Le Covid-19 ne cause pas que des dommages sanitaires. À plus long terme, de multiples structures risquent la fermeture. C’est notamment le cas d’une institution centenaire, les Petits Chanteurs à la Croix de bois, basée à Autun (Saône-et-Loire).
« Si je dois retourner à un collège où il n’y a pas une formation comme les Petits chanteurs je serai déçu », témoigne Baptiste. À 11 ans, c’est la deuxième année qu’il passe au sein de cette chorale, qui ne chante plus actuellement.Elle accueille ordinairement une cinquantaine de garçons issus de milieux modestes, tous âgés entre 9 et 17 ans. Une institution créée en 1906 qui, à cause du Covid-19, et comme beaucoup d’autres structures culturelles, risque de pâtir de la situation. C’est la raison pour laquelle sa direction a lancé une campagne de financement participatif en ligne sur la plateforme Credofunding.
Bien connus en Asie, les Petits chanteurs ont vu leur tournée en Chine prévue au mois de janvier annulée en raison du coronavirus. Un problème majeur pour la structure dont les revenus proviennent à 80% des représentations (et à 20% des dons). « On a essayé d’amortir en interne dans un premier temps et là on a amorcé un cap. Le modèle économique des Petits chanteurs est le suivant : en début d’année, la structure porte toutes les charges et, en fin d’année, les revenus arrivent avec les concerts », explique Vincent Bruggeman, le directeur délégué.
Un avenir en suspens
Comme d’autres, la direction a mis en place du chômage partiel, demander un financement d’urgence à l’État et requis un prêt auprès de sa banque. L'association n'en est pas à ses premières péripéties financières. Par le passé, en 2014, l'association des Petits chanteurs avait déposé le bilan avant d'être rachetée par la maîtrise de la cathédrale d'Autun, où elle est désormais installée.« Ce qui est difficile avec le Covid-19 c’est que cela tue des vies et va tuer des entrepreneurs et énormément de structures en France. Les Petits Chanteurs en fait partie, si jamais on n’arrivait pas à lever énormément de dons. Nos revenus principaux viennent essentiellement de nos concerts. Nous n'avons aucune subvention. » Deux petites tournées étaient initialement prévues en mai et en juin avant celle de cet été en France.
Un financement participatif par palier
À ce jour, après seulement 11 jours de mise en ligne, la cagnotte - qui ne cesse de grimper - est déjà à 85% de son objectif de 30 000€.Mais la campagne de financement pourrait ne pas s’arrêter là si la situation venait à perdurer. La chorale se veut transparente sur le sujet : « Depuis janvier, on travaille à des estimations. On a fait [la cagnotte] par pallier. Il y a le premier palier en ce moment. Si jamais les tournées sont annulées jusqu’à fin juin il y a deuxième palier et enfin le troisième palier si la tournée de juillet-août est annulée et là ce serait la catastrophe », explique le directeur.
Selon ses estimations, de 30000€ actuellement, la structure pourrait avoir besoin de 80000€ au second palier, voire de 160000€ si la tournée de cet été venait à être supprimée. Des montants qui permettraient de couvrir les pertes liées aux concerts et de payer ainsi les charges, comme les dépenses avancées de salaires, le loyer... La direction de la chorale a préféré anticiper le pire. « La priorité, aujourd’hui, ce sont les malades et les soignants, mais il y aura un après-coronavirus. En tant que dirigeant, j’ai une mission. Les gens seront touchés ou non par notre appel mais notre devoir est de le faire savoir », témoigne Vincent Bruggeman.« La priorité, aujourd’hui, ce sont les malades et les soignants, mais il y aura un après-coronavirus.
Des répétitions 2.0 et en solo (ou presque)
Le coronavirus n'empêche pas de penser à l’après. C’est pourquoi les Petits Chanteurs d’Autun ne se sont pas arrêtés de chanter puisque les concerts devraient bien reprendre un jour. À la place de ses dix heures de musique par semaine, Baptiste en fait désormais une à trois heures chez lui, seul ou avec son frère aîné, Théophile, qui fait lui aussi partie des Petits Chanteurs.« Notre chef de choeur nous envoie en chaque début de semaine des chants à travailler et à la fin de la semaine on doit les connaître. Il n’y a pas d’évaluation spéciale, il nous fait confiance. De toute façon, comme pour les tournées, si on ne travaille pas on ne peut pas partir en tournée sans connaître nos chants », raconte Baptiste. Une situation particulière dont il s’accommode tant bien que mal : « C’est plus compliqué pour les répétitions. On doit travailler chez nous et sans le choeur autour on a moins d’appui. Les professeurs nous ont envoyé des liens MP3 pour écouter les chants qu’ils nous donnent à travailler : les tutti, les voix du choeur et nos voix mais c’est plus compliqué qu’ensemble, en vrai choeur. » De son propre aveu, ses parents sont là derrière pour le motiver.
Son frère, Théophile, s’acclimate plus facilement à cette nouvelle organisation : « Je préfère chanter en choeur plutôt que de chanter chez moi, à la maison, tout seul. D’un autre coté, c’est un peu plus facile pour apprendre ses chants car d’habitude on les apprend pupitre par pupitre [selon le timbre de voix] donc c’est moins rapide. »