Fermeture de Fessenheim : l'Etat versera au moins 400 millions d'euros à EDF

EDF et l'Etat sont parvenus à un accord sur l'indemnisation qui sera versée à l'électricien pour la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, a-t-on appris mercredi auprès du ministère de l'Energie. Au total, l'électricien touchera donc au minimum 400 millions d'euros.

Le processus de fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim a franchi une nouvelle étape, indispensable mais encore loin d'être la dernière, avec l'annonce mercredi d'un accord sur les modalités d'indemnisation que l'Etat versera au groupe EDF. L'accord prévoit une indemnisation par étapes, avec un premier versement "de 100 millions d'euros", au moment de l'arrêt de la centrale, et "des étapes ultérieures en fonction de plusieurs paramètres, dont le prix de l'énergie" dans les années suivant la fermeture, a indiqué un porte-parole du ministère.

La réaction de Claude BRENDER, maire (SE) de Fessenheim, qui "veut continuer à se battre"


©France 3 Alsace

Parmi ces étapes ultérieures, un second versement "fixe" de "300 millions d'euros" a déjà été acté, a précisé une source au fait des discussions. EDF recevra donc au minimum 400 millions d'euros pour arrêter de manière anticipée les deux réacteurs de la doyenne des centrales françaises, confirmant une information de l'agence Bloomberg News. 

Ces versements doivent permettre à EDF de financer les coûts de fermeture des deux réacteurs de 900 mégawatts et l'éventuel manque à gagner pour le groupe durant les années où la centrale aurait pu fonctionner. Sollicité, EDF n'a pas souhaité commenter l'information. L'arrêt définitif de Fessenheim, promesse de campagne du président de la République en 2012, est fixée à l'horizon 2018, quand EDF prévoit de mettre en service l'EPR de Flamanville (Manche). La loi sur la transition énergétique prévoit en effet de plafonner à son niveau actuel la capacité nucléaire installée sur le territoire.

Cette fermeture est aussi réclamée de longue date par les écologistes ainsi que par l'Allemagne et la Suisse, pays frontaliers du site, inquiets pour la sécurité de cette centrale située sur une faille sismique. L'accord doit désormais être soumis pour avis au comité central d'entreprise (CCE) d'EDF, qui se réunit le 14 septembre, puis au Conseil d'administration d'EDF. Le gouvernement devra ensuite prendre un décret entérinant la décision de fermeture. Cela sera fait "cette année", a assuré François Hollande en avril dernier.

"Une blague" pour la CGT

L'annonce d'un accord a suscité une vive réaction de la CGT, qui promet de faire "tout pour que le CCE utilise toutes ses prérogatives et se garde le droit de faire une nouvelle demande d'expertise" car "on n'a pas exploré toutes les conséquences de cette fermeture sur le réseau électrique français et les répercussions économiques et sociales sur le bassin d'emploi", a déclaré Philippe Page Le Merour, représentant du premier syndicat d'EDF. Il a qualifié de "blague" le montant évoqué de 400 millions d'euros, alors que le syndicat estime à 2 milliards le préjudice pour EDF.

La CGT appelle à "une journée de mobilisation, y compris par la grève et en pesant sur la production d'électricité", le 14 septembre, a-t-il ajouté. La CFE-CGC d'EDF a aussi réitéré son opposition à une fermeture anticipée, une "aberration politique et économique" qui "va supprimer des emplois à EDF et chez ses prestataires", selon son représentant Frédéric Letty. 

En 2014, un rapport parlementaire avait estimé que 5.000 personnes dépendent de la centrale, et prévoyait un impact direct sur près de 2.000 emplois. Il avait évalué à 5 milliards d'euros le coût total de la fermeture, des calculs jugés "farfelus" par la ministre de l'Energie Ségolène Royal. Le gouvernement réfléchit actuellement à la reconversion du site. Mme Royal a indiqué, en avril, travailler avec l'Allemagne sur le sujet, évoquant aussi l'installation d'une usine de fabrication de batteries. "On trouve indécent d'indemniser EDF pour une centrale qui est en fin de vie et qui est très souvent en panne", a réagi Charlotte Mijeon, porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire.

 L'indemnité prévue est "beaucoup trop" élevée "pour une centrale qui est en déficit et qui est souvent en panne", a renchéri André Hartz, porte-parole de l'association Stop Fessenheim. Le réacteur numéro 2 est à l'arrêt depuis le 13 juin, en raison d'une anomalie détectée sur un générateur de vapeur. La fermeture de Fessenheim pourrait aussi être un enjeu de la prochaine élection présidentielle. Plusieurs candidats à la primaire du parti Les Républicains, dont Alain Juppé, François Fillon et Nicolas Sarkozy, ont assuré qu'ils reviendraient sur cette décision en cas de victoire.

La réaction d’Eric Straumann, président (LR) du Conseil départemental du Haut-Rhin

Le contexte pré-électoral n’aura échappé à personne et Fessenheim ne doit pas faire les frais de promesses inconsidérées d’un exécutif aux abois. L’accord entre l’Etat et EDF, portant sur la fermeture du site de production de Fessenheim, interpelle tant sur la forme, que sur le fond. Que dirait-on, en effet, d’une entreprise privée qui profiterait de l’été pour annoncer la fermeture d’un site de production très rentable, sans aucune concertation et sans projet de reconversion ?

D’un point de vue financier, aucune indemnité n’est évoquée pour les collectivités qui seront, de fait, privées des recettes fiscales générées par la centrale et qui auront, de surcroît, à gérer l’après Fessenheim. En outre, l’indemnité qui sera versée à EDF – 400 millions d’Euros à terme  – semble bien faible au regard des bénéfices dégagés par le site de production chaque année (250 millions d’Euros).

S’agissant des salariés, aucune proposition n’est formulée pour garantir le maintien des emplois sur le bassin d’activités de Fessenheim. Ce sont ainsi près de 2000 emplois qui sont directement menacés. C’est aussi tout un tissu industriel régional qui est fragilisé, Fessenheim garantissant un approvisionnement électrique de qualité et sécurisé.

Sur la question énergétique, aucune alternative n’est avancée par l’Etat, alors même que le développement de solutions propres et durables s’impose à nous, notamment par des solutions locales assurant un même niveau de service. L’Etat arrête Fessenheim pour pouvoir ouvrir l’EPR de Flamanville. On remplace simplement du nucléaire par du nucléaire.


Dans ces perspectives, nous attendons toujours de l’Etat qu’il présente en concertation avec toutes les parties prenantes locales – salariés EDF, collectivités, responsables économiques - un plan de reconversion du site de Fessenheim à la hauteur des enjeux.

Réaction de Michel Sordi – député (LR) du Haut-Rhin et maire de Cernay.


Je viens d’être informé qu’un accord serait intervenu entre l’Etat et EDF, sur le montant d’une indemnité à verser à ce dernier, pour l’arrêt prématuré de la centrale nucléaire de Fessenheim. Outre cette annonce qui s’inscrit bien dans la période pré-électorale que nous connaissons, je déplore qu’une fois de plus l’Etat-actionnaire à 85% d’EDF ait su mettre la pression sur ce dernier pour négocier les indemnités mais que l’Etat-aménageur ne propose aucune solution au bassin d’emplois rhénan qui va perdre 2000 emplois, je le rappelle, pour installer de nouvelles entreprises. Un délégué interministériel a été nommé il y a 4 ans maintenant pour s’occuper du volet reconversion industrielle, sans aucun résultat à ce jour.
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