Le hameau de La Bérarde, en Isère, touché vendredi par un phénomène de laves torrentielles, a été enseveli sous "14 mètres de boue et de rocs". Le président du parc national des Écrins appelle à une aide "urgente" de l'État, décrivant une situation "absolument dramatique pour la vallée du Vénéon".
"Ce drame terrible plonge toute une vallée dans une situation totalement inédite, à quelques jours à peine du démarrage de la saison estivale", déplore Arnaud Murgia, président du parc national des Ecrins.
La catastrophe s'est produite dans la nuit du jeudi 20 au vendredi 21 juin, au hameau de la Bérarde, dans la vallée du Vénéon, en Isère. Une centaine de personnes ont été évacuées en urgence par hélicoptère pour échapper à une crue torrentielle qui a tout emporté sur son passage. Les dégâts sont considérables. Le village a été enseveli sous "14 mètres de boue et de rocs", a indiqué le président du parc national des Ecrins jeudi 27 juin, lors d'un point presse.
Un drame écologique et humain.
Arnaud MurgiaPrésident du parc national des Ecrins
La catastrophe n'a pas fait de victimes à ce jour, selon la préfecture de l'Isère. Depuis, la zone a été bouclée. Et l'avenir du village est "en suspens" avec des habitations détruites, la route coupée et "200 à 300 emplois menacés", notamment parmi les guides de montagne et hôteliers, souligne Arnaud Murgia.
La situation est d'autant plus difficile que la vallée avait déjà connu à l'automne dernier des pluies torrentielles avec des dégâts très importants. À cette occasion, le ministère de la Transition écologique s'était "engagé oralement" à fournir 500 000 euros d'aides exceptionnelles, lesquelles n'ont pas été versées, regrette le président du Parc national. "Ce n'est pas parce qu'il y a eu dissolution de l'Assemblée nationale qu'il doit y avoir vacance de l'État", a-t-il plaidé, évoquant "un drame écologique et humain".
Une "énorme" poche d'eau glaciaire
Les causes du désastre n'ont pas encore été établies scientifiquement, seul un premier relevé topographique de la zone ayant pu être opéré à ce stade. Mais "on a de bonnes raisons de penser qu'une énorme poche d'eau glaciaire s'est effondrée et a contribué à l'impact" depuis un vallon à 3 000 mètres d'altitude, le tout conjugué à des pluies très fortes et à la fonte des neiges, explique Arnaud Murgia.
Vincent Koulinski, un des grands experts français en hydraulique torrentielle à Eaux torrents et rivières de montagne (ETRM), nous a expliqué la spécificité de cette crue torrentielle, caractérisée notamment par un apport de "matériaux très excédentaire, deux ou trois plus que la normale".
"La dangerosité" de la montagne aggravée par "le dérèglement climatique"
À la Bérarde, située à 1 700 mètres d'altitude, les boues, rochers et matériaux agglomérés au passage ont donné "14 mètres de hauteur de boues torrentielles", a ajouté le président du parc, pour qui cela donne "une idée assez précise et triste du phénomène".
"La montagne est un endroit dangereux" et "cette dangerosité est aujourd'hui aggravée par le dérèglement climatique, le réchauffement, les dégâts importants sur le permafrost (sol gelé en permanence)", responsables de phénomènes inédits, a encore observé Arnaud Murgia.
"Nous ne pourrons pas reconstruire de la même manière. [...] On voit bien que la montagne évolue plus vite que nous, et que nos infrastructures", a-t-il ajouté, appelant l'Etat à créer un "fonds pérenne" à destination des parcs nationaux de montagne, ainsi qu'à une "révision" de la loi montagne.