Ces dernières semaines, l'agglomération grenobloise a été le théâtre d'une série de fusillades entre trafiquants de stupéfiants, qualifiée de "guerre des gangs" par les autorités. Le secrétaire départemental du syndicat Alliance police nationale dénonce un manque de moyens humains qui pénalise la lutte contre le trafic.
Sept fusillades ont fait un mort et une dizaine de blessés en moins d'un mois dans l'agglomération grenobloise. Un regain de violence lié au trafic de stupéfiants et à la conquête de nouveaux points de deal très rémunérateurs, générant jusqu'à plusieurs dizaines de milliers d'euros par jour à Grenoble et Echirolles.
La dernière fusillade en date s'est produite le 22 août dans le secteur du Gâtinais à Echirolles, faisant un blessé par balle alors que les policiers avaient mené des contrôles et une opération de sensibilisation quelques heures auparavant dans un autre quartier de la commune.
"Ce qu'il faut, c'est une solution pérenne et non une solution au coup par coup pour répondre à ces règlements de comptes", plaide Yannick Biancheri, secrétaire départemental Alliance police nationale de l'Isère. "Bien souvent, on dit que Grenoble est un petit Marseille, mais j'ai envie de dire que Marseille est un grand Grenoble."
Le responsable syndical pointe du doigt un "manque de moyens humains" dans les rangs de la police, rendant leur intervention plus difficile dans les dossiers liés au trafic de stupéfiants.
Nouvelles mesures contre le trafic
"Mes collègues s'emploient à faire des enquêtes, à interpeller, à présenter des individus devant la justice (...). Quand on y arrive et qu'ils sont incarcérés, en découle soit une guerre de territoire, soit l'émergence d'une nouvelle tête de réseau. Il faut qu'on puisse occuper ces terrains pour éviter ces règlements de comptes et les dommages collatéraux", estime Yannick Biancheri, selon qui "115 effectifs" de police manqueraient à l'appel dans l'agglomération grenobloise.
Une affirmation démentie par le procureur de la République, Eric Vaillant, déclarant à France 3 Alpes que le secteur n'a "pas manqué d'effectifs pendant l'été". Le parquet de Grenoble entend par ailleurs intensifier la lutte contre le trafic de drogue avec notamment l'arrivée, le 2 septembre, d'un magistrat spécialisé en criminalité organisée.
Si on n'a pas les moyens humains, on ne pourra pas assurer la sécurité de tous les concitoyens.
Yannick Biancheri, secrétaire départemental Alliance police nationale de l'Isère
"On ne va pas lâcher. C'est extrêmement difficile de lutter contre les trafiquants. Il est quasiment impossible d’éliminer le trafic. Notre responsabilité est d’en limiter les effets pour les honnêtes gens", affirmait M. Vaillant le 15 août.
"Mes collègues sur le terrain ne peuvent pas intervenir en toute sécurité. Mes collègues en investigation sont noyés par la procédure et mes collègues de l'ex-PJ sont à l'agonie. Si on n'a pas les moyens humains, on ne pourra pas assurer la sécurité de tous les concitoyens", alerte toutefois le secrétaire départemental Alliance, qui espère un "choc d'autorité" dans la lutte contre le trafic.
"Harcèlement" et "déstabilisation"
Selon Jérôme Chappa, directeur interdépartemental de la police nationale de l'Isère interrogé par l'AFP, ce pic de violences peut s'expliquer par une conjonction de phénomènes, notamment les opérations de "harcèlement" et de "déstabilisation" menées par les forces de l'ordre sur les points de deal.
À cela s'ajoute le meurtre du caïd local Mehdi Boulenouane lors d'un probable règlement de comptes en mai dernier. "La nature ayant horreur du vide, les gens essaient de se réapproprier des points de deal lucratifs", souligne M. Chappa.
Depuis le début de l'année, 72 personnes ont été interpellées à Grenoble dans le cadre de contrôles antidrogue, selon la préfecture de l'Isère. La tension s'est accrue depuis le début de l'été avec la multiplication de fusillades dans l'agglomération. En réponse, les autorités ont annoncé un déploiement quotidien de forces de l'ordre sur plusieurs points de deal.