Procès des viols de Mazan : on vous explique la polémique autour de la diffusion des vidéos lors des audiences

Les avocats de Gisèle Pelicot ont demandé ce lundi 30 septembre, la levée du huis clos décidé la semaine dernière par le président Arata concernant les vidéos de viols, une décision est attendue d'ici à la fin de la semaine.

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Faut-il tout montrer au public et aux journalistes ? La question est au cœur de cette cinquième semaine du procès des viols de Mazan entamée lundi 30 septembre, avec la poursuite du défilé des 50 coaccusés de Dominique Pelicot, 71 ans, qui s'est fait dispenser pour la journée, pour raison médicale. En marge de ces interrogatoires, se poursuit la polémique sur le huis clos partiel imposé par le président de la cour criminelle, à la demande de certains avocats de la défense. Roger Arata a décidé d'exclure le public et la presse lors de la diffusion des vidéos des viols. Une diffusion qui ne sera pas systématique, mais au cas par cas. Un choix qui divise les parties au procès et scandalise l'association de la presse judiciaire. Que contiennent ces vidéos ? Qui demande le huis clos ?  Qui s'y oppose ? France 3 Provence-Alpes vous explique la polémique autour de la diffusion des vidéos lors des audiences.

Que contiennent ces vidéos ?

Le 19 septembre, dix photos et trois vidéos d'un fichier nommé "ABUS" ont été projetées à la demande de l'avocat général devant la cour criminelle de Vaucluse, face aux dénégations d'un coaccusé, Jacques C., 72 ans, qui ne reconnaît pas de viols, mais "des atteintes sexuelles". Sur ces vidéos, nommées "Cunni et pipe Jacques", "Jacques doigtage" et "Pipe moi", on peut voir la victime inerte, ronflant bruyamment, subir des caresses et des cunnilingus de Jacques C., nu, ainsi qu'une fellation forcée de son mari, la poussant au bord de l'étouffement.

Ces images ne sont qu'une infime partie des 4 000 photos et vidéos saisies par les enquêteurs sur divers ordinateurs, clés USB et disques durs du principal accusé. 

Entre 2011 et 2020, Dominique Pelicot a enregistré et stocké méticuleusement dans des fichiers aux intitulés évocateurs des vidéos des hommes qu'il faisait venir à son domicile pour violer sa femme sous soumission chimique. C'est ce qui a permis aux enquêteurs de remonter aux 50 coaccusés de ce procès des viols de Mazan. Ils sont 35 à contester les faits de viol. 

Pourquoi le juge souhaite un huis clos ?

Après la diffusion de deux séries de photos et vidéos en présence des journalistes, l’avocat général Jean-François Mayet a demandé que l’ensemble des images "soient regardées par la cour", recevant le soutien des parties civiles et de l’avocate de Dominique Pelicot. Mais deux avocats s'y sont en revanche farouchement opposé L'un évoquant même "un déballage nauséabond", un autre "du voyeurisme dont la justice n'a pas besoin".

"Considérant que ces images sont indécentes et choquantes", le président de la cour criminelle a exclu le public et la presse de la diffusion de ces vidéos, qui "se fera en présence des seules parties au procès et de la cour", a-t-il annoncé le 20 septembre, tranchant pour un visionnage au cas pas cas. 

"Les diffusions ne seront pas systématiques", a par ailleurs précisé Roger Arata. S’il doit être envisagé la diffusion d’une ou plusieurs vidéos, cela se fera à la demande d’une ou plusieurs parties, dans le but unique de la manifestation de la vérité. 

Quelle est la réaction de Gisèle Pelicot ?

"C'est important de voir de quoi on parle", a estimé Me Stéphane Babonneau, un des avocats de Gisèle Pelicot, qui a demandé la levée du huis clos lors de la diffusion des vidéos mettant en cause les accusés.

"C’est un procès qui a le pouvoir de changer la société. Mais pour que cette société change, il faut qu’on ait le courage de se confronter à ce qu’est véritablement le viol", a déploré Me Babonneau.

"La honte doit changer de camp", martèlent Gisèle Pelicot et ses soutiens depuis le début du procès, emblématique des viols sous soumission chimique.

>>> A lire aussi : TEMOIGNAGE. Viols de Mazan : "nous attendons un procès exemplaire", déclare la députée Sandrine Josso, victime de soumission chimique

La victime, demande que les vidéos de ces abus soient diffusées devant la cour et les journalistes, mais pas le public. Gisèle Pelicot entend ainsi couper court aux arguments de la défense qui nient la notion d'intentionnalité. Pour son entourage, sans ces vidéos, l'affaire n'existerait pas. Pour les parties civiles, ce huis clos équivaut à réduire au silence Gisèle Pelicot, qui souhaite que l'horreur soit exposée au grand jour.

Dominique Pelicot est-il contre la diffusion de ces images ?

"Mon client se plie complètement à la volonté de la partie civile", a déclaré Me Béatrice Zavarro à France 3 Provence-Alpes. "Il est favorable à cette diffusion, parce que, les vidéos, c'est le noyau dur de cette procédure, ajoute-t-elle, et "il estime que si son épouse y est favorable, il n'a aucun moyen aujourd'hui de venir contester quoi que ce soit."

La diffusion de ces vidéos en présence de la presse reste du ressort de la volonté de Madame Pelicot, donc Monsieur Pelicot ne peut que se plier à cette exigence.

Me Béatrice Zavarro, avocate de Dominique Pelicot

France 3 Provence-Alpes

Le principal accusé a reconnu avoir drogué son épouse pendant dix ans pour la violer et la livrer à des hommes recrutés sur un site libertin controversé, coco.fr. Le mari de la victime soutient que tous hommes venus à son domicile, étaient "parfaitement au courant" que sa femme serait droguée à son insu.

"Même si on a des procès-verbaux qui sont très explicites sur la description des vidéos, les images parlent toujours davantage, notamment quand on a des situations où l'individu pourrait dire j’ai eu envie de partir'" alors que la vidéo montre le contraire, souligne Me Zavarro, il est nécessaire, je pense, que ces vidéos soient diffusées"

Pourquoi la presse monte-t-elle aussi au créneau sur cette décision ?

"Laissez la presse travailler". Plusieurs associations de journalistes ont dénoncé le choix du président de les exclure de la cour à la diffusion des vidéos. "Le SNJ demande avec force au président, Roger Arata, de laisser la presse faire son travail, dans l’intérêt de la justice et pour la sérénité des débats", indique dans un communiqué le Syndicat national des journalistes.

Mercredi 25 septembre, l'Association de la presse judiciaire (APJ) a également dénoncé "les méthodes abusives et méprisantes" du magistrat.

Quand la décision de la cour sera-t-elle connue ?

La cour criminelle de Vaucluse, composée de cinq magistrats professionnels, doit se réunir jeudi 3 octobre dans l'après-midi pour débattre avec les avocats des différentes parties du procès ainsi que le ministère public sur la question de la diffusion des vidéos de viols en présence de la presse.

La décision, qui devrait être prise de façon collégiale par les juges de la cour, pourrait être annoncée dans la foulée par le président Roger Arata. 

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