Dominique P., retraité de Mazan (Vaucluse) est jugé depuis ce lundi à Avignon pour avoir drogué son épouse et recruté des inconnus pour la violer, pendant dix ans. Ils sont 50 à ses côtés, sont sur les bancs des accusés.
Très attendu, quatre ans après son interpellation alors qu'il filmait sous les jupes de femmes dans un supermarché à Carpentras, le procès de Dominique Pélicot, retraité accusé d'avoir drogué son épouse et recruté des dizaines d'inconnus pour la violer, pendant dix ans, s'est ouvert lundi devant la cour criminelle de Vaucluse à Avignon, spécialement reconfigurée pour accueillir toutes les parties et le presse dans cette affaire hors norme. 51 hommes seront jugés au terme de 69 journées d'audience, en décembre. Ils encourent une peine de 20 ans de réclusion criminelle. L'audience a été suspendue peu avant 15h00, les débats reprendront mardi matin avec la lecture du long et très cru rapport d'enquête par le président de la cour. France 3 Provence-Alpes vous résume ce qu'il faut retenir de la première journée de ce procès.
Le huis clos refusé
Rarissime par le nombre total d'accusés, ils sont 51, âgés de 26 à 74 ans, le procès va se dérouler en présence du public et de la presse, pendant quatre mois, jusqu'au 20 décembre. "Il ne faut pas que ce soit un spectacle", ont plaidé les avocats de la défense, sauf celui du principal accusé Dominique Pélicot, réclamant un procès à huis clos.
Une position soutenue par le ministère public, estimant que des vidéos des faits, filmées par le mari, seraient "nécessairement visionnées" et que "non seulement la publicité des débats serait dangereuse mais (elle) porterait aussi atteinte à la dignité des personnes".
La cour criminelle, composée de cinq magistrats professionnels, a finalement refusé le huis clos. "Les débats seront publics", a annoncé le président Roger Arata, après une suspension de séance d'une trentaine de minutes.
La victime entourée de ses enfants
Après quatre années de silence, Gisèle Pélicot, 72 ans, est arrivée au tribunal entourée de sa fille et de ses fils. Elle a décidé de se confronter à ses agresseurs. Même s'il y aura "des moments extrêmement difficiles", la victime "estime qu'elle n'a pas à se cacher", qu'elle "n'a pas à avoir honte" : "il faut que la honte change de camp", a expliqué Me Stéphane Babonneau, un des deux avocats de l'épouse, en instance de divorce.
Avant même la décision de la cour, Gisèle P., très digne à son arrivée et durant toute cette première journée d'audience, avait fait savoir qu'elle souhaitait "une publicité complète" de ce dossier, une publicité "totale, jusqu'au bout". Une position partagée par les trois enfants du couple, constitués parties civiles.
Le témoignage de la victime est attendu jeudi devant la cour.
Le mari "a honte de ce qu'il a fait"
En détention provisoire depuis novembre 2020, Dominique Pélicot, 72 ans, s'est présenté ce lundi matin, vêtu d'un t-shirt noir. Lors de l'instruction, le mari a reconnu qu'il administrait de puissants anxiolytiques à sa femme, à son insu. Du Temesta le plus souvent. Pour ensuite la faire violer par des hommes contactés sur internet. 92 faits ont été comptabilisés, dont les premiers remontent à 2011 et se sont ensuite poursuivis jusqu'à l'automne 2020.
Selon son avocate, l'accusé est soulagé de pouvoir bientôt s'expliquer devant la cour. "Il a honte de ce qu'il a fait, c'est impardonnable", a plaidé auprès de la presse lundi matin son avocate, Me Béatrice Zavarro, estimant qu'on est dans ce dossier "dans une forme d'addiction" : "Il reconnaît ce qu'il a fait, il n'y a pas eu une once de contestation depuis le début".
Des militantes féministes demandent la peine maximale
Ce procès est emblématique de la question de la soumission chimique, ce procès a donné lieu
avant même son ouverture lundi matin à la manifestation d'une quinzaine de membres
de deux collectifs féministes, "Les Amazones d'Avignon" et "Osez le féminisme 84", devant le palais de Justice d'Avignon. "Violeurs, on vous voit, victimes, on vous croit", ont-elles scandé, vêtues de noir.
"Nous soutenons l'épouse et victime de Dominique P.. Il l'a droguée pendant 10 ans, l'a ouverte au viol d'inconnus [...]. Plus de 80 hommes sont venus violer cette femme chez elle. Ce sont des crimes déshumanisant", ont expliqué les militantes des associations.