Le tribunal administratif a tranché : le nouveau règlement des piscines de Grenoble, autorisant le port du burkini, est suspendu. Les juges ont donné droit au référé laïcité déposé par le préfet de l’Isère. Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin s'est aussitôt félicité de cette décision. Eric Piolle, le maire de Grenoble annonce qu'il fera appel devant le Conseil d'Etat.
Le nouveau règlement des piscines de Grenoble, autorisant le port du burkini est donc suspendu.
Mercredi 25 mai, le tribunal administratif a donné droit au référé laïcité déposé par le préfet de l’Isère, Laurent Prévost , conformément aux instructions qu'il a reçues du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
Les auteurs de la délibération (...) ont gravement porté atteinte au principe de neutralité du service public
Extrait du jugement du tribunal administratif de Grenoble
Le tribunal a estimé qu’"en permettant aux usagers du service public communal des piscines de Grenoble de porter des tenues « non près du corps », sous la seule condition qu’elles soient moins longues que la mi-cuisse - comme c’est le cas notamment du burkini, c’est à dire en dérogeant à la règle générale d’obligation de porter des tenues ajustées près du corps pour permettre à certains usagers de s’affranchir de cette règle dans un but religieux, les auteurs de la délibération approuvant le nouveau règlement des piscines ont gravement porté atteinte au principe de neutralité du service public".
Une décision aussitôt saluée par Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur : "Excellente nouvelle : suite à notre recours, le tribunal administratif suspend la délibération de la mairie de Grenoble autorisant le « burkini » dans les piscines municipales grâce aux outils de la loi séparatisme voulue par Emmanuel Macron !"
Même satisfecit du côté de Marine Le Pen. La députée RN "se félicite" de la décision du tribunal administratif de Grenoble.
De son côté, le maire écologiste de Grenoble Eric Piolle annonce qu'il va interjeter appel devant le Conseil d'Etat.
Avant même la décision du tribunal administratif, l'association Alliance citoyenne - qui milite depuis plusieurs années pour le port de ce vêtement controversé, avait informé France 3 Alpes qu'en cas de suspension de la décision municipale, elle "porterait l'affaire devant le Conseil d'Etat".
Salle d'audience bondée
Durant l’audience, qui s’est tenue à 15 heures devant une salle bondée, chaque partie a défendu à tour de rôle ses arguments. Les avocats des deux parties se sont notamment affrontés sur le caractère religieux, ou non, de la décision prise par la Mairie de Grenoble.
Maître Leglise, représentante du préfet, a notamment déclaré qu’il fallait "requalifier" la délibération du Conseil municipal, "il n’y a aucun doute (…) il s’agit bien dans cette délibération d’une modification du règlement intérieur qui vise à autoriser" le port du burkini.
Face à cela, Me Aude Evin, représentant la municipalité, a cité en détails le nouveau règlement intérieur, ajoutant : "A aucun moment, le burkini n’est spécifié. (…) Le règlement s’applique à tout le monde peu importe le sexe".
À la sortie de l’audience qui a duré plus d’une heure, Me Aude Evin a remis en question l’action en justice de l'Etat : "Cette délibération ne met pas en cause l’ordre public. Je dirais même que c’est ce déféré préfectoral qui souffle sur les braises pour contester une délibération qui relève de l’organisation des services publics municipaux, qui en toute intelligence va permettre à tout le monde d’accéder au service public des piscines".
Des militants devant le tribunal administratif
Présents également au tribunal administratif, des manifestants s’opposant au burkini : "On pense que c’est une mesure qui répond à une demande communautaire et qui est en réalité hors du cadre républicain et des valeurs de notre pays (…) on espère que l’on va reculer là-dessus et que le burkini ne sera plus une option dans les piscines", déclare un militant, au micro de France 3 Alpes.
Aussi présente, des membres de l'association Alliance citoyenne : "Ce que veut attaquer le préfet, c’est juste la liberté des femmes de se vêtir comme elles veulent. C’est une lutte féministe que l’on mène aujourd’hui".
Rappel des faits
Pour rappel, lundi 16 mai, le Conseil municipal de Grenoble a adopté le nouveau règlement des piscines de Grenoble, autorisant ainsi le port du burkini, à une courte majorité de 29 voix pour et 27 voix contre.
Opposé à cette délibération, Laurent Prévost a saisi lundi 23 mai, le tribunal administratif par le biais d’un référé laïcité et d’un déféré annulation, conformément aux instructions qu'il a reçues du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
Dans un communiqué, Laurent Prévost affirmait que "cette délibération, dont l'objectif manifeste, est de céder à des revendications communautaristes et religieuses, paraît contrevenir au principe de laïcité posé par la loi de 1905 ainsi qu'aux dispositions de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République."
Le nouveau règlement devait entrer en vigueur le 1er juin.