Des policiers de Besançon se sont rassemblés en fin d'après-midi devant le commisssariat de la Gare d'eau pour dénoncer leurs conditions de travail de plus en plus difficiles. Hier, leurs homologues de Montbéliard avaient eux aussi bravé leur droit de réserve.
"Ras le bol. On n'en peut plus. On veut des effectifs, on veut travailler". Les policiers de Besançon ont voulu, eux aussi, exprimer leur lassitude et leur colère. Solidaires de leurs collègues agressés dans l'Essonne, les policiers dénoncent à la fois la montée de la violence dans l'exercice de leur métier et le manque crucial de moyens.
Face à une mobilisation qui s'étend en province, le gouvernement a appelé jeudi les policiers à "continuer le dialogue" et condamné l'"utilisation politique" du mouvement par l'opposition, qui multiplie les critiques à quelques mois de la présidentielle.
Au troisième soir de la contestation, plusieurs centaines de policiers de région parisienne ont à nouveau bravé leur devoir de réserve pour défiler dans
la nuit de mercredi à jeudi sur les Champs-Elysées, après s'être réunis place de la République. En civil, ils ont remonté l'avenue, puis entonné la Marseillaise au pied de l'Arc de Triomphe.
Apparue dans l'Essonne, où quatre agents ont été attaqués au cocktail Molotov le 8 octobre à Viry-Châtillon, cette colère gronde désormais bien au-delà.
Des rassemblements se sont notamment tenus mercredi à Toulouse, Bordeaux, Nancy, Toulon, Nice, Marseille et Lyon et Montbéliard.Un nouveau rassemblement est prévu ce jeudi soir à Lyon après des incidents survenus durant la nuit dans la banlieue sensible de Vénissieux. Une quarantaine de jeunes s'en sont pris à des policiers, leur jetant pierres, pavés et boules de pétanque, ainsi que des cocktails Molotov qui n'ont toutefois pas fait de blessés.
Depuis Francfort où il était en déplacement, le Premier ministre Manuel Valls a exhorté les policiers à "continuer le dialogue" entamé avec le gouvernement.
La veille, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a promis aux syndicats policiers, eux-mêmes dépassés par leur base, qu'une concertation serait lancée dès lundi dans les départements, venant compléter un plan "de sécurité publique" prévu en novembre. Le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas a, lui, promis "la plus grande fermeté" envers ceux qui s'en prennent aux fonctionnaires
de police.
Mais les syndicats réclament désormais d'être reçus par François Hollande.
Et demandent la révision des règles de la légitime défense et le retour des peines planchers pour les agresseurs de policiers et gendarmes, créées par la droite et supprimées par la gauche.- Rôle du FN en question -
Sur la défensive, le gouvernement pointe la responsabilité vers la droite, qui a supprimé selon lui 10.000 postes sous la présidence Sarkozy.
"Je demande à tous les responsables politiques de la dignité, de la hauteur de vue. L'utilisation politique de cette expression n'est pas digne. Surtout quand soi-même on n'a pas été à la hauteur, je parle de l'opposition, de ce qu'il fallait faire pour les policiers", a lancé Manuel Valls. "Mensonges", a rétorqué l'ancien chef de l'Etat, candidat à la primaire de droite.
"La Cour des comptes a publié un rapport démontrant qu'en décembre 2015 il y avait 868 policiers et gendarmes de moins à l'époque de M. Hollande
qu'avec moi", a-t-il affirmé.
"Nous avons créé près de 6.500 emplois, il en reste 2.500 à créer en 2017", a riposté Bernard Cazeneuve, en marge d'un déplacement à Villeneuve-d'Ascq (Nord). De son côté, le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a dit voir la "patte" du Front national dans ces actions "hors la loi" d'agents de police.
Un soupçon balayé par le FN, dont la présidente Marine Le Pen a évoqué le mécontentement "légitime et sain" des policiers.
"Voir la patte du FN sur ces rassemblements relève du fantasme", a assuré à l'AFP un haut cadre de la police nationale, pour qui cette fronde révèle surtout "que les policiers ne font plus confiance à leurs syndicats".
"Une poignée essaie de détourner des revendications légitimes", a estimé Patrice Ribeiro, secrétaire général du syndicat Synergie-officiers. "Dans ces rassemblements il y a des radicaux et des agitateurs de tous bords", a-t-il jugé.
Pour un policier qui s'exprimait sous couvert d'anonymat, l'attaque de Viry-Châtillon a simplement été "la goutte d'eau qui a fait déborder le vase".
L'adjoint de sécurité de 28 ans, le plus grièvement touché lors de ces violences et toujours hospitalisé, "n'est plus sous assistance respiratoire et les médecins ont commencé à le sortir progressivement de son coma artificiel", a indiqué à l'AFP une source policière.
"Il a pu parler hier à sa famille", a indiqué cette source, assurant que les médecins "sont de plus en plus optimistes".