"Ce n'est pas le Covid qui allait tuer nos résidents mais la solitude", dans l'Yonne, un Ehpad ouvre un "parloir"

Dans l'Yonne, l'Ehpad de Saint-Agnan a choisi de mettre en place un "parloir" sécurisé pour permettre aux familles et aux résidents de se voir et de s'entendre tout en se protégeant de l'épidémie de coronavirus, une des premières initiatives du genre en Bourgogne Franche-Comté.

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« J’ai beaucoup pleuré » c’est par ces mots que Jeanine Goupillot, 85 ans, raconte les retrouvailles avec sa fille, ce jeudi 16 avril dans l’après-midi.  Cette résidente de l’Ehpad de Saint-Agnan, dans l’Yonne, n’avait pas eu de visite depuis près d’un mois. « C’est difficile parce qu’on ne peut pas sortir comme on veut. Avant, ma famille venait me voir une fois par semaine c’était très important ».

 

"Ca va me faire beaucoup de bien et je me sentirai moins abandonnée" Jeanine, 85 ans



Des retrouvailles possibles grâce à l’aménagement d’un « parloir » au sein de l’établissement. Et ça donne du baume au cœur à Jeanine « quand je vais y repenser ce soir ça va me faire beaucoup de bien et je me sentirai moins abandonnée » nous confie cette dame, résidente ici depuis 3 ans.  

Christiane sa fille est également très émue : « on vivait cette séparation assez difficilement mais c’était pour elle on la protégeait ». Lorsque l’établissement a proposé ce système, Christiane a d’abord été surprise mais finalement contente : « ils font toujours tout pour le meilleur des résidents et donc c’est super ! » nous explique-t-elle.

Les retrouvailles : « des larmes et beaucoup d’émotion. La revoir on n’y croit pas ! J’espère que ça va lui redonner du courage car je sentais, au téléphone, qu’elle perdait un peu le moral » ajoute Christiane qui compte bien revenir prochainement voir sa mère en compagnie de proches.
 

"Ca n'était pas le covid-19 qui allait tuer nos résidents mais la solitude" Sandra Loretti, directrice de l'Ehpad


Un peu joie de vivre retrouvée grâce à un parloir mis en place depuis ce mardi 14 avril dans cet établissement. Une initiative prise avant même une quelconque demande des autorités : « on s’est dit que ca n’était peut-être pas le covid-19 qui allait tuer nos résidents mais la solitude, oui. On a vu des personnes qui déclinaient car elles n’avaient pas le moral et le fait de voir leur famille ça change vraiment tout, ça leur permet de tenir, d’aller mieux et de voir leurs enfants » confie Sandra Loretti, la directrice. Une mise en place soutenue par les familles des 37 résidents de cet Ehpad.
 


L'établissement avait mis des premières mesures en place. Cependant, par précaution, « on a interdit les visites avant même la décision du gouvernement car on s’est dit qu’il y avait trop de risques. Ensuite, les personnes âgées ont été confinées en chambre très rapidement. Dans le secteur, les familles ont été très compréhensives et elles ont soutenu ces mesures selon la direction « pour le bien de leurs proches » raconte la directrice de l'établissement.

Evidemment, pour les résidents c’est une forme d’isolement qui est difficile à vivre. « On a très vite mis en place un système de Skype pour être en lien avec les familles mais toutes ne sont pas aussi à l’aise avec les nouvelles technologies ». Les résidents sont confinés en chambres mais des animations sont organisées pour maintenir une activité et du lien social. « On fait des lotos dans les couloirs, on passe les voir pour des animations en chambres et ils peuvent aussi faire des promenades mais uniquement de façon individuelle ».

 

 "Il fallait trouver des moyens pour les rassurer" Sandra Loretti, directrice de l'Ehpad



Malgré tout cela les familles sont quand même très anxieuses et donc « il fallait trouver des moyens pour les rassurer ». C’est comme cela qu’est née l’idée d’un parloir où résidents et familles pourraient se voir et se parler mais en toute sécurité.  « Il s’agit d’une sorte de sas comme une terrasse qui donne dans le couloir du premier étage ». Les familles peuvent y entrer de l’extérieur en arrivant par le jardin sans passer par l’intérieur du bâtiment. Le résident, lui, accède dans les lieux par le couloir du premier étage. « Une paroi en plexiglas sépare la pièce en deux ce qui permet de se voir et de s’entendre sans danger » précise la directrice. Une désinfection de la paroi et du siège du résident est effectuée après chaque utilisation. Du gel hydroalcoolique est également à disposition des familles.

Des visites de 30 minutes possibles quotidiennement entre 14h et 16h. « Mais il faut s’inscrire au moins 48h à l’avance, car il y a de la demande ! » prévient Sandra Loretti.

Selon la direction, au début, les familles appréhendaient car elles avaient peur de mettre en danger les proches « et finalement quand elles comprennent le principe elles sont heureuses car elles peuvent les voir en toute sécurité ». Les résidents, eux, n’attendaient que ça : « ils se sentent revivre car c’est dur être coupé de tout le monde, surtout quand on est en Ehpad », ajoute la directrice.

 

"C’est dur d’en arriver là mais c’est mieux que rien" Sandra Loretti, directrice de l'Ehpad



Au moment où les Français découvrent les "promenades" d’une heure autorisées, les Ehpad mettent en place des « parloirs ». Un vocabulaire carcéral mais un outil nécessaire selon Sandra Loretti : « c’est dur d’en arriver là mais c’est mieux que rien. Les mots sont tristes et le système surement pas agréable pour tout le monde mais c’est nécessaire en raison de la situation qu’on traverse ».

Une méthode qui semble faire ses preuves et que l'Ehpad compte poursuivre aussi longtemps que la situation épidémique ne s'améliorera pas. « On envisage même de trouver un autre endroit pour mettre en place un autre parloir et ainsi permettre à plus de familles de venir en même temps ».

Cette initiative, une des premières du genre en Bourgogne, a nettement changé l’ambiance de l’établissement pour les résidents comme pour le personnel « qui reçoit aussi les encouragements de la famille et ça fait du bien aux équipes pour la période est aussi très difficile ! » s’exclame Sandra Loretti

Sur décision du gouvernement, les visites dans les ehpad sont « intégralement suspendues » depuis le 11 mars, une semaine avant le confinement mis en place dans le pays entier. Depuis, les autorités sanitaires tolèrent des exceptions « accordées par le directeur de l'établissement après une appréciation au cas par cas », pour les motifs suivants : « une situation de fin de vie, une décompensation psychologique ou un refus de s'alimenter qui ne trouve pas de réponse au sein de l'établissement ». Une liste  « non limitative », selon les dernières consignes du ministère de la Santé.

 

 
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