Depuis le début du scandale sanitaire aux PFAS, dans le sud de Lyon, seule la consommation des œufs contenant ces substances per- et polyfluoroalkylées était interdite. Mais à la lumière de nouveaux résultats, la préfecture recommande ce lundi 4 mars de ne pas consommer les fruits et légumes dans un rayon de 500 mètres autour de l'usine, et de ne pas utiliser l'eau souterrainne ou l'eau pluviale.
Impasse de la Lône, au sud de la plateforme industrielle de Pierre-Bénite, l'eau souterraine d'un puits privé contient jusqu'à 3,52 μg/L de PFAS (pour la somme de 20 molécules). C'est 35 fois plus que la norme européenne pour l'eau potable, fixée à 0,1 μg/L.
Considérées comme toxiques, les substances per- et polyfluoroalkylées peuvent persister dans l’environnement pendant des siècles et pendant plusieurs années dans nos organismes. Constatation similaire avenue de la Terrasse, sur l'eau de pluie cette fois : des résultats 10 fois au-dessus de la limite.
Bien sûr, cette eau-là n'est pas directement destinée à la consommation humaine. Reste que chez les habitants concernés, elle sert à arroser les légumes du potager ou à abreuver les poules - dont la consommation des œufs est proscrite depuis plus d'un an. Conséquence, les blettes de l'avenue de la Terrasse, par exemple, contiennent des taux de PFAS bien supérieurs aux teneurs maximales recommandées au niveau européen.
La préfecture du Rhône vient donc de prendre de nouvelles recommandations "pour limiter autant que possible l’exposition aux PFAS". Dans un rayon de 500 mètres autour du panache de dispersion des rejets de l’usine Arkema, il est conseillé de "ne pas consommer les fruits et légumes produits dans les jardins potagers de ce secteur", et de "ne pas utiliser l’eau des puits privés, ni les eaux pluviales, et ce quel qu’en soit l’usage".
Ces recommandations sont prises sur la base de l'étude environnementale prescrite par la préfecture à l'industriel Arkema et conduite l'été dernier. Au total, 35 PFAS avaient été analysés sur plus de 125 prélèvements réalisés dans des jardins (analyse des sols, potagers et eaux d’arrosage), dans les sols de 15 sites sensibles (écoles, collèges, parcs...). Les résultats avaient été publiés en décembre 2023, mais les pouvoirs publics locaux avaient besoin d'un examen approfondi avant d'évaluer le risque sanitaire.
Ces résultats ne sont que la première étape de l'étude environnementale prescrite à Arkema. “Une réflexion plus approfondie en termes de recommandations générales est menée concernant la zone supérieure à 500 mètres en lien avec les autorités nationales", indique la préfecture. Elle rappelle que "ces mesures sont édictées, malgré l’absence de valeurs de gestion nationales pour ces milieux". Une évaluation des risques sanitaires est en cours à l’INERIS.
En juillet dernier, prenant les devants, Arkema avait déjà déconseillé la consommation des légumes jardinés dans ses potagers partagés, situés à proximité directe de la plateforme. Le PFNA, molécule utilisée par l'industriel jusqu'en 2016 et retrouvée en majorité dans les légumes analysés, est jugé par une étude néerlandaise (J. Zeilmaker et al. 2018) comme potentiellement 10 fois plus dangereux que le PFOA, lui-même déclaré cancérigène pour l’Homme par le CIRC le en novembre 2023.