Plus un enfant habite à proximité d’une grande parcelle de vignes, plus ses probabilités de développer une leucémie sont élevées. Un nouveau lien entre santé et pesticides dévoilé par une étude de l’Inserm.
La surface des vignes en question et non leur simple présence. Un nouveau lien de causalité a été révélé entre santé et pesticides par une étude publiée ce mercredi 17 octobre de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). L'exposition aux pesticides est, en effet, suspectée d'être un facteur de risque de cancers pédiatriques.
"En moyenne, pour chaque augmentation de 10% de la part couverte par les vignes dans le périmètre de 1.000 mètres, le risque de leucémie lymphoblastique", la plus fréquente, "augmente de près de 10%", détaille l'Inserm.
Pas plus de risque à moins d'un kilomètre à la ronde
Néanmoins, selon cette étude un enfant n'a pas plus de risque de développer une leucémie quand il habite près de vignes, à moins d'un kilomètre à la ronde.
“Forcément il y a des conséquences. Si on ne veut aucun souci, il faut arrêter les pesticides. Par contre, on perdra nos récoltes ou alors il faut que les recherches avancent pour avoir des plants de vignes plus résistants. Mais ça ne va pas se faire en 1 jour”, déplore un vigneron ardéchois qui assure utiliser des pesticides le matin très tôt et le soir tard quand les personnes vivant aux alentours sont chez elles.
L’Ardèche, territoire moins impacté ?
“En Ardèche, les parcelles de vignes sont assez diffuses. À la louche, il y a 7000 hectares cultivés sur les 500 000 de l’Ardèche. Pour comparer, Bordeaux c’est 90% du territoire en vignes. C’est la dose de produits phytosanitaires qui fait le poisson”, détaille Pierre Champetier, ancien président de l’IGP Ardèche, dont la maison est à la lisière de son exploitation sans qu’il ne se soit jamais inquiété pour sa santé.
Même constat pour Philippe Dry, directeur de la coopérative des vignerons d’Ardèche : “A notre échelle en Ardèche, on a peu de pression agricole et urbaine par rapport à la région bordelaise par exemple”, avant d’ajouter : “Cependant, mes vignerons ont l'impression d’être entraînés à utiliser des produits chimiques pour produire plus. On souffre du mal qu’on a créé nous-même avec cette envie de grands rendements et de monoculture”.
Si le président de cette coopérative liste quelques solutions comme l'allégement des cultures ou le recours à l'agriculture biologique pour limiter les produits chimiques, Philippe Dry regrette l’extension de l’urbanisation : “On étend de plus en plus les zones urbaines, donc elles sont de plus en plus proches des cultures même s'il existe des réglementations”.
Des disparités en fonction des régions
Selon les régions, les résultats se révèlent hétérogènes, avec des associations plus nettes entre le risque de leucémie pédiatrique et l'habitation près de vignes en Pays de la Loire, Grand-Est, Occitanie, ou Provence-Alpes-Côte d'Azur-Corse.
Nouvelle-Aquitaine n'apparaît pas dans ce cas. "Ce résultat nous surprend un petit peu" pour une région "très viticole, avec beaucoup d'enfants à proximité de vignes", a reconnu Stéphanie Goujon, pour laquelle "peut-être que l'indicateur n'est pas optimal pour cette région". Elle appelle plus globalement à la prudence sur "l'interprétation des résultats régionaux".
Pour l'heure, le choix a été fait de se focaliser d'abord sur la viticulture, culture "pérenne, plus clairement identifiable que des cultures soumises à des rotations, par exemple", et associée à de "nombreux traitements phytosanitaires".
Les travaux vont continuer pour analyser d'autres cultures, avec notamment "un travail très long pour prendre en compte la variabilité annuelle", d'autres types de cancers, mais aussi évaluer les expositions aux différents pesticides utilisés sur les cultures.