Ces deux vestiges du célèbre port artificiel créé par les alliés après le débarquement de 1944 allaient partir à la ferraille après avoir longtemps fait office de pont dans les Ardennes. Elles ont été rapatriées pour être installées ce mardi près de la table d'orientation.
Il était là au lever du jour au sommet de cette falaise balayée par un vent frisquet pour ne rien manquer du spectacle. L'association Port-Winston que préside Gérard Lecornu militait depuis des années pour que ces deux passerelles reviennent en Normandie. "Pour nous, c'est un jour exceptionnel, dit-il. Nous attendions cela depuis les années 90. C'est un peu un hommage rendu aux fondateurs du port artificiel".
Les 183 passerelles formaient une étonnante voie posée sur l'eau, longue de plusieurs kilomètres. Après la guerre, quand les installations ont perdu leur raison d'être, les pièces de ce mécano géant ont aisément trouvé une seconde vie dans un pays en partie détruit, où l'acier était rare, où les besoins étaient énormes. Elles ont petit à petit été expédiées aux quatre coins du pays. "Il y en a même jusqu'en Afrique" sourit Gérard Lecornu.
Deux d'entre elles ont été recyclées à Revin dans les Ardennes où elles devaient pallier la destruction du pont Saint-Nicolas. Mais le provisoire a duré. Il faut dire que ces pièces fabriquées à la chaîne en Angleterre avant le D-Day sont très robustes. Ce n'est n'est qu'en 2014 qu'un nouveau pont est venu enjamber la Meuse. Les deux passerelles auraient normalement du partir à la casse sans la vigilance de l'association Port-Winston.
70 ans après, retour de 2 passerelles du port artificiel à Arromanches avec l'aide de La Région @LbeauvaisBN pic.twitter.com/zLxnulVeY1
— Arnaud Boyer (@arnaud_boyer) 21 Avril 2015
La région Basse-Normandie a donc fait l'acquisition de ces deux pièces qui pèsent chacune 41 tonnes. Le ministère de la défense et l'Assemblée Nationale ont aussi apporté leur contribution pour financer le transport exceptionnel des passerelles jusqu'à Arromanches. Elles sont enfin arrivées à bon port. Une grande grue est déployée pour les poser sur des socles de béton spécialement aménagées près de la table d'orientation. Désormais, elles ne pourront pas échapper au regard des centaines de milliers de touristes qui viennent ici chaque année pour contempler les vestiges du port artificiel Mulberry.
Le reportage de Thierry Cléon et Jean-Michel Guillaud :