La récolte du miel de fleurs de printemps est mal engagée en Auvergne. Après un "faux départ" du printemps, le retour du froid ces dernières semaines gêne le travail des abeilles qui peinent déjà à se nourrir.
La saison apicole semblait bien lancée. Thermomètre à 25°C, éclosion des premières fleurs de printemps, abeilles de sortie pour butiner… “Les reines s’étaient même remises à pondre. Tout s’est arrêté subitement avec le retour du froid et de la pluie. Depuis deux semaines, c’est la cata, s’inquiète Louis Meurant du Rucher du Livradois, à Cunlhat dans le Puy-de-Dôme. Ce sont ces pointes de chaleurs précoces, suivies par une vague de froid, qui nous dérangent."
Famine chez les abeilles
En dessous des 12°C, les abeilles restent cloîtrées dans leur ruche et vivent sur leurs réserves en attendant les beaux jours. “Le problème est qu’à l’intérieur, elles n’ont pas grand-chose pour se nourrir. Si ces températures durent, il faudra intervenir avec un apport pour qu’elles puissent rester en vie”, poursuit l’apiculteur, propriétaire d’une douzaine de ruches qu’il surveille quotidiennement.
Dans un communiqué du 27 avril 2024, le Syndicat des apiculteurs du Cantal (Apicantal) indique avoir été informé de "mortalités de famine" dans des ruchers de la région Auvergne-Rhône-Alpes et appelle à la vigilance. "La région est vaste et fort différente suivant l’emplacement des colonies. À ce stade, rien ne peut laisser penser que dans le Cantal des situations similaires ne puissent pas exister ou se produire dans les jours à venir."
Sur les hauteurs de Saint-Poncy, la miellerie cantalienne Natur'Ailes, envisage de passer au nourrissement de ses essaims dès la semaine prochaine.
Le printemps a fait une sorte de faux départ, autant pour les végétaux que pour les animaux et insectes qui vivent sur le même cycle. Cela arrive de plus en plus souvent, dans toutes les régions de France.
Nicolas RouxApiculteur dans le Cantal
Aux ruchers de Saint Mayeul, l’une des plus importantes productions apicoles d’Auvergne, la perte causée par ces mauvaises conditions climatiques est estimée à 25% pour 2024. Le millier de ruches, dispersées entre l’Allier, la Nièvre et le Cher, produit entre 20 et 30 tonnes de miel lorsque l’année est “bonne”. "L'année 2023 avait déjà été mauvaise, avec une quinzaine de tonnes. Celle-ci devrait être équivalente... Toujours moins médiocre que 2021 et ses 8 tonnes”, compare Michel Bandon, à la tête de l'exploitation installée au Veurdre depuis 1930.
De l’espoir sur l’acacia
L'exploitant, qui possède encore des pots des années précédentes, s'estime chanceux. "Le miel est un produit qui se conserve bien. Nous, on arrivera à passer l'année comme ça mais pour les collègues qui n'ont pas de stock, cela risque d'être beaucoup plus compliqué", insiste-t-il. Certains apiculteurs vont devoir renoncer au miel de printemps polyfloral, l'un des plus apprécié par les consommateurs en raison de son goût très doux et fruité.
Il reste un peu d’espoir autour du miel d'acacia. "Quelques grappes sont sorties du côté de Vichy. On a une dizaine de jours de retard dans l'Allier", indique Michel Bandon. La saison est courte. Si une variété de fleurs passe, il faut miser sur la suivante. Une difficulté de plus pour la profession, déjà fragilisée par la concurrence étrangère. “Aujourd’hui, notre problème c’est la météo. Dans quelques semaines, ce sera les frelons asiatiques. Il faut toujours savoir s’adapter”, songe Nicolas Roux.