La double explosion survenue mardi sur le site pétrochimique à Berre-l'Etang (Bouches-du-Rhône) pose de nouveau la question de la difficile sécurisation des sites industriels sensibles, dits Seveso, et notamment la prévention d'actes criminels ou d'attentats.

"Le risque zéro n'existe pas. Si quelqu'un veut vraiment être nuisible, cela va être difficile de l'arrêter. Il faut prendre acte qu'on est dans un environnement qui a fondamentalement changé depuis trois ans", estime Philippe Prudhon, directeur du département des affaires techniques à l'Union des industries chimiques (UIC).

Pour France Nature Environnement, une fédération d'associations de protection de l'environnement, "durant les quinze dernières années, on s'est surtout posé la question des accidents qui peuvent se produire sur les sites industriels lorsque quelque chose dérape, beaucoup moins sur ce qui peut se passer si quelqu'un essaye d'y venir pour déposer une bombe", renchérit Maryse Arditi, membre du directoire sur les risques industriels.

Mercredi, la piste criminelle se précisait dans l'enquête sur les explosions et les incendies qui ont touché un site du groupe LyondellBasell, classé Seveso haut, avec la découverte d'éléments qui pourraient constituer un système de mise à feu.

Deux semaines plus tôt, le 26 juin, un autre site classé Seveso (seuil bas) avait été la cible d'un attentat mené par un chauffeur-livreur de 35 ans, qui avait assassiné et décapité son patron avant de tenter de faire sauter l'usine.

Le gouvernement avait alors immédiatement demandé une "vigilance maximale" et "renforcée" sur tous les sites Seveso. Une réunion est prévue
vendredi après-midi au ministère de l'Ecologie entre le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, Ségolène Royal et les industriels pour examiner les mesures à prendre.

Consignes aux préfets

Mardi, Bernard Cazeneuve a demandé aux préfets de prendre "immédiatement" attache avec les responsables des sites industriels sensibles, pour procéder "sans délai à une inspection minutieuse des installations, à la vérification de l'intégrité de leur enceinte et du bon fonctionnement des dispositifs de vidéoprotection".

Les industriels devront "exercer une vigilance particulière au cours des jours et nuits à venir pour renforcer leurs dispositifs de sécurité et de surveillance internes", ordonne M. Cazeneuve, qui exige le renforcement des rondes et patrouilles aux abords des sites par les forces de l'ordre. Mais ces consignes de sécurité se heurtent à l'étendue des sites à protéger.

"On peut pas mettre des policiers devant tous les sites à risque. Quant à la vidéosurveillance, il faut voir l'étendue de certains sites qui peuvent s'étendre sur 200 hectares", explique Mme Arditi. "Même avec une caméra tous les cinquante mètres, si un type a décidé de passer, il sera difficile de l'en empêcher."

En France, on compte 1.171 installations classées Seveso car comportant des risques d'accidents importants. Ces sites sont les plus règlementés
qui existent en matière de sécurité. "Depuis Vigipirate, un certain nombre de mesures ont été renforcées pour assurer une plus grande sûreté en amont sur les sites industriels, pour s'assurer par exemple que n'importe qui n'a pas accès au site", a ajouté M. Prudhon.

Toutefois, selon lui, les exploitants des sites ne peuvent pas tout connaître des personnes habilitées à rentrer. "La loi ne le permet pas. Le casier judiciaire, la nationalité, ça ne se demande pas." De plus, la dernière version de la directive Seveso, entrée en vigueur en juin, créant de nouvelles obligations en matière d'information au public, suscite l'inquiétude des industriels. "On a demandé de la transparence, de tout mettre sur internet. Mais il va falloir se poser la question de la pertinence de l'exigence de transparence, compte tenu des derniers événements", estime M. Prudhon.

Pour France Nature Environnement, la "question de la sous-traitance pose également problème". "Il y a sur ces sites énormément de travaux qui génèrent beaucoup d'allers et venues avec énormément de sous-traitants" et les "contrôles s'avèrent souvent difficiles".
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