Le 4 septembre dernier, le journal satirique Charlie Hebdo publiait une nouvelle caricature qui enflamme les réseaux sociaux. En liant les consultations d'Emmanuel Macron pour le poste de Premier ministre au procès des viols de Mazan, l’illustration provoque une vague d'indignation. Un dessin qui alimente, de nouveau, le débat sur les limites de la satire et la liberté d’expression.
Depuis quelques jours, la polémique est née sur les réseaux sociaux. Ce mercredi 4 septembre, le journal satirique Charlie Hebdo publie une caricature qui n’a pas tardé à provoquer le tollé. Cette illustration établit un parallèle entre les entretiens d'Emmanuel Macron alors à la recherche d’un nouveau Premier ministre et le médiatique procès des viols de Mazan, une affaire judiciaire marquée par environ 200 viols.
Sur le dessin, on voit Emmanuel Macron, nu, une caméra à la main, filmant une file d’hommes attendant de violer Marianne, l’incarnation de la République française. Bonnet phrygien vissé sur la tête, elle est allongée sur une table sous l'emprise du Rohypnol, une drogue connue pour être utilisée pour les agressions sexuelles. Le tout est accompagné du texte : "Les consultations continuent". Très vite, cette représentation suscite des réactions sur la toile.
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Réactions indignées des internautes et des associations
Blandine Deverlanges, membre de l’association Osez le Féminisme 84, la qualifie « d'horrible caricature, dégueulasse. J'en suis horrifiée ». Elle poursuit "Toutes les femmes ont un ressenti l’humiliation. C’est la culture du viol point barre, c’est une agression contre les femmes au sens large et Gisèle Pelicot." Confuse, elle s'interroge : "Quelle était l’intention du dessinateur ? Qu’est-ce qu’il a cherché à dire ? Quoi qu’il en soit, cela participe à la banalisation du viol". Et elle n’est pas la seule à exprimer son désarroi. Les plateformes X, Instagram et TikTok sont inondées de commentaires dénonçant le manque de respect de cette caricature.
Sur Instagram, le commentaire qui obtient le plus de "j'aime", sous la publication de la caricature publiée par le compte officiel du journal, exprime : "Que l’on soit caricatural, violent, que l’on attaque des puissants, ça a du sens. Mais utiliser l’horreur de l’histoire de cette femme abusée pour atteindre Macron, c’est injustifiable." D’autres internautes perçoivent la caricature comme une "double peine pour la victime".
Sur X, ex-Twitter, la colère monte également, certains s'interrogent comme ci-dessous sur la cible choisie : "ils pourraient choisir de faire une caricature du mari (...) c'est lui qui est assez bête pour penser qu'il ne serait jamais inquiété (...)"
C’est drôle parce que Charlie Hebdo ils pourraient choisir de faire une caricature du mari de #mazan, c’est lui l’ordure, c’est lui qui a été assez bête pour penser qu’il ne serait jamais inquiété même en filmant ses horreurs, mais non, c’est toujours des mêmes qu’on rit
— CEDRIC CRUMBLE DEPUTER (@supermarloball) September 5, 2024
Débat sur la liberté d’expression : où tracer la ligne ? Charlie Hebdo : une histoire de provocations
Sans aucun doute, le débat sur la question des limites de la liberté d’expression se rouvre. Sur TikTok certains internautes appellent à un boycott de Charlie Hebdo, tandis que d'autres défendent le dessin, estimant que la satire a, justement, pour vocation de choquer. "Si ça choque, c’est que le dessin est réussi" ou encore "le but du dessin est de choquer, de marquer les esprits. Je pense qu'ils ont bien réussi, que ça plaise ou non", expriment des internautes. Dans la même veine, un autre rétorque : "Mais vous ne comprenez toujours pas le but des caricatures".
Un argument dit "facile" par la militante féministe Blandine Deverlanges : "C’est un argument facile. On peut violer une femme dans la rue pour dénoncer le viol, dans ce cas-là, effectivement là, on va choquer".
Elle nuance cependant "Il ne faut pas pour autant incriminer le journal dans l’absolu. À Charlie Hebdo les journalistes ont des opinions différentes. La preuve, l’une des journalistes du média a, justement, publié le livre La Réputation : enquête sur la fabrique des filles faciles."