Témoignage. "On était fier d'être mineur, c'était un métier d'homme", André Varenne, se souvient

Publié le Écrit par Dolores MazzolaCatherine Dol et Max Adelise

Les mineurs et les pompiers célèbrent leur sainte-patronne protectrice le 4 décembre. C'est tout particulièrement le cas à La Ricamarie, dernière ville minière de la Loire. Dans cette commune de l'agglomération stéphanoise, on honore encore la mémoire des mineurs de fond devant la statue de Michel Rondet.

La fête de la Sainte-Barbe est une date capitale sur le calendrier de La Ricamarie. Chaque 4 décembre, d'anciens mineurs déposent une gerbe devant la statue de Michel Rondet. Cette statue trône sur la place qui porte son nom, devant l’hôtel de ville. À la fin du 19ᵉ siècle, ce mineur ligérien a inspiré de nombreuses lois sur les délégués mineurs, sur l’emploi des enfants dans les mines et sur les caisses de secours et de retraite. Il était également secrétaire général du syndicat des mineurs de la Loire.

Devoir de mémoire

"Ce 4 décembre, c'est un moment important pour honorer la mémoire de ceux qui ont laissé leur vie dans les mines. Mais aussi en mémoire des luttes qui ont été menées. La corporation minière en avait énormément besoin, les conditions d'exploitation étaient très difficiles au début", explique Jean-Alain Barrier, ancien mineur ligérien.
Dans la Loire, et surtout dans l'Ondaine, on honore toujours la Sainte-Barbe, protectrice des mineurs et des pompiers. "Aujourd'hui, à la Sainte-Barbe, à Saint-Etienne, on oublie un peu le fond et ce que représentait la Sainte-Barbe pour les mineurs. Les pompiers la célèbre toujours. Mais c'est important ce jour-là de partager ce jour-là aussi avec les mineurs, de partager leurs souvenirs", explique un Ricamarois.

L'esprit de la mine

"Mon père a travaillé 35 ans au fond. La fête de la Sainte-Barbe, c'est primordial. Nous habitons dans une ville minière. On a été élevés dans l'esprit de la mine, du travail difficile. C'était le quotidien. Les mineurs disparaissent petit à petit, mais c'est important de garder cet état d'esprit", explique Alix, fille d'un ancien mineur de la Ricamarie.

Dans les années 50, on n'allait pas à l'école le 4 décembre. C'était un jour de fête. Les enfants dont les pères étaient mineurs ne venaient pas à l'école ce jour-là et 90% de la classe était concernée. Ce jour-là, on faisait un repas de famille un peu plus conséquent. Il y avait beaucoup de solidarité.

Alix, fille de mineur

La solidarité, c'est le souvenir le plus important qu'André Varenne, ancien mineur ligérien, tient aujourd'hui à conserver de son passé professionnel. "On était fier d'exercer ce métier extraordinaire, un métier d'homme", insiste-t-il.

Il était une fois... le Puits Pigeot

"On était alors à près de 1000 mètres sous terre", explique-t-il. "Les mines de la Loire étaient très grisouteuses", se souvient-il. Des conditions de travail particulièrement difficiles, mais "un métier extraordinaire". "On est fier d'exercer ce métier. Mineur ou marin, ce sont des métiers d'hommes".

André Varenne est descendu au fond pour la première fois à l'âge de 17 ans. "Je suis tombé sur une annonce des houillères de la Loire qui recherchaient des apprentis électro-mécaniciens. Moyennant un engagement de cinq ans, ils nous assuraient une formation", raconte-t-il.

Le septuagénaire est le dernier mineur à être remonté voilà 40 ans du puits Pigeot, au moment de sa fermeture. C'était le dernier puits de mine en activité sur le bassin houiller de la Loire. C'était aussi le plus profond. Aujourd'hui, il n'existe plus de traces physiques du puits.

André Varenne a vécu les années fastes, puis les heures sombres de l'exploitation minière à La Ricamarie. À partir de 1968, le puits Pigeot a permis de remonter à la surface toute la production de charbon de la Loire. "Le charbon extrait à Couriot et au puits Charles, à Roche-la-Molière, était acheminé par le fond jusqu'au puits Pigeot", raconte l'ancien mineur. "Le puits Pigeot tournait à plein régime, mais n'a jamais été exploité à 100% de ses capacités", assure le septuagénaire. En cause : le recul de l'exploitation du charbon.

Le puits Pigeot a été le dernier de la Loire en exploitation. La Ricamarie a été la dernière ville à être une cité minière. J'ai été embauché à Pigeot et je suis resté à Pigeot jusqu'à la fin de l'exploitation. Je n'ai pas connu d'autres puits.

André Varenne

Ancien mineur

Lorsque ce puits, le plus moderne de la Loire, a été menacé de fermeture, c'est le début d'un combat pour André Varenne devenu syndicaliste. Il a participé aux semaines de grève jusqu'à la fermeture à la fin de l'année 1983. Le coup de grâce est arrivé 6 ans plus tard, le 10 février 1989, à 16 heures 25 précises. Le puits de béton a été détruit. André Varenne a alors ressenti "une immense tristesse" : "c'était la fin d'une époque". 

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André Varenne, ancien mineur et Secrétaire général section CGT mineurs retraités, se souvient du Puits Pigeot. ©France tv

André Varenne a été l'un des derniers de sa génération à faire carrière dans les mines. Il a fini sa carrière en surface, à gérer les activités sociales des mineurs au sein des comités d'entreprise. Intarissable, il s'occupe du musée de la mine de La Ricamarie. C'est un peu sa deuxième maison. Plus confidentiel que celui du puits Couriot, son voisin stéphanois, mais plus engagé, ce musée met à l’honneur ceux qui descendaient des centaines de mètres sous la terre. Dès l'entrée du musée, c'est Sainte-Barbe qui accueille les visiteurs.

Sainte-Barbe est la sainte patronne de tous ceux qui travaillent avec le feu ou la foudre. La foudre renvoie au grisou, à la poudre et aux mineurs, c’est pour cela qu’elle est devenue la patronne des mineurs, mais aussi des artificiers, des artilleurs et des sapeurs-pompiers.

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