méditerranée, notamment à cause de la pêche accidentelle, selon la WWF. L'espèce n'atteint sa maturité qu'après 21 ans, et de nombreux spécimens meurent avant de pouvoir se reproduire, ce qui rend difficile le renouvellement de sa population.
Comment est née la polémique ?
Après la publication sur Instagram, l'association de protection des animaux marins, Sea Sheperd, a repris la photo dans un tweet, en indiquant qu'elle allait porter plainte pour vente illégale d'espèce protégée.
Le journaliste Hugo Clément a également partagé l'image sur Facebook, en rappelant la situation alarmante de cette espèce de requin. "L'équipe du restaurant [...] est très fière de se mettre en scène sur les réseaux sociaux avec ce juvénile requin Mako, une espèce en danger critique d'extinction. [...] Cette espèce est interdite à la vente en Méditérannée française".
Le restaurant a ensuite reçu de nombreux messages d'internautes en colère sous leurs publications sur les réseaux sociaux. De nombreuses évaluations négatives ont aussi été déposés sur la page Facebook de l'établissement, faisant diminuer la note de l'établissement à 1,9 sur 5.
Mais pour Nicolas Ziani, cette méthode est contre-productive. "Il y a le temps judiciaire, on ne peut pas faire la justice soi-même, explique le biologiste spécialiste des requins. On n'a pas besoin de balancer sur les réseaux sociaux, on signale des faits aux services compétents. Rendre tout cela public peut être contreproductif."
Quelle est la réponse du restaurant ?
L'établissement a publié un texte sur Instagram après que la polémique a éclaté. La direction affirme qu'elle est en attente d'analyse du poisson, et qu'elle ne vendra pas le requin avant d'avoir eu les résultats. "C'est une pêche accidentelle, ajoute-t-elle. Le requin a été découvert mort dans les filets."
Mais le communiqué n'a pas convaincu les internautes, qui ont continué à critiquer le comportement de l'équipe du restaurant. La commercialisation d'espèces protégées ou réglementées sans autorisation est un délit, et les contrevenants risque jusqu'à 3 ans de prison et 150.000 euros d'amendes.
A l'échelle mondiale, ce commerce pèse entre 7 et 23 milliards de dollars, ce qui en fait l'un des commerces illégaux les plus profitables au monde.
