"C'est un cataclysme" : face à l'explosion des cours du cacao, des chocolatiers contraints d'augmenter leurs prix

Déstabilisé depuis la crise du Covid, le marché mondial du cacao ne cesse de crisper les chocolatiers. Le prix des fèves a été multiplié par trois voire quatre en un an. Les coûts de production des chocolatiers explosent et les obligent à augmenter le tarif de leurs produits, comme la maison Bonnat de Voiron.

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Les mois se suivent et se ressemblent à la maison Bonnat de Voiron. Depuis plus de 140 ans, l'institution iséroise a été confrontée à de multiples évolutions du cours du cacao. Mais aujourd'hui, le chocolatier tire la sonnette d'alarme face à un prix qui ne cesse d'augmenter.

"Les cours du cacao ont augmenté jusqu'à 600 %"

Chaque année, le chocolatier confectionne des milliers de produits pour les amoureux du chocolat. Un savoir-faire reconnu par ses clients, qui nécessite 180 tonnes de matières premières. Mais depuis plusieurs mois, l'entreprise a vu ses coûts de production s'envoler en raison du prix des fèves de cacao importées depuis l'Afrique de l'Ouest.

"L'année dernière, nous étions à 3 dollars le kg. Au plus cher de ce mois-ci, nous étions à 12 dollars", s'alarme le maître chocolatier Stéphane Bonnat. Une explosion du cours qui devrait se poursuivre, selon les prévisions de récolte : "On annonce entre 400 et 700 000 tonnes de déficit de production cette année."

En cause, des pluies diluviennes survenues dans la région de production et une forte demande au niveau mondial. Pour le maître chocolatier Stéphane Bonnat, cette explosion des cours du cacao est aussi une conséquence de la spéculation financière.

"C'est un cataclysme depuis maintenant un an et demi. Les cours du cacao ont augmenté jusqu'à 600 % de manière très brutale. C'est lié à plusieurs phénomènes, mais principalement boursiers, liés à des petits opérateurs privés", regrette-t-il.

Conserver ses recettes authentiques

Depuis la crise sanitaire liée au Covid, le marché mondial du cacao est déstabilisé. Impuissants, certains chocolatiers se retrouvent contraints de répercuter les coûts sur leurs produits ou de changer de fournisseur.

La maison Bonnat refuse, elle, d'envisager un recours à un cacao à faible coût : "Ça ne marchera pas car la qualité n'est pas au rendez-vous. Nous ne sommes pas jugés sur nos prix mais sur la qualité des produits que l'on offre, à la fois au niveau du palais mais aussi en termes de santé."

L'entreprise assure ne pas avoir modifié ses recettes et notamment la teneur en cacao pour ne pas rompre "l'équilibre" de ses produits. Le chocolatier met en avant sa recette au cacao, beurre de cacao et sucre, sans aucun additif alimentaire comme la lécithine, émulsifiant ni d'exhausteur de goût.

Stéphane Bonnat dénonce un "lobby très puissant" qui encourage à augmenter cette part d'additifs : "En ce moment, la réglementation permet aux industriels d'appeler chocolat un produit dans lequel 5 % des matières grasses ajoutées peuvent être autre chose que du beurre de cacao".

15 % d'augmentation sur ses chocolats

Dans ce contexte d'explosion des cours de cacao, la maison Bonnat a dû revoir ses prix pour conserver une marge. Elle a dû se résoudre à une augmentation de 15 % de ses chocolats. "Une première" selon l'entreprise.

Malgré cela, les amoureux du chocolat continuent de pousser les portes de la boutique. "Généralement, j'achète le chocolat pour faire plaisir et pour la famille, voire de temps en temps pour ma consommation personnelle. Du coup, cela ne me dérange pas de payer un peu plus cher pour des produits de qualité", confie un consommateur.

Le chocolat, reste un produit très prisé. Selon une étude réalisée en 2022 par le Syndicat du chocolat, la France est le sixième pays le plus consommateur de chocolats au monde. Un Français dégusterait en moyenne 7,3 kilos par an de produits à base de cacao. Un plaisir auquel ils tiennent : "Ce serait bien que cela n'augmente pas trop quand même. Mais on se fait plaisir comme on peut", livre une cliente de la maison Bonnat.

Même si les achats se maintiennent, l'entreprise iséroise constate un changement des habitudes de consommation. "Les clients ont bien noté l'augmentation. Ils la comprennent. Mais pour certains, ça coince un peu. Ils achètent moins. Au niveau des tablettes par exemple, ils prennent une tablette de moins. D'autres prennent des ballotins et sacs un peu plus petits car au niveau de leur budget, c'est moins évident qu'avant", raconte Flavie Boissier-Bonnat, responsable du magasin Bonnat. 

Dans quelques mois s'ouvrira une période cruciale pour les chocolatiers. En moyenne, Noël et les fêtes représentent près de 50 % du chiffre d'affaires des chocolatiers. Malgré l'explosion des cours de cacao, la maison Bonnat ne souhaite pas augmenter à nouveau ses prix pour les festivités de fin d'année.

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