Grande-Synthe, ancienne cité-dortoir créée pour la sidérurgie, et Loos-en-Gohelle, ex-ville minière, s'affichent comme laboratoires du développement durable, multipliant les initiatives originales que découvriront des délégations officielles lors de la Cop 21 en décembre.
"Les gens qui sont partis jeunes de Grande-Synthe et qui reviennent ici sont perdus !", lance Damien Carême, maire écologiste de cette ville de 22.000 habitants entourée de quatorze usines Seveso et de l'une des plus grandes centrales nucléaires d'Europe.
Près de quarante délégations sont déjà venues en 2015 participer au "DD tour (développement durable, ndlr)" pour prendre la mesure des transformations opérées dans cette ville surgie à la fin des années 1950 pour l'implantation d'Usinor.
Les longues et sinistres barres d'immeubles ? Remplacées par des éco-quartiers. Les repas aux cantines ? 100% bio. Les 2x2 voies qui traversaient la ville ? Rétrécies, avec des chemins équestres et cyclables. Quant aux immeubles, ils accueillent dorénavant des jardins partagés. Et des chevaux sont utilisés pour l'entretien des espaces publics.
"Ce sont les collectivités qui sont à même de mettre en oeuvre les solutions pour éviter le dérèglement climatique, car c'est nous qui décidons de l'urbanisme, de la présence de la nature en ville, du transport", estime M. Carême. "On se sert de tout ce que peut nous apporter la nature", appuie-t-il en montrant un mur anti-bruit végétal.
Sur la façade d'une maison de quartier figure un drapeau vert, semblable à celui utilisé d'habitude le long des plages, qui permet d'alerter la population sur la qualité de l'air. Simple gadget ? Pas tout à fait : quand le drapeau est rouge, les bus sont gratuits. Et dans cette ville qui compte 63% de logements sociaux, de nombreuses habitations sont équipées de bardages en bois, "ce qui permet de créer une filière bois régionale afin d'aider à replanter des forêts dans la région et de donner des débouchés économiques", plaide M. Carême.
Panneaux photovoltaïques sur l'église
A 100 km plus au sud, c'est Loos-en-Gohelle, blotti au pied des deux terrils parmi les plus hauts d'Europe, qui suscite l'intérêt des adeptes de la "révolution verte". "Notre ville était issue de l'univers du charbon et ce monde s'est arrêté. On avait un problème de futur comme au Far West, avec la fin de l'or", explique Jean-François Caron, maire EELV depuis 2001 de Loos-en-Gohelle.Cette commune est érigée en exemple par l'économiste américain Jeremy Rifkin, associé depuis 2012 à la région et à la chambre de commerce Nord-Pas-de-Calais dans son programme de "troisième révolution industrielle", qui labellise 275 projets dans tous les
secteurs. "Notre vision était de passer de la ville du charbon, non durable, à la ville durable qui respecte les hommes et l'environnement, tout en créant de l'activité et du développement", dit-il.
Ainsi, la toiture de l'église de cette commune de 7.000 habitants est réalisée en panneaux photovoltaïques, avec un compteur à côté du porche qui affiche "CO2 évité, 9465 kg".
A côté de la mairie, sur un gazon, c'est un panneau "cultivons le goût, servez-vous" qui attire l'attention. "j'ai repéré du fenouil, je vais me servir !", se félicite Monique, entourée de cubes de bois où poussent plantes aromatiques et légumes. De même, des arbres fruitiers ont été plantés dans toute la commune.
Pour autant "Loos n'est pas un eldorado", souligne l'édile, avec un taux de chômage de 17% et plus de 60% des habitants qui ne payent pas l'impôt sur le revenu. "Mais on montre qu'on s'engage et que l'on peut retrouver le sourire", glisse l'élu, qui voit "comme une consécration" la venue d'une délégation de 1.000 personnes le 3 décembre, parmi lesquelles, peut-être, François Hollande.