Avec le confinement, de nombreux citadins ont quitté la Région parisienne ou les grandes villes pour rejoindre leur maison de campagne. C'est le cas dans le Morvan. Sur place, l'arrivée des nouveaux venus suscite l'inquiétude des villageois, qui craignent que les arrivants aient apporté le virus.
"On a peur qu’ils nous apportent le virus de Paris"
Juste avant l'annonce des mesures de confinement demandant à la population de rester chez elle sous peine d'amendes, on a assisté à un véritable exode.
De nombreux citadins ont préféré quitter leurs appartements pour aller s’installer dans leur résidence secondaire, afin de bénéficier d’un cadre de vie plus agréable pendant le confinement.
C’est ainsi que le hameau de Montsauche-les-Settons, au coeur du Morvan, a vu arriver, avec plusieurs mois d’avance, des résidents de la période estivale.
C’est le cas de Chantal et Jean-Paul qui, depuis 16 ans, quittent la Région parisienne pour passer les beaux jours dans leur maison de campagne. Mais, cette fois, ils ont été accueillis par des remarques acides. "On m'a dit "est-ce que vous amenez la maladie ? ", raconte Jean-Paul. "Évidemment, on peut l’amener", reconnaît-il.
C’est bien ce qui inquiète certains habitants : "on a peur qu’ils nous apportent le virus de Paris", dit une femme, qui fait remarquer qu’ici "il n’y a pas beaucoup de médecins, pas beaucoup d’infirmiers".
Mais, d’autres sont plus fatalistes : "les virus, ça circule. Il ne faut pas être paniqué. Ca a déjà existé. Si on passe à travers, tant mieux", déclare une villageoise.
Chez les commerçants aussi, les avis sont partagés
"Ils achètent beaucoup plus, donc, nous on a augmenté nos commandes. Je les comprends tout à fait, mais il faut aussi respecter les règles que le gouvernement impose", dit une marchande.
La boulangère, elle, est plus catégorique : "ils se mettent, eux, en sécurité, mais est-ce qu’ils pensent à nos personnes âgées ? Je ne suis pas sûre", dit-elle.
Quant à Marie Leclercq, la maire de Montsauche-les-Settons, elle a tout de suite mis les choses au clair avec les nouveaux arrivants. "Quand ils sont arrivés le premier jour, il faisait presque 20 degrés Ça prêtait à aller se promener au bord du lac. Mais, il y a eu des contrôles, il y a eu des rappels et maintenant c'est respecté."
La consigne est la même pour tout le monde : rester chez soi.
"Les gens essaient de se construire un projet positif"
Dans l'imaginaire, "la ville reste le lieu des mauvaises odeurs, des maladies et des émeutes", explique le sociologue Jean Viard, qui n’est pas étonné par cet exode précipité.
"C'est un vieux modèle de protection de l'aristocratie", rappelle-t-il. "Historiquement, les bourgeoisies urbaines ont toujours eu une maison à une journée de cheval pour pouvoir mettre leur famille à l'abri en cas de peste ou de chaleur. (...)
En 1939, nombre de bourgeois se sont achetés des demeures à la campagne, pour aller y passer la guerre en cas de victoire des nazis."
Par ailleurs, ce vieux réflexe est renforcé par le fait qu'il "faut se structurer psychologiquement : on risque d'être marqués par des morts, que ce soit de gens célèbres, d'amis ou de parents. Donc les gens essaient de se construire un projet positif."