La collection de romans policiers de l'après-guerre, Série Noire, initialement confiée à Marcel Duhamel par Claude Gallimard, célèbre cette année son 70e anniversaire. Le manifeste établi par son fondateur continue d'influencer la ligne éditoriale de la collection.
En septembre 1945 allaient paraître chez Gallimard les trois premiers titres au rayon noir, dont deux de Peter Cheyney. La Môme vert-de-gris et Cet homme est dangereux. Claude Gallimard confia en 1948 la collection à Marcel Duhamel qui allait en établir le manifeste, et sur lequel reposerait bientôt la responsabilité de Série Noire.
«Que le lecteur non prévenu se méfie : les volumes de la "Série noire" ne peuvent pas sans danger être mis entre toutes les mains. L'amateur d'énigmes à la Sherlock Holmes n'y trouvera pas souvent son compte. L'optimiste systématique non plus. L'immoralité admise en général dans ce genre d'ouvrages uniquement pour servir de repoussoir à la moralité conventionnelle, y est chez elle tout autant que les beaux sentiments, voire de l'amoralité tout court.
L'esprit en est rarement conformiste. On y voit des policiers plus corrompus que les malfaiteurs qu'ils poursuivent. Le détective sympathique ne résout pas toujours le mystère. Parfois il n'y a pas de mystère. Et quelquefois même, pas de détective du tout. Mais alors ?... Alors il reste de l'action, de l'angoisse, de la violence — sous toutes ses formes et particulièrement les plus honnies — du tabassage et du massacre. Comme dans les bons films, les états d'âmes se traduisent par des gestes, et les lecteurs friands de littérature introspective devront se livrer à la gymnastique inverse. Il y a aussi de l'amour — préférablement bestial — de la passion désordonnée, de la haine sans merci. Bref, notre but est fort simple : vous empêcher de dormir.» écrivait Marcel Duhamel en 1948.
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