Pédophilie dans l'Église : les vitraux du père Ribes décrochés à Sainte-Catherine

Dans le Rhône, à Sainte-Catherine, une nouvelle église a retiré ses vitraux réalisés par le père Louis Ribes. Ce dernier, accusé d'actes de pédophilie sur des enfants, aurait sévi dans les diocèses de Lyon, Saint-Etienne et Grenoble. Des faits commis pendant 40 ans, entre les années 1950 et 1990. Ses victimes réclament le décrochage des œuvres du prêtre.

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Surnommé pendant longtemps le "Picasso des églises", le père Louis Ribes, originaire de Grammond dans la Loire, était très connu pour ses vitraux colorés. Ses œuvres d'art sont dispersées à travers la Loire, le Rhône et l'Isère. Le religieux est accusé d'avoir violé et agressé sexuellement des dizaines, peut-être des centaines d'enfants. Des actes de pédophilie commis notamment lors de séances de pose et d'ateliers artistiques. 

Depuis bientôt deux ans, les victimes présumées du prêtre pédophile réclament la dépose et même la destruction de ses œuvres. Sainte-Catherine, petite commune des Monts du Lyonnais de moins d'un millier d'âmes, a accédé à cette demande. 

Des vitraux indésirables 

Dans l'église de Sainte-Catherine, ces vitraux mesurent plus de trois mètres de haut. Et c'est une véritable explosion de couleurs qui apporte de la chaleur dans cet édifice religieux aux murs blancs. Ces deux grands panneaux vitrés sont en très bon état et pourtant ils n'ont plus leur place dans ce lieu de culte. "Quand on dépose des vitraux, c'est généralement pour de la restauration. Ce n'est pas pour ne pas les remettre après. C'est la première fois que je vois ça", explique Julien Pitrat, le maître verrier à la manœuvre dans l'église de Sainte-Catherine pour démonter les vitraux dessinés par Louis Ribes.

Ce mardi 24 octobre, c'est au tour de la commune de Sainte-Catherine de procéder au retrait des deux derniers vitraux polémiques. L'église en comptait huit du même artiste. Ce chantier a débuté il y a un peu plus d'une semaine. Aujourd'hui, des victimes du prêtre pédophile étaient invitées sur place.  

"Ça me fait beaucoup de bien" 

"Il y a presque toujours des enfants sur ses productions et souvent les enfants sont au pied de l'adulte", explique Luc Gemet. Des enfants dans des poses suggestives. Alors voir ces œuvres tomber en disgrâce, c'est surtout une satisfaction et un soulagement pour les victimes de l'ecclésiastique pédophile qui ont fait le déplacement. Luc Gemet, membre du collectif et une des premières victimes déclarées, était parmi les personnes présentes dans l'église cet après-midi. Abusé très jeune jusqu'à l'adolescence, l'homme se dit encore hanté par ce qu'il a subi. Son regard ne lâche pas les grandes ouvertures. Luc Gemet peine à retenir son émotion à la vue des œuvres.  

Chaque fois que je vois une production de Louis Ribes, je revis mon calvaire. Là, voir quelque chose de tout blanc, c'est parfait ! Pour moi, c'est parfait ! Ça me fait beaucoup de bien. Ce qui me fait du bien, c'est quand je vois qu'il n'y a plus rien !

Luc Gemet

victime du père Ribes

Luc Gemet ne s'en cache pas non plus : il possédait quelques productions du père Ribes. Des cadeaux. "Je les ai détruites, ça m'a fait du bien. Ces vitraux, j'aimerais tout de même les détruire !"  À Sainte-Catherine, les vitraux seront remplacés par d’autres d'ici à la fin de l’année. De nouvelles œuvres sur le thème de l’eau et de l’apaisement.

Chantier prioritaire

C'est la mairie de Sainte-Catherine qui a donné son aval pour cette opération de démontage. Il faut rappeler qu'en France, le patrimoine religieux appartient pour une large part aux communes. C'est une spécificité issue de la Révolution française, 90% des églises catholiques sont la propriété des communes.

