Des chercheurs toulousains parviennent à faire naître des neurones tout neufs pour soigner le cerveau âgé

C'est une découverte qui pourrait s'avérer essentielle dans le traitement de certaines maladies neurodégénératives, notamment celles liées au vieillissement. Des chercheurs toulousains ont réussi à stimuler des cerveaux de souris pour leur faire produire de nouveaux neurones. 

Peut-on utiliser des cellules souches du cerveau adulte pour ralentir le vieillissement cérébral et enrayer les problèmes cognitifs liés à l’âge ou aux maladies neurodégénératives ? Deux chercheurs toulousains ont fait un premier pas en ce sens. Claire Rampon et Kevin Richetin viennent de montrer qu'il est possible de stimuler la naissance de nouveaux neurones dans le cerveau de souris atteintes de la maladie d'Alzheimer et de permettre à ces animaux de recouvrer leurs capacités à se souvenir. Leur étude sera publiée prochainement dans la revue scientifique Brain

L'étude de la mémoire

Au Centre de recherches sur la cognition animale du CNRS et de l'Université Paul Sabatier, on s'intéresse au processus de la mémoire. "On essaie de comprendre comment la mémoire fonctionne", explique Claire Rampon, "où elle se stocke, comment elle s'encode, quels processus cellullaires, moléculaires ou biochimiques agissent pour fabriquer une trace de souvenir et pour le garder". Avec son équipe, elle s'est aussi attachée à comprendre ce qui se passe quand le processus de mémoire fonctionne mal.

L'hippocampe, le lieu où la mémoire s'encode

On sait depuis une quinzaine d'années maintenant que le cerveau des mammifères continue à produire de nouveaux neurones au cours de la vie adulte. Des cellules souches neurales présentes dans deux régions du cerveau peuvent se diviser, se multiplier et donner naissance à de nouveaux neurones qui s'intègrent dans les circuits cérébraux existants. Ce processus, appelé neurogenèse se produit notamment dans l’hippocampe, une région essentielle pour la mémoire, selon Claire Rampon puisque "c'est le siège de la mémoire spatiale, le lieu où elle s'encode."

Réveiller une armée endormie

Une diminution drastique de cette neurogenèse est observée dans le cerveau atteint de la maladie d’Alzheimer chez l’homme et chez l’animal, comme si les cellules souches de l'hippocampe étaient en sommeil. L'équipe de Claire Rampon s'est attachée à découvrir si on pouvait remédier à une pathologie neurodégénérative en utilisant cette réserve de cellules souches et en la stimulant. "On s'est dit que le cerveau a peut-être gardé cette armée pour se battre et qu'on pourrait aller titiller ces cellules souches pour les forcer à se mettre en marche et à produire des neurones pour restaurer une fonction de mémoire".

Une expérience sur des souris âgées, atteintes de la maladie d'Alzheimer

Claire Rampon et Kevin Richetin ont travaillé avec des souris âgées chez lesquelles ils ont introduit des mutations génétiques identiques à celles relevées sur certains patients atteints de la maladie d'Alzheimer. Ils ont ensuite stimulé artificiellement les cellules souches présentes dans leur hippocampe pour voir si elles pouvaient faire naître de nouveaux neurones et recouvrer la mémoire.
"Nous avons employé une forme de thérapie génique", explique la chercheuse du CNRS, "avec un virus modifié qui peut entrer dans le noyau de la cellule, dans son ADN et qui lui injecte un gène qui la force à devenir neurone". Trois semaines plus tard, les nouveaux neurones se sont développés comme des petits arbres dans le cerveau des souris, grâce à leurs branches, ils pouvaient recevoir des messages des neurones voisins.
Et les souris malades ainsi traitées "n'avaient plus de problème pour retrouver un objet qui avait été déplacé lors d'un test de mémoire spatiale. Elles produisaient les mêmes performances que des souris non malades".

Une étude pleine de promesses 

Cette étude démontre pour la première fois qu’en dépit des perturbations massives présentes dans le cerveau atteint de maladie d’Alzheimer, l’expression ciblée d’un seul gène dans les cellules souches du cerveau adulte permet d'améliorer la mémoire des animaux malades. L’originalité de ces résultats réside dans le fait qu’ils révèlent le fait que le cerveau peut recouvrer ses fonctions cognitives grâce à l’augmentation de la plasticité et de la connectivité des nouveaux neurones plutôt que par l’augmentation de leur nombre : "on a utilisé le potentiel du cerveau âgé et malade. On n'a pas injecté des cellules souches, on a boosté leurs capacités. On a produit assez peu de neurones et ça change tout au niveau de la capacité de mémoire" détaille Claire Rampon.

Une avancée majeure

Cette avancée pourrait s'avérer majeure, à terme dans le traitement des maladies neurodégénératives en ouvrant la voie à de nouvelles méthodes thérapeutiques s'appuyant sur la thérapie génique. On est cependant encore loin de l'étude sur l'homme. L'équipe de Claire Rampon va poursuivre ses recherches sur d'autres populations de souris : des animaux sains ou atteints d'autres formes d'Alzheimer.

Un formidable potentiel

En attendant, elle y voit un formidable espoir : "notre étude montre que le cerveau âgé ou malade garde ses capacités. S'il n'arrive pas à les exprimer, c'est à nous d'aller les chercher. Il faut changer notre regard et il faut le dire aux personnes âgées : il faut stimuler ce potentiel".
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