Sept victimes du père Preynat, qui ont obtenu réparation comme parties civiles au procès de l'ex-prêtre condamné pour agressions sexuelles sur mineurs en 2020 et insolvable, ne seront pas indemnisées par le Diocèse de Lyon. Annonce faite le jour de la publication du rapport de la Commission Sauvé.
Elles avaient obtenu réparation lors du procès de l'ancien prêtre Bernard Preynat, insolvable, qui a eu lieu en janvier 2020 à Lyon. Sept parties civiles ne seront finalement pas indemnisées par le Diocèse de Lyon. L'annonce, de cette décision du tribunal ecclésiastique, rendue le 28 septembre dernier, survient le même jour que la publication du rapport de la commission Sauvé sur les abus sexuels dans l'Eglise.
Les requérants, dont certains ont déjà été indemnisés - ou le seront - en partie par le Fonds de garantie de l'Etat, ont un mois pour faire appel et sont invités à saisir une nouvelle instance d'indemnisation qui sera installé par la Conférence des évêques de France (CEF).
Deux juridictions différentes
"Nul ne peut être puni pénalement à raison des mêmes faits par deux juridictions différentes. C'est ce qui empêche le tribunal canonique d'accorder un deuxième montant de dommages après ceux de l'Etat" à ces sept victimes, a-t-on expliqué au diocèse.
"Parmi les victimes de Bernard Preynat, il y a celles qui ont eu un jugement civil, de l'Etat, et qui ont été indemnisées par l'Etat. Et il y a les autres, qui n'ont pu être jugées par l'Etat, car les faits étaient prescrits. Celles-ci ont été jugées par un tribunal ecclésiastique qui leur a versé une indemnité. Donc toutes les victimes de Bernard Preynat ont été indemnisées", a souligné mardi 5 octobre devant la presse Mgr Olivier de Germay, archevêque de Lyon. "Les victimes qui ont été indemnisées par l'Etat se retournent aujourd'hui vers le tribunal ecclésiastique pour obtenir une indemnité. Le tribunal a répondé récemment que ce n'était pas possible pour des raisons juridiques," a précisé l'Archevêque de Lyon. Ce dernier a rappelé qu'il héritait d'une situation "un peu spécifique au Diocèse de Lyon". Olivier de Germay a été nommé à Lyon après la démission du Cardinal Barbarin. Il est en poste depuis neuf mois.
Toutefois, le prélat a précisé que les victimes avaient aussi une possibilité, celle de "s'adresser à la nouvelle instance qui est en train d'être mise en place par les Evêques, qui est l'instance nationale indépendante d'attribution."
Des victimes indemnisées par l'Eglise : une première
Outre ces sept victimes parties civiles au procès Preynat, quatorze autres, dont les faits étaient prescrits et qui ne pouvaient donc pas saisir le tribunal judiciaire, ont obtenu en décembre une indemnisation de l'Église sur une enveloppe globale de 169.500 euros.
Cette indemnisation, une première pour l'Église de France, avait été annoncée en 2020 après que le tribunal inter-diocésain eut reconnu le statut de "victime" à 21 anciens scouts agressés par Bernard Preynat entre 1971 et 1991 -sur environ 70 victimes répertoriées-, ayant adressé "une demande de réparation" à l'archevêché.
"Cette décision du tribunal ecclésiastique est une double sanction pour nous qui avons amené le scandale", a réagi Stéphane Hoarau, un des sept requérants déboutés par le Diocèse de Lyon. Ce dernier assure en outre n'avoir encore "rien touché" du fonds de garantie de l'Etat, qui doit se prononcer sur son cas en novembre. D'autres, comme François Devaux, le co-fondateur de l'association La Parole Libérée à l'origine du procès Preynat, refusent d'être indemnisés par l'Etat, jugeant que c'est à l'Eglise d'assumer ses responsabilités.
Onde de choc dans le Diocèse de Lyon
Le Diocèse de Lyon a réagi ce mardi, quelques heures après la publication du rapport de la commission présidée par Jean-Marc Sauvé portant sur les abus sexuels dans l'Eglise.
Le rapport de la Commission Sauvé rendu public mardi 5 octobre a recensé 76 auteurs d’abus sexuels (dont 49 sur mineurs) dans le Diocèse de Lyon de 1950 à nos jours. Mgr Olivier de Germay a demandé pardon aux victimes, au nom de l'Eglise.
En marge de la publication du rapport, lors de son intervention, Jean-Marc Sauvé a aussi appelé l’Église à apporter une "réparation" financière à toutes les victimes de violences sexuelles en son sein depuis 1950 en France. Il a insisté pour que cette indemnisation ne soit pas considérée comme "un don" mais comme "un dû".