"J'ai dû réapprendre à dire non", à Mazan, des femmes victimes de violences conjugales se reconstruisent grâce à la thérapie par le cheval

Le procès des viols de Mazan est devenu emblématique des violences faites aux femmes. Dans ce village du Vaucluse, un centre d'équihomologie propose depuis 20 ans aux victimes de violences conjugales de se reconstruire par le dialogue avec le cheval.

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"Le cheval ne parle pas, mais il nous comprend". Pas besoin de mots. Juste son contact doux et chaud. Une présence rassurante pour reprendre possession de son corps martyrisé. Etiennette, 38 ans, a vécu 16 ans d'enfer auprès de son mari, jaloux et violent. "Pour ne pas sentir les coups, j'ai appris à séparer mon corps et mon esprit, pour ne plus sentir la douleur", peut raconter aujourd'hui cette maman de deux enfants. "Aujourd'hui, ils sont bien ensemble", dit-elle après deux ans de suivi dans ce programme d'équihomologie, au ranch Lucky Horse de Mazan.

Un refuge à Mazan pour les femmes brisées

"Ici, je me sens comprise, c'est mon hâvre de paix", confie-t-elle. Ce centre a été le premier à ouvrir ses portes en France, il y a 30 ans, à Mazan. Ce village du Vaucluse est désormais associé aux violences subies par Gisèle Pelicot, violée sous soumission chimique pendant dix ans par son mari et des dizaines d'hommes. C'est ici que Daniel Silvestre accompagne les femmes victimes de violences conjugales.

Latika, les yeux clos, laisse sa main lentement effleurer le flanc de Lotus, pendant qu'Etiennette caresse le cheval du côté opposé. L'objectif de ces ateliers est d'aider ces femmes à prendre conscience de leur corps. "Au fur et à mesure qu'elles rentrent dans la sensation de leur corps, elles se mettent à exister", souligne Daniel Silvestre.

Un dialogue en confiance avec le cheval

"Au début, ça fait peur, fermer les yeux pour moi, c'est difficile, explique Latika, et maintenant, je me sens apaisée avec le cheval". Le cheminement a pris du temps, il a fallu un an à Latika pour oser monter sur le dos de l'équidé. "En deux ans de thérapie avec la psychologue, je n'ai jamais autant progressé qu'avec le cheval", assure-t-elle.

Faire confiance à l'autre et à soi-même, c'est le plus grand des défis. "Toucher et être touchée, c'est une difficulté majeure pour ces femmes victimes de violence, le fait de passer par le cheval, c'est un apprivoisement qui est plus facile pour elle, décrypte Daniel Silvestre, le cheval permet réellement ce contact 'je peux être touchée, je peux toucher et être en sécurité'".

Quand elles sont arrivées, elles étaient détruites, on a vu qu'elles avaient des réticences avec l'être humain, mais le cheval a joué un rôle de médiateur. 

Daniel Silvestre, directeur du centre d'équihomologie

France 3 Provence Alpes

Le cheval est la base d'une communication non verbale qui les aide à se reconstruire, selon Daniel Silvestre : "le verbal les a souvent détruites, le non-verbal les reconstruit".

"En venant ici, je n'aurais jamais imaginé que je me serais approchée ou que j'aurais touché même un cheval, et aujourd'hui, je vois le progrès que j'ai fait et ça me fait du bien en fait, ça m'aide me reconstruire à prendre confiance en moi et quand je vois progrès que je fais, je me dis, oui, je peux prendre confiance en moi et j'en ai le droit en plus," acquiesce Latika, maman de trois enfants, qui a vécu les menaces et la soumission chimique. Le droit de parole aussi, revendiqué et assumé par les victimes dans la dynamique de la médiatisation de l'affaire Pelicot.

Un soutien solidaire avec Gisèle Pelicot

C'est naturellement que ces femmes ont apporté leur soutien solidaire à Gisèle Pelicot et aux autres victimes de violence, lors d'une marche à Mazan, le 1ᵉʳ novembre. Pour la première fois, elles ont parlé en public de ce qu'il leur est arrivé. 

"J'ai dû réapprendre à respirer, réapprendre à dire non, réapprendre à exister pour prendre ma place", a témoigné ce jour-là Latika, très émue face aux 500 personnes rassemblées.

Pour ces femmes, Gisèle Pelicot est un exemple, de courage et de dignité. En ayant osé défier ses bourreaux, sans huis clos, au procès de son mari Dominique, elle a fait résonner son combat chez des milliers de femmes et particulièrement ici, à Mazan.

"Elle est sortie du silence, il n'y en a pas beaucoup qui vont avoir le courage de faire un pas en avant, elle l'a fait, elle a surmonté tout ça, et je trouve qu'elle est très forte", conclut Etiennette. L'association Isofaculté prévoit également de permettre à ces femmes de se rendre à une audience pour apporter leur soutien à Gisèle Pelicot et sa fille au procès, qui se tient jusqu'en décembre, à Avignon. 

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