Avec les dernières remises de l'Etat et de Total sur le carburant, les stations essence situées à proximité de la frontière franco-suisse ne désemplissent pas en Haute-Savoie. Les automobilistes helvétiques en profitent eux aussi pour faire des économies à la pompe.
Une dizaine de voitures patiente tranquillement devant une station-service Total, à Annemasse (Haute-Savoie). Parmi elles, plusieurs arborent un drapeau suisse sur leur plaque d'immatriculation.
"Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait autant de monde et qu'on doive faire la queue au bord de la route", s'étonne une jeune femme au volant d'un coupé Volkswagen immatriculé à Genève. Un peu plus loin dans la file d'attente, un compatriote âgé de 45 ans. Il a profité de ses emplettes en France, où les produits alimentaires sont moins chers, pour faire un plein. "C'était vraiment à côté, donc j'en ai profité pour faire quelques économies à la pompe", explique-t-il.
Depuis une semaine, c'est le même manège qui se produit dans cette station-service, située à une quinzaine de minutes de la frontière franco-suisse en voiture. La fréquentation a même plus que doublé, atteignant désormais 1 700 personnes par jour, dont la clientèle helvétique occupe une part importante.
Une double ristourne aussi profitable aux Français qu'aux Suisses
En effet, nos voisins profitent eux aussi de l'entrée en vigueur le 1er septembre dernier de la remise de 30 centimes par litre d’essence allouée par le gouvernement. Et à cela s'ajoute la remise du géant pétrolier TotalEnergies de 20 centimes par litre en septembre et octobre.
"Avant, on pouvait avoir deux à quatre voitures sur dix de Suisse. Maintenant, on va avoir quatre à cinq voitures suisses sur dix", confirme à l'AFP Shana, employée de la station. Face à cet afflux de clients, la station-service haut-savoyarde se ravitaille désormais tous les jours, contre un jour sur deux auparavant. "On est même en recherche de personnel", déclare-t-elle.
Cette double ristourne représente "50 à 70 centimes par litre par rapport à la Suisse", calcule Michel Santos, Genevois de 41 ans. Soit une "belle différence", entre 30,9 et 41,2 euros pour un plein. Car si le litre de sans plomb ne coûte que 1,38 euros dans cette station, il atteint effectivement 2,17 euros quelques kilomètres plus loin, de l'autre côté de la douane.
"Une tempête dans un bidon d'essence"
Ces économies à la pompe sont les bienvenues pour les automobilistes suisses, dont le gouvernement n'a pour l'heure pas jugé nécessaire de mettre en place des mesures de soutien au pouvoir d'achat. Le pays frontalier est relativement épargné par l'inflation, limitée à 3,4% sur un an en juillet contre 6,1% en France.
De quoi raviver les tensions frontalières, récurrentes dans une région qui compte de nombreux travailleurs frontaliers français. "Il ne faut pas qu'on aide les riches, il ne faut pas qu'on aide nos amis Suisses. Il faut absolument qu'on aide les Français qui en ont le plus besoin", déclarait en août le sénateur UDI de Haute-Savoie, Loïc Hervé.
Une "tempête dans un bidon d'essence", lui avait répondu quelques jours plus tard Mauro Poggia, conseiller d'Etat du canton de Genève. "Pendant des décennies [...] tous les travailleurs frontaliers venaient faire leur plein en Suisse et pas en France parce c'était moins cher", rappelait-il, le carburant étant moins taxé chez les Helvètes.