Si le montant de ce chantier est d'environ 36 000 euros, cette somme sera pourtant prise en charge par le Diocèse de Lyon. "Il y a une vraie volonté du diocèse de Lyon de prendre en charge à 100% le remplacement des vitraux. C'est une priorité", explique Laurence Robert, déléguée générale du diocèse de Lyon qui a fait le déplacement ce jour à Sainte-Catherine. Les fragiles vitraux du père Ribes seront conservés au Diocèse. 

Dans ce scandale des œuvres du prêtre pédophile, les autorités religieuses ont-elles toutefois tardé à réagir ? Pourquoi n'ont-elles pas agi avec diligence ? Du côté du diocèse, on se défend. "Le premier témoignage remonte à l'été 2021, le second au mois de novembre 2021. La décision de retirer ces vitraux a été prise à la fin de l'année 2021, mais la mise en place du retrait des vitraux a été plus longue" explique Laurence Robert. Une question de délais techniques. Il s'agissait non seulement de s'entendre avec les mairies, mais également de trouver des artisans et maîtres verriers. En revanche, le retrait d'un tableau de Ribes installé dans l'église a eu lieu dès le mois de mars 2022, souligne la représentante du diocèse. 

Sainte-Catherine n’est pas la première commune à bannir les œuvres du religieux. Dans le Rhône, les municipalités de Dième, Charly, Caluire ou encore Loire-sur-Rhône ont accédé à la demande des victimes présumées du "Picasso des églises". 

Givors fait de la résistance

Les victimes du prêtre réclament la mise à l'index de toutes les œuvres de Ribes. Elles demandent au maire de Givors de faire de même. "Nous remercions le maire Pierre Dussurgey d'être aux côtés des victimes. Nous demandons au maire de Givors de suivre l'exemple en procédant au retrait des vitraux de Ribes !", déclarent les deux collectifs dans leur communiqué du 9 octobre dernier. 

Dans cette commune de la Métropole de Lyon, une petite chapelle désacralisée depuis 40 ans compte deux vitraux du religieux. Ils représentent des scènes historiques locales. Des œuvres qui seraient presque passées inaperçues sans l'affaire Ribes. En avril dernier, le maire de Givors, Mohamed Boudjellaba, avait écrit une lettre au Pape François pour lui demander de prendre part au débat concernant le sort de ces œuvres. Le maire de Givors devrait recontacter le diocèse de Lyon à l'automne.

Faut-il détruire les œuvres du père Ribes ?

Si le maire de Givors entend garder la tête froide. Cette destruction, c'est le souhait des victimes du prêtre et elles s'en expliquent. "La destruction des productions de Ribes permet de mettre un terme définitif, sans retour possible, à cette histoire douloureuse. La simple pensée que les productions de Ribes puissent être un jour à nouveau exposées ravive la douleur et le traumatisme des victimes et de leurs familles", indiquent le collectif de victimes et Mouv'enfants. 

Pour les deux associations, "les victimes doivent être invitées à assister" à ces destructions. Enfin, ils réclament une prise en charge par l'Église catholique des frais de ces travaux qui ne doivent, selon eux, pas être réalisés avec de l'argent public. 

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Dans le Rhône, à Sainte-Catherine, une nouvelle église a retiré ses vitraux réalisés par le père Louis Ribes. Ce dernier, accusé d'actes de pédophilie sur des enfants, aurait sévi dans les diocèses de Lyon, Saint-Etienne et Grenoble. Des faits commis pendant 40 ans, entre les années 1950 et 1990. ©France Télévisions

Pédophilie dans l'Église : nouveau scandale

Le père Louis Ribes, décédé en 1994 à l'âge de 74 ans, a fait l'objet, à l'été 2021, de signalement par des victimes présumées, auprès du diocèse de Lyon. Ses agissements éclatent alors au grand jour. Mais avec ce nouveau scandale, ce sont en fait trois diocèses qui sont éclaboussés : les diocèses de Lyon, de Grenoble-Vienne et de Saint-Etienne. Ils ont reconnu l'existence d'une nouvelle affaire de pédophilie au sein de l'Église.

En mai 2022, le collectif des victimes du père Ribes a organisé sa première conférence de presse pour rendre public son combat. Faute de procès, les victimes de Louis Ribes réclament depuis des mois le retrait des œuvres du prêtre pédophile. Selon eux, un gage de respect des souffrances endurées par les victimes et une prise en considération de leur parole. 

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