La saison estivale vient à peine de commencer, les hôteliers sont déjà en colère contre l'omniprésence d'Airbnb. Manque de sécurité, absence de taxe de séjour, 26 hôtels à travers la France viennent d'assigner en justice la plateforme américaine.
Alors que le festival d'Avignon ouvre ses portes ce samedi 29 juin, un véritable bras de fer se joue entre Airbnb et les professionnels de l'hôtellerie. L'hôtel Mignon, situé rue Joseph-Vernet dans le centre-ville de la Cité des papes, fait partie des 26 hôteliers à avoir assigné en justice la plateforme de locations de meublés de tourisme, ce jeudi 20 juin. La démarche est soutenue par l'Umih, l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie.
Des contraintes différentes
Ce que reprochent en priorité les professionnels hôteliers est la différence de règles entre eux et Airbnb. "On est en position de faiblesse vis-à-vis d'eux", soupire Leonidas Vadillo, gérant de l'hôtel Mignon qui possède 16 chambres. Pour lui, il y a un manquement à la sécurité du côté de la plateforme. Disposant d'un système de surveillance 24 h/24, l'hôtelier dénonce l'absence "d'un système de sécurité vérifié et entretenu tous les ans", entraînant des problèmes d'insécurité, comme "les réseaux de prostitution".
On ne lutte pas avec la même règle.
Leonidas Vadillo, gérant de l'hôtel Mignonà France 3 Provence-Alpes.
De la même façon, l'hôtel doit recevoir la visite des pompiers tous les cinq ans. Des règles qui ne sont pas applicables au niveau de la plateforme américaine. "Beaucoup d'Airbnb seraient fermés s'ils devaient l'effectuer", poursuit Leonidas Vadillo.
Une concurrence grandissante
Avant l'essor d'Airbnb, le gérant de l'hôtel Mignon soutient que 70 % de ses clients étaient des touristes et 30 % des professionnels. "Aujourd'hui, on n'a presque plus aucun touriste." Malgré les travaux pour proposer une offre adaptée aux professionnels, le gérant ne retrouve pas sa clientèle disparue qui se dirige plutôt vers des locations saisonnières entre particuliers. Un coup dur pour le gérant qui doit cohabiter avec 20 appartements en location saisonnière à proximité.
Alors que le marché du tourisme retrouve presque son niveau d'avant la crise sanitaire, Leonidas Vadillo considère ne pas ressentir les effets de la croissance au sein de son établissement. "Toute la croissance va chez Airbnb et Booking."
Une partie de l'hôtellerie souffre de cette concurrence déloyale et va peut-être fermer ses portes.
Leonidas Vadillo, gérant de l'hôtel Mignonà France 3 Provence-Alpes.
Il considère même qu'avec l'augmentation des coûts, suite à l'inflation, ils n'ont "pas les moyens de s'adapter". "On va être condamnés à fermer", souffle-t-il avec désespoir. Toutefois, Leonidas Vadillo ne réclame rien, "c'est plus pour le principe que pour l'argent". Il souhaite "attirer l'attention de la population" par ce cri d'alerte.
26 hôtels assignent en justice Airbnb
L'hôtel Mignon n'est pas le seul établissement à se positionner contre la plateforme, ils sont 26 à travers la France, dont plusieurs se trouvent dans le Var et dans les Alpes-Maritimes. L'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie a présenté l'action de ces professionnels devant la justice, ce 20 juin 2024.
L'organisation patronale du secteur de l'hôtellerie-restauration dénonce entre autres la plateforme de ne pas supprimer "des annonces de plus de 120 jours pour les résidences principales" et de ne pas payer "la taxe de séjour". Elle pointe du doigt également la responsabilité de la plateforme d'accueillir des "annonces illicites, en violation de la réglementation applicable" sur son site.
26 hôteliers assignent en justice la plateforme Airbnb pour
— UMIH (@UMIH_France) June 20, 2024
concurrence déloyale et demandent des réparations financières @UMIH_France les soutient 💪💪 pic.twitter.com/afFJDYujKx
De son côté, Airbnb a réagi à travers un communiqué de presse adressé à l'AFP : "S'il s'avère que cette nouvelle action en justice nuit à l'activité d'Airbnb ou à la capacité des hôtes français de louer leur bien, nous envisagerons toutes les options, y compris judiciaires, pour protéger ces droits."
Les 26 hôteliers et l'Umih se retrouveront devant le Tribunal de commerce de Lisieux le 6 septembre 2024.