A Oyonnax, un moniteur d'auto-école est engagé dans une bataille judiciaire pour une amende dont il écope pour avoir téléphoné pendant un cours de conduite. Pour lui, c'est son professionnalisme qui est en jeu.
Si la loi interdit strictement le portable au volant, elle est moins précise quand c'est un moniteur d'auto-école qui est concerné. Et pour cause, il n'a que les pédales à sa disposition.
Dans le département de l'Ain, un enseignant de la route s'est ainsi vu dresser un PV alors qu'il répondait à un appel. Son affaire s'est terminée devant le tribunal de police de Nantua, où il a été condamné à 200 euros d'amende. Mais, dans les 10 jours qui ont suivi, Michel a fait appel. Une question de principe. Pour lui, le législateur qui a révisé la loi en 2015 aurait dû parler du statut particulier des moniteurs. Il n'a pas trouvé bon de le faire.
Et c'est aujourd'hui son professionnalisme qui est pris pour cible. "Ça fait 10 ans que je fais ce métier, et je n'ai jamais eu d'accident responsable. La seule casse subie venait d'un automobiliste qui téléphonait au volant!", le comble.
"Le jour où un agent m'a repéré, j'étais à l'arrêt avec mon élève qui marquait un stop. Face à nous, il y avait un bouchon, on ne pouvait donc pas avancer, c'est pour ça que j'ai répondu à ma patronne qui devait m'informer d'un changement pour le cours suivant."
Et pour les parents qui assument la conduite accompagnée?
Pourtant, le tribunal l'a reconnu "coupable", le considérant comme co-conducteur. Tout en rappelant que le conducteur est "la personne qui assume la direction du véhicule". "Je n'ai pas le volant, donc on ne peut pas dire que j'assume la direction du véhicule!", rétorque Michel, "est-ce qu'on accepterait que je conduise seul à la place passager? Non, je ne pense pas."Différents syndicats de la profession ont pris position en faveur de Michel. Ils ne souhaitent que la jurisprudence fasse son chemin en la matière. "Ça voudrait dire que même un parent qui est au côté de son enfant dans le cadre de la conduite accompagnée, pourrait être verbalisé s'il téléphone", note Francine Morand, représentante du CNPA dans l'Ain. "Ce qui me dérange, c'est qu'on nous cherche des ennuis alors qu'il n'y a jamais eu d'accident suite à l'utilisation d'un portable par un moniteur. Évidemment, on ne va pas passer une heure de cours au téléphone, ce sont des appels brefs, la plupart du temps pour garder un lien avec le bureau ou nos élèves."
Ce dossier pose aussi la question des patrons d'auto-écoles qui travaillent seuls. "S'ils ne peuvent pas recevoir un appel, comment font-ils pour gérer leur clientèle", demande Michel.
Si l'on dézoome, on peut aussi penser aux inspecteurs du permis qui travaillent désormais avec des tablettes connectées en main.
Reportage Franck Grassaud et Benjamin Métral