La grande famille des employés de Casino s'expose. Dix portraits de familles, réalisés par le photographe Christophe Beauregard, racontent leur histoire de salariés au sein du groupe. Parmi elles, la famille Yannacopoulos avec Roger, retraité après 30 ans de carrière.
Alors que le groupe Casino est menacé de disparition, la mairie de Saint-Étienne accueille une exposition photos mettant en valeur les salariés de l'enseigne. Ces portraits ont été réalisés à l'occasion des 125 ans du groupe, à l'été 2023, avant la crise que traverse l'enseigne.
Familles Casino
Ces dix portraits, réalisés par le photographe Christophe Beauregard, constituent l'exposition intitulée Casino, une vie de famille. Toutes ces familles ont en commun d'avoir travaillé ou de travailler encore pour le groupe stéphanois.
"Notre photo, je la trouve super, mais elles sont toutes superbes", assure Roger Yannacopoulos. Sur le cliché, ce grand-père pose avec sa fille et son petit-fils. Les trois générations affichent un beau sourire radieux et un geste du cœur.
Cette famille originaire de Firminy illustre à la perfection les "familles Casino". Le grand-père Roger a fait l'essentiel de sa carrière dans l'entreprise née Saint-Etienne. Sa fille Claire, enfant du personnel, a travaillé pour l'enseigne à l'occasion de jobs d'été, pendant ses études d'histoire, entre 1985 et 1990. Elle est attachée parlementaire. Le petit-fils Hugo, qui se destine à la finance, a fait un passage sous forme de stage chez Casino. Mais aussi à l'AS Saint-Etienne, souligne son grand-père. La grande maison a aussi aidé les familles de ses employés à grandir et à se faire une belle place dans la société.
Grande tristesse
La fin annoncée du groupe Casino dans lequel il a réalisé l'essentiel de sa carrière ne le laisse pas de marbre, bien au contraire : "j'ai beaucoup de tristesse. J'ai passé trente ans dans l'entreprise. J'ai beaucoup donné et Casino me l'a bien rendu. Que du bonheur", assure Roger Yannacopoulos. Il ne cache ni son attachement, ni sa fidélité à la grande maison stéphanoise. Un happy end pour Casino, l'ancien salarié n'y croit pas vraiment aujourd'hui.
"Le risque de disparition du groupe, c'est catastrophique pour moi. Je pense à tous mes collègues, qui travaillent au siège ou en centrale d'achat, je suis très triste. C'est un vrai gâchis", affirme Roger Yannacopoulos, aujourd'hui âgé de 80 ans. Même si ce dernier a pris sa retraite voilà 20 ans, il n'en est jamais vraiment parti. Il resterait même viscéralement attaché à cette entreprise "qui l'a nourri pendant 30 ans".
L'avenir s'annonce pourtant sombre pour les milliers de salariés de l'enseigne, aujourd'hui suspendus à des décisions qui dépassent la direction du groupe et les actionnaires. Roger Yannacopoulos n'en pense rien de bon, mais veut encore conserver un brin d'espoir. "Le monde de la finance a pris le pas. Je ne vois pas comment on peut relever 12 milliards de dettes. Je ne crois pas à une issue heureuse pour Casino, j'espère me tromper. Du fond du cœur, j'espère me tromper", explique le retraité.
Parcours professionnel
Comment expliquer un tel attachement à l'entreprise stéphanoise ? Roger Yannacopoulos a fait ses premiers pas dans le groupe en décembre 1971. "C'était avant l'ouverture du Géant Casino de Monthieu", explique l'octogénaire qui a travaillé en magasin durant quelques années avant d'être affecté à la création des centrales d'achat du groupe. Un parcours professionnel ascendant et beaucoup d'investissement personnel. Trois personnes l'ont d'ailleurs particulièrement marqué au sein du groupe, dont Gilles Pinoncély, dernier représentant de la famille Guichard à occuper un poste au sein du groupe.
"C'était une entreprise très sérieuse, avec beaucoup de contrôles, de vérifications...", se souvient le retraité. Ne rentrait pas n'importe qui chez Casino. Il fallait montrer patte blanche, mais surtout travailler d'arrache-pied. "On ne faisait pas les 35 heures. Il fallait beaucoup travailler, mais on était récompensés et on ne restait pas au bas de l'échelle", explique le retraité. Même si l'ancien salarié n'a pas chômé avant d'entrer dans le groupe Casino.
Aujourd'hui, Roger Yannacopoulos ne veut pas abandonner ses habitudes. Une question de loyauté, "tant que le groupe est encore en vie". Alors pour les "grosses courses", il se rend au Casino de La Ricamarie. Pour le quotidien, il l'avoue, c'est un peu la mort dans l'âme qu'il se rend chez un concurrent. Mais pas chez Intermarché !
(NB : Le groupe des Mousquetaires a pris possession de l'enseigne Casino du quartier Chazeau de Firminy à l'automne).
Avant la crise
Avant d'être présentés à l'Hôtel de Ville de Saint-Etienne, ces portraits de familles signés Christophe Beauregard ont déjà été exposés. Avant que la crise n'éclate au sein du groupe Casino. Début décembre, ils ont été installés dans le grand hall du siège social de Saint-Étienne, mais également à l’université Jean-Monnet de Saint-Etienne. L'exposition "Casino, une histoire de famille" a aussi été vue à Vitry-sur-Seine ainsi que dans certains magasins et entrepôts de l'enseigne.