Château-Thierry : comment gère-t-on maladie mentale et détention ?

La maison d'arrêt de Chateau-Thierry, qui accueille essentiellement des malades psychiatriques, a récemment été pointée du doigt par un rapport dénonçant ses conditions de détention et de soins indignes. Qu'en est-il réellement ?

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Cet été, un rapport accablant sur l'état et les pratiques dans la maison centrale de Château-Thierry a été rendu public. Les contrôleurs avaient constaté, entre autres, le recours "fréquent" à une "pratique illégale" depuis 2011: les injections forcées, avec l'aide de surveillants équipés de tenues pare-coups et de boucliers. 

L'émotion passée, des questions se sont posées : que fait-on de nos malades ? Peut-on vraiment soigner en détention ? Restée muette jusqu'ici, l'administration pénitentiaire nous a donné un accès exceptionnel à cette prison à mi-chemin entre détention et hôpital psychiatrique.

Enquête réalisée par Pierre-Guillaume Creignou, Thomas Porlon et Fabien Desgardins ; avec Frédéric Lopez, directeur du centre pénitentiaire de Château-Thierry ; Nathalie Longuet, psychologue ; François Bès, coordinateur pôle enquêtes à l'Observatoire international des prisons ; Par téléphone : Docteur Gilles Uzzan, ancien chef du pôle psychiatre ; Renald Champrenaut, premier surveillant ; "Boubou", détenu ; Photos : contrôleur général des lieux de privation de liberté ;

Pour François Bès, coordinateur du pôle enquêtes à l'Observatoire international des prisons, cet établissement "n'est pas un lieu de soin". "Il existe des possibilités d'aménagement ou de suspension de peine" en cas de maladie mentale, indique François Bès, "mais ce n'est pas utilisé, on maintient en détention."

Soigner ces détenus hors-normes, c'est pourtant la mission de cet établissement. Elle n'est pour le moment pas remise en cause, et ne doit pas l'être, selon Gilles Uzzan, le médecin en charge de l'unité sanitaire à l'époque du rapport. "Ils ont interrogé des patients qui vivent l'incarcération comme une persécution. Lorsque vous interrogez des patients en dehors d'un contexte de soin, vous avez malheureusement des réponses qui sont faussées".  

En première ligne derrière les murs, les surveillants. Ils n'ont pas de formation particulière mais sont plus nombreux qu'ailleurs. Renald Champrenaut sort d'un entretien avec un détenu pour lui rappeler les règles de base de l'hygiène à la fois corporelle mais aussi de son environnement. "Il est lucide 5 minutes sur un entretien d'un quart d'heures... On lui parle d'hygiène il nous parle de religion, de prières, de libération... À mon avis, la prise en charge est bonne mais il ne faudrait pas qu'on lâche ne serait-ce qu'un tout petit peu... Heureusement que l'unité sanitaire est derrière nous... Et encore, ce que l'on fait c'est très chronophage", déplore le surveillant.

Château-Thierry oeuvre dans l'urgence et à hauteur de ses moyens. En août, la ministre de la Santé avait dit se heurter à un "facteur de difficulté majeure": le manque de praticiens dans l'Aisne et la "faible attractivité" du milieu pénitentiaire pour les médecins. 

Que fait-on de nos détenus malades ? La question s'avère être à la fois sociétale... et politique.


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