Après deux hivers gâchés par le Covid-19, les stations alpines françaises attendent beaucoup de la nouvelle saison de ski, qui débute ces prochains jours. Elles l'espèrent prometteuse malgré la contrainte du masque dans les remontées mécaniques.
À en croire les exploitants, les skieurs, français ou étrangers, sont impatients de retourner dévaler les pistes. D'autant qu'une belle couche de neige est tombée début novembre sur les Alpes, où les premières ouvertures de stations sont prévues mi-novembre.
Et bien que la pandémie de Covid-19 regagne du terrain, l'horizon s'est éclairci en matière de protocole sanitaire : après des semaines d'hésitation, le Premier ministre Jean Castex a dévoilé, samedi 6 novembre, un dispositif prévoyant le seul port du masque dans les files d'attente et télécabines. Le pass sanitaire ne deviendra obligatoire qu'en cas de dégradation sanitaire.
Ce dispositif est similaire à celui mis en place en Suisse. L'Italie voisine a, pour sa part, choisi d'imposer d'emblée le masque et le pass sanitaire. En Autriche, seules les personnes vaccinées ou guéries pourront emprunter les remontées mécaniques.
D'importantes réservations
La décision du gouvernement français ne lève pas toutes les incertitudes, notamment celles pesant sur la conformité aux normes européennes du pass sanitaire des Britanniques (un quart de la clientèle étrangère en France). Mais elle permet de se projeter dans la durée, se félicitent les acteurs du secteur qui avaient très mal vécu la fermeture des remontées mécaniques tout l'hiver dernier.
"C'est une bonne nouvelle pour la montagne. Aujourd'hui, on va pouvoir ouvrir nos stations dans la globalité", résume Jean-Marc Silva, directeur de l'association France Montagnes, qui fédère les professionnels français du tourisme de montagne.
On sent une envie de se faire plaisir.
Eric Bouchet, directeur de l'office de tourisme des 2 Alpes.
Les derniers chiffres de réservations compilés par le cabinet spécialisé G2A remontent à début octobre mais inspirent "confiance" à ce stade, explique-t-il. Ils montrent un recul de 7 % par rapport à 2019/2020, saison qui s'annonçait "exceptionnelle" avant d'être brutalement interrompue par la pandémie.
Mais ce retard est désormais "en train d'être rattrapé" grâce aux images de neige fraîchement tombée et aux annonces du gouvernement, souligne Jean-Marc Silva.
Eric Bouchet, directeur de l'office de tourisme de la station des 2 Alpes, ouverte pendant les vacances de la Toussaint, est du même avis : "Ça se passe bien, les gens sont très calmes et portent le masque dans les remontées mécaniques". Côté réservations, "on sent une envie de se faire plaisir avec des gens qui prennent des 'paniers moyens' en légère augmentation", explique-t-il.
"Attentes sociétales"
L'enjeu de cette saison est considérable pour la France, qui figure juste derrière les États-Unis et l'Autriche sur le podium des destinations de ski les plus prisées au monde, avec quelque 50 millions de journées-skieurs chacun. "C'est dans un mouchoir de poche, la concurrence va être très vive", note Jean-Marc Silva.
Selon le consultant spécialisé Laurent Vanat, les pays alpins européens captent à eux seuls 43 % du nombre mondial de skieurs, alors qu'ils ne représentent que 16 % du total de pratiquants. "Aucune autre région n'a une proportion aussi élevée de visiteurs étrangers", relève-t-il dans un rapport.
Pour ne rien laisser au hasard, l'industrie, assistée de l'agence de développement touristique Atout France, a lancé une vaste campagne de communication s'adressant à la fois aux clients européens et aux Français, une nouveauté.
Côté domestique, la campagne surfe sur l'appétence du public pour les thèmes liés à la nature, la santé ou les circuits courts, mis au goût du jour par la crise sanitaire : "Je pense que les valeurs intrinsèques de la montagne aujourd'hui correspondent aux attentes sociétales", souligne le directeur de l'association France Montagnes.
Le manque de saisonniers, toujours un problème
Attirer plus de Français permettrait de compenser l'absence partielle des skieurs étrangers (28 % en moyenne du total en temps normal), qui pourrait durer encore trois ans, selon la profession. Les Chinois et les Russes notamment manquent toujours à l'appel.
Le manque de travailleurs saisonniers préoccupe également les exploitants. Certains, n'ayant pas pu travailler l'hiver dernier, "se sont reconvertis dans d'autres destinations ou projets professionnels. C'est une vraie perte de gens formés par la station", regrette Eric Bouchet, le directeur de l'office de tourisme des 2 Alpes.
"C'est un challenge de plus. Nous avons encore un peu de temps avant Noël, mais c'est un vrai sujet", concède Jean-Marc Silva.