En juin 2021, des centaines d'hectares de forêts en Côte-d'Or ont perdu leurs feuilles jusqu'à devenir gris. Ce phénomène est dû à une épidémie de chenilles de Bombyx disparate. Ces insectes ravageurs dévorent les feuilles des chênaies, charmaies et hêtraies.
Dans certaines forêts de Côte-d'Or, on pourrait croire que l'hiver a déjà frappé. Des pans entiers de forêts ont perdu leurs feuilles. En cause, les chenilles de Bombyx disparate, des insectes ravageurs qui se nourrissent notamment de feuilles de chêne.
Depuis 2019, cet insecte défoliateur (qui mange les feuilles) s'attaque massivement aux arbres feuillus dans plusieurs départements de Bourgogne-Franche-Comté, avec 500 hectares entièrement défoliés. Il s'était alors fait remarquer dans le Val-de-Saône. En 2020, sa prolifération a résulté en la défoliation de plus de 6000 hectares de chênaies-charmaies (forêts composées principalement de chênes et de charmes) en Côte-d'Or, Haute-Saône et Saône-et-Loire.
Cette année, plusieurs centaines d'hectares de forêts sont déjà affectés en Côte-d'Or. "Une vigilance accrue est donc plus que jamais de mise sur ces peuplements forestiers", indique le Département de la Santé des Forêts (DSF) dans un rapport daté de juin 2021.
Quels sont les risques causés par ces chenilles ?
Pour l'Homme, les chenilles de Bombyx disparate ne posent aucun danger. Elles ne sont pas urticantes, contrairement à certaines de leurs congénères comme le Bombyx cul brun ou la processionnaire du chêne.
"Ça interpelle beaucoup les gens parce que l'aspect est impressionnant" explique Mathieu Mirabel, responsable du DSF en Bourgogne-Franche-Comté. "Mais il n'y a pas d'enjeu de santé humaine, donc pas de traitement à large échelle à mettre en place. Les traitements seraient de toute façon non spécifiques et détruiraient tous les types de chenilles."
Pour les arbres, les risques sont plus importants. En général, la défoliation partielle ou totale provoque seulement un affaiblissement des arbres et non leur mort. L'arbre défolié doit en effet puiser dans ses réserves de carbone pour reconstituer son feuillage. Cela peut impacter la fructification et le développement des plantations les plus jeunes.
Le risque principal provient d'une défoliation totale plusieurs années de suite. "Lorsqu'il y a deux défoliations totales successives, les risques de dépérissement et de mortalité sont importants", ajoute Mathieu Mirabel. "Avec les sécheresses et les chaleurs, on observe aujourd'hui beaucoup de dépérissements sur le hêtre et le charme."
Pourquoi tant de chenilles dans la région aujourd'hui ?
Les gradations de Bombyx disparate, c'est-à-dire les épidémies, se produisent tous les six ou sept ans sur le pourtour méditerranéen. Cette année pourtant, c'est la Côte-d'Or qui semble être le département le plus touché, selon le DFS. "Pour des défoliations de cette ampleur, il faut compter plusieurs milliers voire millions de chenilles", illustre le responsable.
En Bourgogne-Franche-Comté, la dernière invasion de chenilles de Bombyx disparate a eu lieu entre 1992 et 1994. Plusieurs milliers d'hectares de forêts avaient déjà été touchés.
Alors pourquoi une telle présence des ravageurs en Côte-d'Or aujourd'hui ? "Le développement de ce type de chenilles est favorisé par les chaleurs et les sécheresses", raconte Mathieu Mirabel. "Or depuis 2018, elles s'enchaînent."
Les périodes de pullulation de Bombyx disparate durent généralement entre deux et quatre ans. "Cet insecte est présent dans la plupart des habitats naturels, alors petit à petit les prédateurs et parasites apparaissent pour réguler les populations", note-t-il.
Pendant les gradations, il est conseillé de perturber le moins possible les milieux naturels dans lesquels les insectes se trouvent. Cela pourrait en effet déstabiliser le processus naturel d'auto-régulation.